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la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal

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C0U1S DE L1TTÉMTUÉE.<br />

460<br />

réponil à oe qui eft dénimiiaMe, on est forcé <strong>de</strong><br />

redire ce qui est connu.<br />

Les" ligures par elles-mêmes se sont point une<br />

beauté : c'est tout ce qu'il y a <strong>de</strong> plus facile et <strong>de</strong> plus<br />

commua. Le <strong>la</strong>ngage <strong>du</strong> bas peuple m est rempli;<br />

et Botleau disait qu'on entepdrait aux balles plus <strong>de</strong><br />

métaphores en on jour qu'il n'y en a dans toute i'Énêt<strong>de</strong>.<br />

La beauté consiste donc dans l'usage et le<br />

eboiï <strong>de</strong>s figures. Es effet, quel es est l'objet, que<br />

¥«ut-0E faire quand on passe <strong>du</strong> propre au figuré?<br />

rendre son idée plus sensible et plus frappante. Eh<br />

bien! si l'image est fausse f si <strong>la</strong> métaphore est forcée,<br />

si elle est outrée, l'idée, le sentiment que vous<br />

fouliez exprimer, n'y per<strong>de</strong>nt-ils pas au lieu d*y gagner?<br />

Yous faites donc tout le contraire <strong>de</strong> ce que<br />

vous vouliez faire? Est-ce .là <strong>de</strong> <strong>la</strong> force ou <strong>de</strong> <strong>la</strong> faiblesse?<br />

Vous foules me peindreuneflotte nombreuse<br />

qui vogueàpleines voiles. Vous cherchez une image ;<br />

fort bien. Yous me dites que jamais pius beiks fo­<br />

le Montrât 1« pranter anx peuples <strong>la</strong> Unique<br />

L'appareil, Inouï pour cas mortels nouveaux 9<br />

De nos châteaux allés qui vo<strong>la</strong>ient sur les eaux.<br />

Rien n'est plus bril<strong>la</strong>nt que cette métaphore, ni es<br />

même temps plus naturel, par <strong>la</strong> manière dout elle<br />

est p<strong>la</strong>cée. Car supposons qu'Alvarès, n'ayant point<br />

à prier <strong>de</strong>s Mexicains ni <strong>de</strong> l'effet que pro<strong>du</strong>isit sur<br />

eui <strong>la</strong> première vue <strong>de</strong>s vaisseaux européens, eût<br />

dit, en par<strong>la</strong>nt <strong>du</strong> départ <strong>de</strong> <strong>la</strong> flotte espagnole pour<br />

toute autre expédition,<br />

Et nos châteaux ailés volerait sur Ici eaux 9<br />

il eût <strong>la</strong>it <strong>de</strong> <strong>la</strong> poésie très-mal à propos, il eût abusé<br />

<strong>de</strong>s figures ; car ce n'est pas à lui à voir dans <strong>de</strong>s<br />

vaisseaux <strong>de</strong>s châteaux ailés* Mais le cas est bien<br />

différent. lia <strong>mont</strong>ré kpremier à <strong>de</strong>s peuples nouveaux<br />

un appâté! inouï pour eux.,.. Yoilà l'imagination<br />

préparée. En prose , il aurait achevé ainsi ,<br />

<strong>de</strong> nos vaisseaux qui kmr semb<strong>la</strong>ient <strong>de</strong>s châteaux<br />

aies; mais c'eût été trop <strong>la</strong>nguissant en fera. Tout<br />

rêts m'ont volé dons Vair. Ooyes-vous avoir présenté<br />

à mon imagination un tableau fidèle? Yous ne<br />

m'avez offert qu'une chimère et une image fausse.<br />

Hé dirait-on pas d ? abord que les forêts ont coutume<br />

<strong>de</strong> voler dam tairt Quand même les forêts voleraient<br />

dans l'air, elles ne ressembleraient point à<br />

une gran<strong>de</strong> lotte. On a dit, même en prose, une<br />

forée <strong>de</strong> mâts, et <strong>la</strong> métaphore est juste : elle ne<br />

