la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal
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êm<br />
Molière. LuMi eut le bonheur <strong>de</strong> s'associer avfs<br />
Quinault; et cette association It bientôt <strong>la</strong> fortune<br />
<strong>du</strong> musicien Y et <strong>la</strong> gloire <strong>du</strong> poète après sa mort.<br />
Remarquons, en passant, qu'un <strong>de</strong>s grands obstacles<br />
qui's'opposèrent d'abord à ce nouvel établissement<br />
ne fut pas seulement l'ennui qu'on avait<br />
éprouvé à Topera italien, mais <strong>la</strong> persuasion générale<br />
que jptre <strong>la</strong>ngue n'était pas faite pour <strong>la</strong> musique.<br />
On -voit que ce n'était pas une chose nouvelle, que<br />
le paradoie qui il tant <strong>de</strong> bruit il y a trente ans,<br />
quand Rousseau nous dit : Les Français n'mtrwd<br />
jamais <strong>de</strong> mmîqm; et s'ils m md une, ce sera<br />
tmmi pk pow eux. Son grand argument était que<br />
<strong>la</strong> prosodie <strong>de</strong> notre <strong>la</strong>ngue est moins musicale que<br />
celle <strong>de</strong>s Italiens : c'est comme si l'on disait que<br />
les Français n'auront jamais <strong>de</strong> poésie, parce que<br />
leur <strong>la</strong>ngue est moins harmonieuse et moins maniable<br />
que celle <strong>de</strong>s Grecs et'<strong>de</strong>s Latins. Mais ce qu'on<br />
ne peut dissimuler, c'est que ce fut un étranger qui<br />
nous II croire pendant longtemps que nous avions<br />
<strong>de</strong> <strong>la</strong> musique à l'opéra français; et qu'à ce même<br />
opéra, ce sont encore <strong>de</strong>s étrangers qui nous ont<br />
enfin apporté <strong>la</strong> bonne musique.<br />
• Avant <strong>de</strong> parler <strong>de</strong> Quinault et <strong>de</strong> ceux qui font<br />
suivi 9 je crois <strong>de</strong>voir commencer par quelques no<br />
tions générales sur ce genre <strong>de</strong> drame, dont il a<br />
été prmi nous le véritable créateur.<br />
Quoique l'on ait comparé notre opéra à <strong>la</strong> tragédie<br />
grecque, et qu'il y ait effectivement entre eui<br />
ce rapport générique, que l'un et l'autre est un drame<br />
chanté, cependant il y a d'ailleurs bien <strong>de</strong>s différences<br />
essentielles. La première et <strong>la</strong> plus considérable,<br />
c'est que <strong>la</strong> musique, sur le théâtre <strong>de</strong>s Grecs, n'était<br />
évi<strong>de</strong>mment qu'accessoire, et que, sur celui <strong>de</strong><br />
l'opéra français, elle est nécessairement le principe<br />
surtout en y joignant <strong>la</strong> danse, qu'elle mène<br />
à sa suite, comme étant <strong>de</strong> son domaine. L'ancienne<br />
mélopée, qui ne gênait en rien le dialogue tragique,<br />
•t qui se prétait aux développements les plus éten<strong>du</strong>s<br />
, au raisonnement, à <strong>la</strong> discussion, à <strong>la</strong> longueur<br />
<strong>de</strong>s récita f aux détails <strong>de</strong> <strong>la</strong> narration, régnait d'un<br />
bout à l'autre <strong>de</strong> <strong>la</strong> pièce, et n'était interrompue<br />
que dans les entr'actes, lorsque le chant <strong>du</strong> chœur,<br />
différent daeelui <strong>de</strong> <strong>la</strong> scène, était accompagné d'une<br />
marche ca<strong>de</strong>ncée et religieuse, faite pour imiter<br />
celle qu'on avait coutume d'exécuter autour <strong>de</strong>s au*<br />
tels, et qu'on appe<strong>la</strong>it suivant les diverses positions<br />
<strong>de</strong>tlgurants, <strong>la</strong> stropne, Fantistrophe, l'épo<strong>de</strong>, etc.<br />
Ces mouvements réguliers étaient constamment les<br />
mimes ; et, lorsque le chœur se mê<strong>la</strong>it au dialogue,<br />
il n'employait que <strong>la</strong> déc<strong>la</strong>mation notée pour <strong>la</strong><br />
scène. Il y a loin <strong>de</strong> cette uniformité <strong>de</strong> procédés<br />
