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Jonathan Strange & Mr Norrell

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Sir Walter, cependant, ne s’embarrassait pas de tels préjugés ; il<br />

manda d’urgence <strong>Mr</strong> Baillie.<br />

<strong>Mr</strong> Baillie était un gentleman écossais qui passait depuis<br />

longtemps à Londres pour le premier praticien de sa profession.<br />

Auteur d’un grand nombre d’ouvrages aux titres ronflants, il<br />

était médecin extraordinaire du roi. Il avait une physionomie<br />

raisonnable et tenait à la main une canne à pommeau d’or,<br />

symbole de son importance. Il répondit promptement à l’appel<br />

de Sir Walter, impatient de prouver la supériorité de la Faculté<br />

sur la magie. Son examen fait, il ressortit de la chambre.<br />

Madame était en parfaite santé, d’après lui. Elle n’avait même<br />

pas un refroidissement.<br />

Sir Walter expliqua une nouvelle fois combien elle était<br />

différente à présent de ce qu’elle était voilà seulement quelques<br />

jours.<br />

<strong>Mr</strong> Baillie considéra Sir Walter d’un air songeur. Il affirma<br />

comprendre le problème. Sir Walter et Madame n’étaient pas<br />

mariés depuis longtemps, n’était-il pas vrai ? Eh bien, Sir<br />

Walter devait lui pardonner, mais les médecins se voyaient<br />

souvent dans l’obligation de dire des choses que les autres<br />

taisaient. Sir Walter n’était pas habitué à la vie conjugale. Il<br />

allait vite découvrir que les gens mariés se querellaient souvent.<br />

Il ne fallait pas en avoir honte ; les couples les plus unis ne<br />

s’entendaient pas toujours et, quand cela arrivait, il n’était pas<br />

rare qu’un des conjoints feignît une indisposition. Et ce n’était<br />

pas non plus toujours la dame. N’y avait-il pas quelque chose,<br />

peut-être, que Lady Pole avait pris à cœur ? Eh bien, s’il<br />

s’agissait d’une vétille, d’une nouvelle robe ou d’un chapeau à<br />

brides, par exemple, pourquoi ne pas les lui offrir, puisqu’elle y<br />

tenait tant ? Si c’était une chose plus importante, comme une<br />

maison ou un voyage en Écosse, il serait alors peut-être<br />

préférable d’en discuter avec elle. <strong>Mr</strong> Baillie était certain que<br />

Madame était une personne raisonnable.<br />

Il s’écoula un silence pendant lequel Sir Walter fixa<br />

<strong>Mr</strong> Baillie tout du long de son nez.<br />

— Madame et moi ne nous sommes pas querellés, déclara-til<br />

enfin.<br />

Ah, fit <strong>Mr</strong> Baillie de manière bienveillante. Il pouvait très<br />

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