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la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal

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36<br />

COURS DE LITTÉRATURE.<br />

wi» <strong>de</strong>viendraient maHunreoi ; €«r ce<strong>la</strong> m serait ta tonebant<br />

ni terrible 9 ouïs odieux (ui). »<br />

Je crois que cette règle est démentie par beaucoup<br />

d'exemples. Hippolyte est vertueux, et cependant<br />

sa mort eieite <strong>la</strong> pitié et ne ré?olte point. Britanmims<br />

est dans te même cas". On m pourrait citer<br />

plusieurs autres. Maia.ee qui suit ne saurait se eontester<br />

:<br />

« Des personnages méchants qui <strong>de</strong>viennent heureux<br />

sont ce qu'il y a <strong>de</strong> moins tragique, (ièid. ) »<br />

C'est us <strong>de</strong>s grands défauts à'Jtrée, Où ce monstre,<br />

à <strong>la</strong> lin <strong>de</strong> <strong>la</strong> pièce, insulte, avec une joie barbare,<br />

à l'horrible situation où il a mis le malheureux<br />

Thyeste, et luit par ce vers :<br />

Et Je Jouis enfin <strong>du</strong> fruit <strong>de</strong> mes forfaits.<br />

Jamais les îiommes n'aimeront à remporter d'un<br />

spectacle une pareille impression. 11 est vrai que<br />

dans Mahomet le crime triomphe; mais <strong>du</strong> moins<br />

ce scélérat est-il puni en perdant ce qu'il aime; il a<br />

<strong>de</strong>s regrets et <strong>de</strong>s remords : et cependant, malgré<br />

tout Fart <strong>de</strong> Fauteur, on sent le vice <strong>de</strong> ce dénuement,<br />

et c'est <strong>la</strong> seule tache <strong>de</strong> ce grand ouvrage.<br />

« Si us homme très-méchant, d'heureux défient malheureux<br />

f il peut y avoir un exemple f mais il n'y a ni pitié<br />

ni terreur ; car <strong>la</strong> pitié naît <strong>du</strong> malheur qui n'est pas mérité,<br />

et <strong>la</strong> terreur <strong>du</strong> malheur voisin <strong>de</strong> nous ; et tel n f est pas<br />

pour sous celui <strong>du</strong> méchant. (Ièid.) »<br />

Cette remarque très-juste n'empêche pas qu'il ne<br />

soit très-bon <strong>de</strong> punir le méchant dans un drame;<br />

mais Arlstote veut dire seulement que ce n'est pas là<br />

ce qui pro<strong>du</strong>it <strong>la</strong> terreur et <strong>la</strong> pitié, et qu'il faut les<br />

tirer d'ailleurs. 11 a raison; car lorsque le méchant,<br />

l'oppresseur, le tyran, sont punis sur <strong>la</strong> scène, ce<br />

s'est pas leur châtiment qui pro<strong>du</strong>it <strong>la</strong> teneur ou <strong>la</strong><br />

pitié : l'une et l'autre sont te résultat <strong>du</strong> danger ou<br />

iu malheur où sont les personnages à qui l'on s'intéresse;<br />

et comme <strong>la</strong> punition <strong>du</strong> méchant les tire<br />

<strong>de</strong> ce malheur ou <strong>de</strong> ce danger, c'est là ce qui pro<strong>du</strong>it<br />

l'effet dramatique. Ainsi, dans cette Ipâigénie<br />

dont uous parlions tout à Fheur®, que Thoas soit<br />

égorgé par Py<strong>la</strong><strong>de</strong>, qui vient on ne sait d'où, m<br />

n'est pas ce qui rend le déooûmeut tragique; mais<br />

cette mort délivre Oreste et Ipftûgénie, qui étaient<br />

les objets <strong>de</strong> l'intérêt, et le speetateur est content.<br />

Ainsi dans Rmêogwœ} le moment <strong>de</strong> <strong>la</strong> terreur et<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> pitié n ? est point celui où Cléopâtre boit ellemême<br />

le poison qu'elle a préparé pour son fils, c'est<br />

le moment où ce ils, dans <strong>la</strong> situation <strong>la</strong> plus affreuse<br />

où un homme puisse se trouver, entre une mère et<br />

une amante qu'il peut soupçonner également, porte<br />

à ses lèvres <strong>la</strong> coupe empoisonnée; c'est cet instant<br />

qui fatt frémir, qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> et obtient grâce pour<br />

toutes les invraisemb<strong>la</strong>nces qui précè<strong>de</strong>nt.<br />

