la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal
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663 -<br />
fit ÉrtpMk prisoBolère kl ait Inspiré mie passion si ? ire<br />
es détruisant Lesbos. »<br />
Ce n'est pas sans doute parce qu'il a détruit Lesbos<br />
qu'il lui a inspiré <strong>de</strong> fa passion. Maïs <strong>de</strong>puis<br />
quand n'est-il pas nature! qu'use jeoae princesse<br />
aime un jeune héros, le ils d'une déesse, Achille<br />
enfin, dont tous les anciens ont vanté <strong>la</strong> beauté? Il<br />
y a beaucoup d'exemples <strong>de</strong> captives qui ont aimé<br />
leurs vainqueurs, et ce vainqueur n'était pas toujours<br />
un Achille. Enfin, voyons si <strong>la</strong> manière dont<br />
Euriphile raconte que cet amour a pris naissance,<br />
nous paraîtra si peu vraisemb<strong>la</strong>ble.<br />
RappeileraS-Je eocor le souvenir affreux<br />
Du jour qui dans les fers nous jeta toutes <strong>de</strong>ux?<br />
Bans l« cruelles mains par qui Je fus ravie<br />
le <strong>de</strong>meurai longtemps sans lumière et sans vie.<br />
Enfin t mes tristes yeux cherchèrent <strong>la</strong> c<strong>la</strong>rté;<br />
Et f me voyant presser d'un bras ensang<strong>la</strong>nté,<br />
le frémissais, Boris, et d'un mmqmm sauvage<br />
Craignais dé rencontrer l'effroyable visage.<br />
rentrai dans son vaisseau, détestant sa fureur,<br />
Et toujours détournant ma vue avec horreur. %<br />
le le vis : son aspect n'avait rien <strong>de</strong> farouche;<br />
le sentis le reproche expirer dans ma bouche;<br />
le sentis contre moi mon cœur se déc<strong>la</strong>rer;<br />
l'oubliai ma colère, et ne sus que pleurer,<br />
le me <strong>la</strong>issai con<strong>du</strong>ire à cet aimable gui<strong>de</strong> :<br />
le l'aimaji à Lesbos, et Je Falme en âuli<strong>de</strong>.<br />
• On volt qu'elle a trouvé son vainqueur fort aimable,<br />
et d'autant plos qu'elle s'y attendait moins.<br />
Qu'y a-t-il <strong>de</strong> si étrange ? .<br />
On retrouve dans ce rôle d'Êriphile cette science<br />
particulière à Racine , <strong>de</strong> tirer parti <strong>de</strong> tous les mouvements<br />
<strong>de</strong> <strong>la</strong> passion , etd'en faire les principes naturels<br />
<strong>de</strong> <strong>la</strong> con<strong>du</strong>ite <strong>de</strong>s personnages et <strong>de</strong>s moyens<br />
<strong>de</strong> son iûtrigtfe. La jalousie d'Êriphile, aigrie par<br />
le spectacle <strong>du</strong> bonheur qui semble d'abord attendre<br />
Iphigénie, et <strong>de</strong> l'amour qu'Achille a pour elle,<br />
<strong>la</strong> porte à <strong>de</strong>s actions <strong>de</strong> méchanceté, d'ingratitu<strong>de</strong><br />
et <strong>de</strong> perfidie, très-admissibles dans un personnage<br />
sur lequel l'intérêt <strong>de</strong> <strong>la</strong> pièce ne s'arrête point, et<br />
qui doit être puni à <strong>la</strong> fin. Mais, <strong>de</strong> plus, Fauteur<br />
sait leur donner quelque excuse 9 en offrant sous les<br />
couleurs les plus frappantes le contraste <strong>du</strong> sort<br />
d'Ériphile et <strong>de</strong> celui d'Iphigénie. Quand ces <strong>de</strong>ux<br />
princesses arrivent ensemble, Boris, confi<strong>de</strong>nte <strong>de</strong><br />
<strong>la</strong> première, s'étonne <strong>de</strong> <strong>la</strong> tristesse où elle est plongée,<br />
tandis que l'amitié qu'elle lui suppose pour<br />
Iphigénie <strong>de</strong>vrait lui faire partager sa félicité. -<br />
Ériphile répond :<br />
Eh quoi ! te semble-t-Il que <strong>la</strong> triste Ëripfaik,<br />
Boive être <strong>de</strong> leur joie un témoin il tranquille?<br />
Crols-tn que mes chagrins alertent s'évanouir<br />
IL l'aspect d'un bonheur dont je ne puis Jouir?<br />
le vols Iphigénie entre les bras d f un père ; •<br />
Elle fait tout l'orgueil d'une superbe mère;<br />
