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Jonathan Strange & Mr Norrell

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— Moi qui pensais, monsieur, objecta <strong>Mr</strong> Lascelles, que<br />

Sutton-Grove était illisible. J’ai toujours entendu dire que De<br />

generibus artium était un pensum absolument illisible.<br />

— Oh ! répliqua <strong>Mr</strong> <strong>Norrell</strong>, dans quelle mesure il peut<br />

divertir ces dames et ces messieurs, je l’ignore. Quant à un<br />

étudiant de magie sérieux, il ne fera jamais trop grand cas de<br />

Sutton-Grove. Chez cet auteur, il trouvera la première tentative<br />

de définition des domaines de la magie que le magicien<br />

moderne devrait étudier, tous exposés par listes et tables.<br />

Certes, le système de classification de Sutton-Grove est souvent<br />

erroné – peut-être est-ce là ce que vous entendez par<br />

« illisible » ? -, néanmoins je ne connais vision plus plaisante au<br />

monde que sa douzaine de listes ; l’étudiant peut les parcourir<br />

des yeux et songer « je connais ceci » ou « j’ai encore cela à<br />

voir », et il a devant lui assez de travail pour quatre, peut-être<br />

cinq ans.<br />

L’histoire des statues de la cathédrale d’York devint si rancie<br />

à force d’être répétée que le monde commença à se demander si<br />

<strong>Mr</strong> <strong>Norrell</strong> avait jamais accompli autre chose ; <strong>Mr</strong> Drawlight fut<br />

forcé d’inventer de nouveaux échantillons de sa magie.<br />

— De quoi est donc capable ce magicien, monsieur<br />

Prescriptions et Descriptions, 1749. Même <strong>Mr</strong> <strong>Norrell</strong>, le plus grand (et,<br />

de fait, l’unique) admirateur de Sutton-Grove, trouvait Prescriptions et<br />

Descriptions, où l’auteur tentait d’exposer les lois de la magie pratique,<br />

abominablement mauvais, et l’élève de <strong>Mr</strong> <strong>Norrell</strong>, <strong>Jonathan</strong> <strong>Strange</strong>,<br />

l’abhorrait tant qu’il déchira son exemplaire en pièces et le donna à<br />

manger à l’âne d’un rétameur (cf. La Vie de <strong>Jonathan</strong> <strong>Strange</strong>, de John<br />

Segundus, John Murray éd., 1820).<br />

De generibus artium magicarum anglorum était réputé être l’ouvrage le<br />

plus ennuyeux du canon de la magie anglaise (qui contient pourtant<br />

maints ouvrages fastidieux). C’était la première tentative d’un Anglais<br />

pour définir les domaines de magie que le magicien moderne devait<br />

étudier ; selon Sutton-Grove, ceux-ci s’élevaient à trente-huit mille neuf<br />

cent quarante-cinq, et il les a tous cités sous différents chapitres. Sutton-<br />

Grove annonce le grand <strong>Mr</strong> <strong>Norrell</strong> d’une autre manière encore : aucune<br />

de ses listes ne signale la magie traditionnellement attribuée aux oiseaux<br />

ou aux bêtes sauvages, et Sutton-Grove exclut expressément ces sortes<br />

d’enchantements pour lesquels la coutume préfère recourir aux fées, par<br />

exemple, à seule fin de ramener les morts à la vie.<br />

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