« n y a un rollea à prendre ; c'est que Se personnage ne<br />

§®lt ni absolument bon ni absolument méchant, et qu'il<br />

tombe dans le malheur, non par un crime ou une méchanceté<br />

noire , mais par quelque faste eu erreur humaine qui<br />

le précipite <strong>du</strong> faite <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>urs et <strong>de</strong> <strong>la</strong> prospérité.<br />

11 faut toujours se soutenir qu'Aristote ne par<strong>la</strong>it<br />

que <strong>de</strong>s personnages qui doivent pro<strong>du</strong>ire l'intérêt;<br />

et ce qu'il dit ici <strong>de</strong> cette sorte <strong>de</strong> caractères que<br />

Corneille, dans ses dissertations, appelle wdxim,<br />

a para à ce grand homme un trait <strong>de</strong> lumière qui<br />

jette un grand jour sur <strong>la</strong> connaissance <strong>du</strong> théâtre,<br />

et en général <strong>de</strong> toute gran<strong>de</strong> poésie îmitatire. En<br />

effet, on a observé que rien n'était plus intéressant<br />

que ce mé<strong>la</strong>nge, si naturel- au coeur humain. C'est<br />

sous ce point <strong>de</strong> vue que le caractère d'Achille paraît<br />

si dramatique dans i'Ma<strong>de</strong> , et que Phèdre ne l'est<br />

pas moins au théâtre par ses passions et pr ses<br />

remords. Rien ne fait mieux voir combien se trompent<br />

et combien sont injustes tous ceui qui se sont<br />

fait, pour ainsi dire, un point <strong>de</strong> morale <strong>de</strong> ne s'intéresser<br />

au théâtre qu'à <strong>de</strong>s personnages irréprochables<br />

, et qui jugent use tragédie sur les principes<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> société. Qu'un personnage passionné fasse une<br />

belle action par <strong>de</strong>s motifs qui tiennent à sa passion<br />

même, ce<strong>la</strong> serait plus beau, disent-ils, si Faction<br />

était faite par <strong>de</strong>s motifs purs. C'est une gran<strong>de</strong><br />

erreur; ce<strong>la</strong> serait plus beau en morale, mais fort<br />

mauvais au théâtre. Vois n'éprouveriez qu'une admiration<br />

froi<strong>de</strong>, au lieu que le personnage mû par<br />

<strong>la</strong> passion, même dans ce qu'il fait <strong>de</strong> louable, vous<br />

émeut et vous entraîne.<br />

A toutes ces sources <strong>du</strong> pathétique il en faut joindre<br />

une, <strong>la</strong> plus abondante <strong>de</strong> toutes, et dont Arlstote<br />

ne parle pas, parce que les Grecs n'y ont puisé<br />

qu'une fois; c'est l'amour malheureux; c'est cette<br />

passion dont les mo<strong>de</strong>rnes ont tiré un si grand<br />

parti, et dont les anciens n'ont point fait usage dans<br />

<strong>la</strong> tragédie, si l'on excepte le rêie <strong>de</strong> Phèdre, dont<br />

l'aventure était célèbre dans <strong>la</strong> Grèce, et qui, même<br />

dans Euripi<strong>de</strong>, n'est pas, à beaucoup près, aussi<br />

intéressante que dans Racine. Cette seule différence<br />

entre le théâtre <strong>de</strong>s Grecs et le nêtre, dont Fun a<br />

employé l'amour comme ressort tragique, et dont<br />

l'autre Fa négligé, suffirait pour rendre Fart beaucoup<br />

plus riche et plus éten<strong>du</strong> pour nous qu'il ne<br />

pouvait l'être chez eux. Quel trésor pour le théâtre,<br />

qu'une passion à qui nous <strong>de</strong>vons Zaïre, Tanerè<strong>de</strong>,<br />

Inès, Ariane, et quelques autres encore consacrées<br />

par ce mérite particulier qui en supplée tant d'autres,<br />

et fait pardonner tant <strong>de</strong> fautes, le mérite <strong>de</strong><br />

faire répandre <strong>de</strong>s <strong>la</strong>rmes!<br />

Pour ce qui est <strong>du</strong> dénouaient, Aristote préfère<br />

les pièces dont fo péripétie, dit-il, se fait <strong>du</strong> ton*

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