à <strong>la</strong> variété qui caractérise notre opéra, aux choeurs<br />
CODES BB JUTEIBATUBB.<br />
.<strong>de</strong> toute espèce, mis en action <strong>de</strong> toutes les manié*<br />
res, et changés souvent d'acte en acte, tandis que<br />
celui <strong>de</strong>s anciens n'était qu'un personnage toujours<br />
le même, toujours passif et moral; à <strong>la</strong> musique<br />
plus ou moins bril<strong>la</strong>nte <strong>de</strong> nos <strong>du</strong>os, inconnus dans<br />
les pièces grecques ; à nos fêtes, aux ballets formant<br />
une espèce <strong>de</strong> scènes à part, liées seulement au sujet<br />
par un raport quelconque ; enfin à ce merveilleux <strong>de</strong><br />
nos métamorphoses, dont il n 9 y a nulle trace dans<br />
les tragiques grecs. Je ne parle pas <strong>de</strong>s airs d'expression,<br />
qui sont aujourd'hui l'un! <strong>de</strong>s plus gran<strong>de</strong>s<br />
beautés <strong>de</strong> notre opéra : c'est une richesse nouvelle<br />
que LuIIî ne connaissait pas, puisqu'il ne <strong>de</strong>mandait<br />
point <strong>de</strong> ces airs à Quinault ; mais tous ces accessoires<br />
que je viens <strong>de</strong> détailler étaient absolument étrangers<br />
à <strong>la</strong> tragédie greoqtA, et sont <strong>la</strong> substance île<br />
notre opéra. La raison <strong>de</strong> cette diversité se retrouve<br />
'dans le fait que j'ai d'abord établi, que <strong>la</strong> musique<br />
n'était qu'un ornement <strong>du</strong> seul spectacle dramatique<br />
qu'ait eu <strong>la</strong> Grèce et qu'elle est <strong>de</strong>venue le fond <strong>du</strong><br />
nouveau spectacle, ajouté, sous le nom d'opéra, à<br />
celui que nous offrait le théâtre français.<br />
De cette différence <strong>de</strong> principe a dû naître celle <strong>de</strong>s<br />
effets. Les Grecs s se bornant à noter <strong>la</strong> parole » ont<br />
eu <strong>la</strong> véritable tragédie chantée, et, en <strong>la</strong> déc<strong>la</strong>mant<br />
en mesure, lui ont <strong>la</strong>issé d'ailleurs tout ce qui lui<br />
appartient, n'ont restreint ni l'éten<strong>du</strong>e <strong>de</strong> ses attributs,<br />
ni <strong>la</strong> liberté <strong>du</strong> poète. Au contraire, l'opéra,<br />
quoique nous Tappellions tragédie lyrique, est tellement<br />
un genre particulier, très-distinct <strong>de</strong> <strong>la</strong> tragédie<br />
chantée, que, lorsqu'on a imaginé <strong>de</strong> transporter<br />
sur le théâtre <strong>de</strong> l'opéra les ouvrages <strong>de</strong> nos tragiques<br />
français, il a fallu commencer par les dénaturer<br />
au point <strong>de</strong> les rendre méconnaissables; en conservant<br />
le siyet, il a fallu une autre marche, un autre<br />
dialogue, une autre forme <strong>de</strong> versification. Mous<br />
n'avons certainement point <strong>de</strong> compositeur qui<br />
volftt se charger <strong>de</strong> mettre en musique IpMgémm<br />
et Phèdre, telles que Racine les a faites ; et les musiciens<br />
d'Athènes prirent <strong>la</strong> Pkêdre et Vlphêgémie<br />
<strong>de</strong>s mains d'Euripi<strong>de</strong>, telles qu'il lui avait plu <strong>de</strong><br />
les faire.'<br />
Lorsque, arrivé à l'époque <strong>de</strong> dix-huitième siècle v<br />
je rencontrerai sur mon passage <strong>la</strong> révolution pro<strong>du</strong>ite<br />
sur le théâtre <strong>de</strong> Fopéra par celle que <strong>la</strong> musique<br />
a tout récemment éprouvée, il sera tempe<br />
alors d'examiner s'il y a quelque fon<strong>de</strong>ment à cette<br />
prétention nouvelle <strong>de</strong> foire <strong>de</strong> Fopéra une vraie<br />
tragédie: Je m'efforce, autant que je le puis, cfe<br />
n'anticiper sur aucun <strong>de</strong>s objets que j'ai à traiter.<br />
Je ne me détourne point <strong>de</strong> ma route pour courir<br />
après Terreur : c'est bien assea <strong>de</strong> <strong>la</strong> combattre<br />
quand on <strong>la</strong> trouve sur son chemin*