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la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal

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TC<br />

toutes les démarches furent alors autant <strong>de</strong> fastes.<br />

Ce sénat consentait à f<strong>la</strong>tter l'orgueil <strong>de</strong> Pompée,<br />

qui vou<strong>la</strong>it être le premier <strong>de</strong> l'État, et condamnait<br />

en même temps <strong>la</strong> fierté <strong>de</strong> César, qui refusait<br />

d'être le second. La situation entre ces <strong>de</strong>ux hommes<br />

puissants était sans doute délicate; maïs s'il y avait<br />

un parti sage, c'était, ce me semble, <strong>de</strong> tenir <strong>la</strong><br />

ba<strong>la</strong>nce entre eus, afin <strong>de</strong> les contenir l'un par l'autre<br />

: <strong>la</strong> faire pencher absolument d'un côté, c'était<br />

rendre <strong>la</strong> rupture inévitable, et nécessiter une guerre<br />

qui <strong>de</strong>vait finir, comme Cicéron lui-même l'avoue<br />

dans ses lettres, par donner un maître à Rome.<br />

Quand on considère les motifs <strong>de</strong> <strong>la</strong> con<strong>du</strong>ite <strong>de</strong>s<br />

sénateurs, on n'y trouve pas plus <strong>de</strong> justice que <strong>de</strong><br />

pru<strong>de</strong>nce. La préférence qu'ils donnaient à Pompée<br />

n'avait pour fon<strong>de</strong>ment que leur aversion patricienne<br />

pour un chef <strong>du</strong> parti <strong>du</strong> peuple; et l'animosité <strong>de</strong>s<br />

anciennes querelles <strong>de</strong> Marins et <strong>de</strong> Syl<strong>la</strong> subsistait<br />

dans ce corps qui, après <strong>de</strong> si terribles exemples,<br />

aurait dû ne chérir que <strong>la</strong> liberté et ne haïr que <strong>la</strong><br />

tyrannie. Au contraire, ils abandonnaient à Pompée<br />

un pouvoir illégal et excessif, parce qu'il était le<br />

chef <strong>du</strong> parti <strong>de</strong>s grands, et prince <strong>du</strong> sénat. César,<br />

t qui croyait valoir au moins Pompée, ne vou<strong>la</strong>it pas<br />

souffrir qu'il y eût dans Rome un citoyen assez<br />

puissant pour opprimer Rome et César. Toutes les<br />

propositions qu'il fit étant encore à <strong>la</strong> tête <strong>de</strong> ses<br />

légiqns, et avant <strong>de</strong> passer le Rubicon, avaient un<br />

motif très-p<strong>la</strong>usible : c'était d'établir l'égalité, et<br />

<strong>de</strong> le mettre en sûreté contre ses ennemis. Je crois<br />

Men qu'il ne faisait ces propositions qu'avec <strong>la</strong> certitu<strong>de</strong><br />

d'être refusé, et qu'au fond il vou<strong>la</strong>it régner.<br />

Mais ses ^ennemis firent tout ce qu'il fal<strong>la</strong>it pour<br />

lui fournir le prétexte toujours imposant <strong>de</strong> <strong>la</strong> défense<br />

naturelle. Il offrait <strong>de</strong> poser les armes, pourvu<br />

qu'on lui accordât le consu<strong>la</strong>t et le triomphe. Il<br />

avait mérité tous les <strong>de</strong>ux, et avait besoin <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

puissance consu<strong>la</strong>ire pour faire tête à ceux qui vou<strong>la</strong>ient<br />

le perdre. Pompée, accoutumé <strong>de</strong>puis dix<br />

ans à régner paisiblement dans Rome, pendant<br />

que César conquérait les Gaules, ne put soutenir<br />

l'idée d'y voir rentrer César triomphant, revêtu<br />

<strong>de</strong> tout l'éc<strong>la</strong>t et armé <strong>de</strong> tout le crédit que dé<strong>la</strong>ient<br />

lui donner dix années <strong>de</strong> victoires,tses talents<br />

et sa renommée. Le sénat accoutumé à <strong>la</strong> domination<br />

tranquille <strong>de</strong> Pompée, qu'il regardait comme<br />

<strong>la</strong> sienne, ne vit l'approche <strong>de</strong> César qu'avec effroi.<br />

On lui refusa tout ce qu'il <strong>de</strong>mandait légalement,"<br />

en même temps qu'on mettait entre les mains <strong>de</strong><br />

Pompée <strong>de</strong>s comman<strong>de</strong>ments et <strong>de</strong>s forces extraordinaires.<br />

