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Jonathan Strange & Mr Norrell

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Sans doute, songea Stephen, cela tenait-il aussi de la magie<br />

que les habitants de cette ville ne remarquassent pas combien le<br />

gentleman parlait fort, et comment ses paroles résonnaient dans<br />

la moindre encoignure chaulée.<br />

La ruelle qu’ils descendaient tourna au coin pour se terminer<br />

brusquement par un long muret qui avait été construit là afin<br />

d’empêcher les passants étourdis de tomber dans le précipice.<br />

De ce belvédère, on avait vue sur la campagne environnante.<br />

Balayée par un vent chaud, une morne vallée de roches blanches<br />

s’étendait sous un ciel sans nuage. C’était un monde qui avait<br />

été dépouillé de toute chair et dont il ne restait plus que les os.<br />

Stephen aurait cru que ce lieu était un rêve ou la<br />

conséquence d’un enchantement, si le gentleman aux cheveux<br />

comme du chardon ne lui avait annoncé avec jubilation :<br />

— «… l’Afrique ! La terre de vos ancêtres, mon cher<br />

Stephen ! »<br />

« Mes ancêtres ne vivaient pas ici, j’en suis sûr, réfléchissait<br />

Stephen. Ce peuple est plus foncé que l’Anglais et beaucoup plus<br />

clair que moi. Ce sont des Arabes, à mon avis. » À haute voix, il<br />

demanda :<br />

— Allons-nous quelque part en particulier, monsieur ?<br />

— Visiter le bazar, Stephen !<br />

Stephen fut ravi à cette nouvelle. Le silence et la solitude<br />

étaient oppressants. Le bazar ne manquerait sans doute pas de<br />

bruit et d’animation.<br />

Le bazar local se révéla toutefois être d’une nature très<br />

étrange. Il était situé à proximité des remparts de la ville haute,<br />

juste devant une porte en bois monumentale. Il n’y avait pas<br />

d’éventaires, pas de cohue de chalands qui déambulaient pour<br />

inspecter les marchandises. Au contraire, tous ceux qui étaient<br />

tant soit peu disposés à acheter quoi que ce fût s’asseyaient par<br />

terre en silence, les mains jointes, tandis qu’un responsable du<br />

marché – une sorte de commissaire-priseur – faisait circuler les<br />

produits pour les montrer aux acheteurs éventuels. Le<br />

commissaire-priseur annonçait le dernier prix qui lui avait été<br />

proposé, et le client secouait alors la tête ou renchérissait. Les<br />

marchandises n’offraient pas une grande variété ; à part<br />

quelques balles de belle étoffe et des articles brodés, les tapis<br />

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