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Les bamakois diplômés de Paris

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diplôme. Mais alors que l’emploi précaire ne <strong>de</strong>vrait être que la première étape <strong>de</strong><br />

leur vie active, un certain nombre <strong>de</strong> mes interlocuteurs ne parvient pas à sortir du<br />

marché du travail secondaire. Loin d’être l’apanage <strong>de</strong>s populations étrangères en<br />

France, les emplois précaires concernent un nombre toujours plus grand <strong>de</strong><br />

travailleurs.<br />

Cependant, le statut juridique <strong>de</strong> l’étranger apparaît comme un obstacle<br />

supplémentaire pour accomplir la transition vers la stabilité <strong>de</strong> l’emploi. Soumis au<br />

système <strong>de</strong>s titres <strong>de</strong> séjour (annuel pour la plupart <strong>de</strong>s enquêtés), mes interlocuteurs<br />

ne sont que <strong>de</strong>s rési<strong>de</strong>nts à durée déterminée. Pour stabiliser leurs conditions<br />

d’emploi, il leur faudrait changer <strong>de</strong> statut juridique, mais pour changer <strong>de</strong> statut<br />

juridique, il leur faudrait justifier d’une stabilité d’emploi. À la fois rési<strong>de</strong>nts et<br />

travailleurs temporaires, certains enquêtés sont placés dans cette situation<br />

tel-00708235, version 1 - 14 Jun 2012<br />

inextricable qui leur imposent le provisoire comme mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> vie.<br />

C’est donc dans un mon<strong>de</strong> du travail segmenté – nationaux/étrangers, emplois<br />

précaires/emplois stables – que les enquêtés construisent leur expérience<br />

d’immigration en France. Ces normes freinent leur carrière professionnelle et les<br />

maintiennent dans une situation <strong>de</strong> travail à mobilité réduite. Mais plus important<br />

encore, elles suffisent à reproduire par le bas la condition sociale <strong>de</strong> l’immigrant.<br />

<strong>Les</strong> enquêtés, à quelques exceptions près, ont vécu un double déclassement. À<br />

Bamako, ils ne sont pas parvenus à intégrer durablement et à hauteur <strong>de</strong> leur niveau<br />

d’étu<strong>de</strong> le marché du travail malien. C’est pour lutter contre la mobilité sociale<br />

∻<br />

<strong>de</strong>scendante qu’ils immigrent en France.<br />

À <strong>Paris</strong>, ils se sont trouvés également dans l’obligation <strong>de</strong> construire leur<br />

itinéraire professionnel à partir <strong>de</strong>s positions basses <strong>de</strong> la hiérarchie sociale française.<br />

De ce fait, ils n’ont pas pu accé<strong>de</strong>r aux classes supérieures, alors qu’ils étaient issus <strong>de</strong><br />

la petite bourgeoisie malienne.<br />

En bref, l’immigration à <strong>Paris</strong> ne leur a pas permis <strong>de</strong> reproduire leur condition<br />

sociale originelle.<br />

∻<br />

Le diplôme n’est plus un rempart infaillible contre le déclassement. En France<br />

comme au Mali, les mécanismes <strong>de</strong> reproduction sociale fondés sur l’École<br />

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