Et mol, toujours en butte à <strong>de</strong> nouveaux dangers f<br />
.Remise dès l'enfance en <strong>de</strong>s bras étrangers,<br />
le- reçus et Je vois le jour que je respire,<br />
COU1S DE LITTÉRATURE.<br />
Sans que père si mère ait daigné aie sourira.<br />
Vient ensuite- l'aveu <strong>de</strong> sa passion pour Achille,<br />
quelle voit prêt à épouser sa rivale. Elle ne dissimule<br />
pas que cet hymen v s'il s'achève, sera l'arrêt<br />
<strong>de</strong> sa mort; elle ne cache rien <strong>de</strong> sa haine pour<br />
Iphigénie ; mais ses malheurs et son amour suffisent<br />
pour l'excuser.<br />
Observons à cette occasion, comme un principe<br />
général ? que l'espèce d'intérêt que nous prenons<br />
souvent au théâtre à <strong>de</strong>s personnages coupables et<br />
passionnés, intérêt qui ne va jamais plus loin qu'à<br />
les excuser et à les p<strong>la</strong>indre, ne blesse point l'équité<br />
naturellef qui veut toujours que le crime soit puni.<br />
Et pourquoi? C'est que celui à qui une passion violente<br />
fait commettre un crime en est déjà puni par<br />
cette passion même qui le tourmente, et souvent<br />
même puni plus cruellement qu'il ne le serait d©<br />
toute autre manière. C'est ainsi qffen y regardant<br />
<strong>de</strong> près, nous trouverons toujours dans l'effet théâtral<br />
cet accord entre les principes <strong>de</strong> l'art et ceux<br />
<strong>de</strong> <strong>la</strong> morale, que l'artiste ne doit jamais perdre <strong>de</strong><br />
vue.<br />
Ériphile a na moment d'espéranœ sur le faux brait<br />
qu 9 a fait courir Agamemnonf qu'Achille ne presse<br />
plus son mariage; prétexte dont il se servait dans <strong>la</strong><br />
lettre qui <strong>de</strong>vait empêcher le départ <strong>de</strong> son épouse<br />
et <strong>de</strong> sa fille. Mais elle est bientôt cruellement détrompée<br />
par Achille, qui lui <strong>mont</strong>re toute son ia«<br />
dignation <strong>de</strong> ce bruit calomnieux, et toute <strong>la</strong> tendresse<br />
qu'il a pour Iphigénie. La rage d'Ériphile<br />
redouble : instruite bientôt <strong>du</strong> péril <strong>de</strong> sa rivale,<br />
elle ne voit que l'intérêt qu'y prend Achille, et tout<br />
ce qu'il est capable <strong>de</strong> faire pour elle; et dans quel<br />
style elle exhale ses fureurs et sa jalousie 1<br />
M'as-ta pas vu sa gloire et le trouble d'âealllt?<br />
Tm ai va, feu ai fui les signes trop cotâtes.<br />
Ce héros si terrible au reste <strong>de</strong>s humains t<br />
Qui se connaît <strong>de</strong> pleurs que cens qu'il fait répandre,<br />
Qui l'en<strong>du</strong>rcit contre eux dès l'âge le plus tendra,<br />
Et qui 9 si Fon nous fait un fidèle dis<strong>cours</strong>,<br />
Suça même le sang <strong>de</strong>s lions et <strong>de</strong>s ours f<br />
. Pour elle., <strong>de</strong> <strong>la</strong> crainte a fait l'apprentissage :<br />
Elle Fa TU pleurer et changer <strong>de</strong> ¥isag@.<br />
Et tu <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ins, Doris ! Par combien <strong>de</strong> malheurs<br />
Me lui ?oudrais-je point disputer <strong>de</strong> tels peurs !<br />
Quand je <strong>de</strong>vrais comme elle expirer dans use heure...<br />
Mais que di*je, expirer ! ne crois pas qu'elle meure,<br />
Dans un lâche sommeil, croîs-<strong>la</strong> qu'enseveli s<br />
àcMiie aura pour elle Impunément pâli?<br />
Achille i son malheur saura bien mettre obstacle.<br />
Tu verras que les dieux n'ont dicté cet oracle<br />
Que pour croître à <strong>la</strong> fols sa gloire et mon tourment t<br />
Et <strong>la</strong> rendre plus beUe aux yeux <strong>de</strong> son amant<br />
Hon, te dis-Je, les dieux Font en vain condamnée,<br />
le suis 9 et Je serai <strong>la</strong> seule infortunée.<br />
Elle est tentée dès m moment <strong>de</strong> divulguer l'oracle<br />
<strong>de</strong> Calehas eontr* Iphigénie, qui n'est pas