<strong>mont</strong>re que les arbres <strong>de</strong>s forêts taillés en mâts, et<br />

j'en saisis sur-le-champ le rapport. On dirait <strong>de</strong> même,<br />

d'une flotte en mer, qu'on croit Yôir une forêt moupunie,<br />

parce que le mouvement d'une multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

mâts peut ressembler en quelque sorte à celui <strong>de</strong>s<br />

arbres agités par le vent. Ainsi Rousseau a dit dans<br />

une <strong>de</strong> ses o<strong>de</strong>s :<br />

A Fsapeef <strong>de</strong>s vaisseaux qm vomit te Bosphore,<br />

Sous an nouveau Xerxès, Téthys croit voir mmm<br />

An travers <strong>de</strong> sas flots promt aer les forêts.<br />

Observons- ici Fart <strong>de</strong> rendre vraisemb<strong>la</strong>bles et<br />

naturelles les figures les plus Jiardies. Certainement<br />

les forêts ne m promènent pas plus qu'elles ne volent<br />

; mais voyez comment le poète nous con<strong>du</strong>it par<br />

<strong>de</strong>grés jusqu'à l'idée qu'il veut offrir. C'est d'abord<br />

Téthys qui eroMvoir; ce n'est pas une réalité; c'est<br />

mm travers <strong>de</strong> ses flots : voilà l'imagination liée;<br />

il ne reste plus qu'à pouvoir prendre les mâts pour<br />

<strong>de</strong>s forêts mouvantes, et nous avons vu que cette<br />

' figure ne répugnait pas. Mais quand fous dites,<br />

jamais plus beUes forées ne votèrent par les sirs,<br />

¥@us entassez trois ou quatre figures les unes sur<br />

les autres, dont pas une ne me rappelle <strong>de</strong>s faisseaux;<br />

et ce n'est plus une image, mais une énigme.<br />

Yoltairea dans sa tragédie é % ce qui précè<strong>de</strong> rend le sens suffisamment c<strong>la</strong>ir. Il a<br />

re<strong>cours</strong> à <strong>la</strong> figure rapi<strong>de</strong> <strong>de</strong> l'ellipse : il s'exprime<br />

comme si c'était pour lui-même que ces navires fessent<br />

<strong>de</strong>s châteaux aHés, parée qu'on ne peut pas s'y<br />

méprendre ; et, conservant <strong>la</strong> marche poétique sans<br />

blesser <strong>la</strong> vraisemb<strong>la</strong>nce, il peut dire :<br />

L'appareil, inouï pour ces mortels nouveaux.<br />

De nos châteaux allés fol vo<strong>la</strong>ient sur les eaux.<br />

Et cette ellipsef qu'on entend très-bien, est tue<br />

nouvelle beauté et une finesse <strong>de</strong> l'art. Remarquons<br />

encore <strong>la</strong> filiation <strong>de</strong>s idées, si essentielle au style.<br />

S'il eût donné au mot <strong>de</strong> châteaux toute autre épitbèteque<br />

celle d'ailés, le vers perdrait beaucoup.<br />

Mais ailés amène naturellement qui vo<strong>la</strong>ient sur<br />

tes eaux y et c'est ainsi qu'on est tout à <strong>la</strong> fois naturel<br />

pour contenter <strong>la</strong> raison 9 et hardi pour satisfaire<br />

<strong>la</strong> poésie.<br />

Je me suis un peu éten<strong>du</strong> sur cet article pour faire<br />

bien sentir que l'effet <strong>de</strong>s ligures dépend toujours<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> vérité <strong>de</strong>s rapports physiques ou moraux et <strong>de</strong><br />

<strong>la</strong> liaison <strong>de</strong>s idées. On peut juger combien il faut<br />

<strong>de</strong> talent pour y réussir. Aussi les figures, bien employées,<br />

sont une <strong>de</strong>s parties principales <strong>du</strong> grand<br />

écrivain; mais les employer mal, est à <strong>la</strong> portée <strong>de</strong><br />

tout le mon<strong>de</strong>. En voilà beaucoup à propos d'une<br />

métaphore; mais on connaît le mot <strong>de</strong> Marcel :<br />

Que <strong>de</strong> choses dans un menuet! Et en passant <strong>du</strong><br />

petit au grand ( car il faut bien soutenir notre dignité),<br />

on nous permettra <strong>de</strong> dire : Que <strong>de</strong> choses<br />

dans un beau vers!<br />

Mais ce n'est pas assez que les figures soient parfaitement<br />

justes, il faut encore qu'elles soient adaptées<br />

à <strong>la</strong> nature <strong>du</strong> sujet. Ce vers <strong>du</strong> Saint-Louis<br />

JMre$ a dit en très- que j'ai cité tout à l'heure,<br />

Jbeaui ?ers :<br />

L'or <strong>de</strong> son pavillon Jouait avec te veut,

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