Il semb<strong>la</strong>it qu'on rie voulût tout prodiguer<br />

à l'un que pour accabler l'autre, et, ce qui paraîtrait<br />

inconcevable si l'on ne voyait <strong>de</strong> pareilles ineon-<br />

C0URS DE LITTÉRATURE.<br />

séquences dans l'histoire <strong>de</strong> tous les gouvernements<br />

on poussait à bout un homme dont on croyait avoir<br />

tout à craindre, sans prendre aucune mesure pour<br />

le repousser et le combattre. César, qui se sentait<br />

en état <strong>de</strong> se faire justice, n'eut pas, il est vrai, <strong>la</strong><br />

dangereuse magnanimité <strong>de</strong> se remettre entre les<br />

mains <strong>de</strong> ses ennemis. Il osa tout ce qu'il pouvait<br />

et l'on sait quelle en fet <strong>la</strong> suite. Il parait que <strong>la</strong><br />

supériorité constante qu'il porta dans toute cette<br />

guerre jusqu'à <strong>la</strong> journée <strong>de</strong> Pharsaie fut surtout<br />

celle <strong>de</strong> son caractère : c'est par là qu'il l'emportait<br />

sur Pompée, encore plus peut-être que par les<br />

talents militaires; car, <strong>de</strong> ce côté, il se peut bien<br />

qu'en ne jugeant que par l'événement, on ait trop<br />

rabaissé le vaincu <strong>de</strong>vant le vainqueur. Sa fuite<br />

précipitée <strong>de</strong> l'Italie en Épire <strong>mont</strong>re en effet qu'il<br />

n'avait rien préparé pour soutenir <strong>la</strong> guerre en Italie;<br />

mais en <strong>la</strong> transportant es Grèce, il fit voir<br />

bientôt qu'il avait pris le seul parti convenable, et<br />

qu'il connaissait toutes ses resources. Il s'en procura<br />

d'immenses, une puissante armée, une flotte<br />

nombreuse, <strong>de</strong>s vivres en abondance, tout le pays à<br />

ses ordres; et le p<strong>la</strong>n <strong>de</strong> campagite qu'il adopta en<br />

conséquence <strong>de</strong> ces avantages lui a fait honneur<br />

auprès <strong>de</strong>s juges <strong>de</strong> l'art. 11 sentit <strong>la</strong> supériorité<br />

que <strong>de</strong>vaient avoir en p<strong>la</strong>ine les vieilles'ban<strong>de</strong>s <strong>de</strong><br />

César, qui, après les dix années <strong>de</strong> <strong>la</strong> guerre <strong>de</strong>a<br />

Gaules, <strong>de</strong>vaient nécessairement l'emporter par les<br />

manœuvres, l'expérience, et <strong>la</strong> fermeté dans Tactlon.<br />

Il résolut donc d'éviter les batailles, <strong>de</strong> fatiguer<br />

et d'affamer son ennemi. César ne commît<br />

qu'une faute (eh ! qui n'en commet pas?); II étendit<br />

trop Mes lignes à Durazzo; Pompée sut en profiter;<br />

il força ces lignes, et l'attaqua avec tant d'avantage,<br />

que <strong>la</strong> tête tourna entièrement à ces fameux<br />

vétérans <strong>de</strong> César (tant .<strong>la</strong> position fait tout!), et<br />

que, pour <strong>la</strong> première fois, ils prirent <strong>la</strong> fuite avec<br />

<strong>la</strong> <strong>de</strong>rnière épouvante. Tous les historiens conviennent,<br />

et César lui-même, suivant le récit d'Asinius<br />

Pollion, avoua qu'il était per<strong>du</strong> si Pompée avait<br />

poussé sa victoire ce jour-là, et attaqué sur-lechamp<br />

le reste <strong>de</strong> l'armée retirée dans ses retranchements.<br />

Mais 1'aetivité et l'audace ne sont pas<br />

ordinairement les qualités d'un vieux général. Pompée<br />

ne fit pas tout ce qu'il pouvait faire ; et, ce qui<br />

est bien remarquable., ce fut précisément cette victoire<br />

<strong>de</strong> Duras» qui le-fit battre à Pbareale. Elle<br />

inspira une confiance follement présomptueuse à<br />

tous les chefs <strong>de</strong> l'armée et <strong>du</strong> conseil <strong>de</strong> Pompée.<br />

Us se regardèrent dès lors comme triomphants. Las<br />

d'une guerre qui les éloignait trop longtemps <strong>de</strong>s<br />

délices <strong>de</strong> Rome, ils accusèrent le général <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

prolonger pour ses propres Intérêts. Il n'eut pas <strong>la</strong>

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