23.02.2013 Views

la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal

la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal

la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

C0U1S Dl LITTÉIATUIE.<br />

240<br />

subtilité <strong>de</strong><strong>la</strong>d<strong>la</strong>lâstlqQe. Ses fréquentes leçons formerait<br />

beaucoup <strong>de</strong> savants hommes, et c'est alors que <strong>la</strong> morale<br />

commença à faire partie <strong>de</strong> <strong>la</strong> philosophie, qui jusque-là ne<br />

s 1 était occupée que <strong>de</strong>s sciences phjsiques,<br />

« Tous ceui dont je viens <strong>de</strong> parler étalent déjà sur leur<br />

déclin, lorsque parut Isocrâte, dont <strong>la</strong> Biaises <strong>de</strong>vint<br />

l'école<strong>de</strong> <strong>la</strong> Grèce; grand orateur, maître parfait, et qui9<br />

sans briller dans les tribunaui , sans sortir <strong>de</strong> chex lui,<br />

parvint à un <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> célébrité où, dans le même genre»<br />

aal ne s'est élevé <strong>de</strong>puis. Il écrivit bien, et apprit aux<br />

autres à bien écrire. 11 connut mieux que tes prédécesseiirs<br />

l'art oratoire dans toutes ses parties , mais surtout il Ait le<br />

premier à comprendre que, si <strong>la</strong> prose ne doit point avoir<br />

le rliytbme <strong>du</strong> vers 9 elle doit an moins avoir un nombre et<br />

nue harmonie qui lui soient propres. Avant lui 9 on ne connaissait<br />

aucun art dans f arraageiaeal <strong>de</strong>s mots : quand cet<br />

arrangement était heureux , c'était un effet <strong>du</strong> hasard ; car<br />

<strong>la</strong> nature elle-même nous porte à renfermer notre pensée<br />

dans un certain espace 9 à donner au mots un ordre cou*<br />

lenable, et à tarniaer nos phrases le pins souvent d'une<br />

manière fias ou mojns nombreuse. L'oreille elSe-méme<br />

sent ce qui <strong>la</strong> remplit on ce qui lui manque ; nos phrases<br />

sont coupées par les intervalles <strong>de</strong>là respiration, qui non"<br />

seulement ne doit pas nous manquer, mais qui même ne<br />

peut être gênée sans pro<strong>du</strong>ire un mauvais effet »<br />

Cicéron parle ensuite <strong>de</strong> Lysias, d'Hypéri<strong>de</strong>,<br />

a?EscMas ; et, après leur avoir payé le tribu, d'éloges<br />

qu'ils méritent! il s'exprime ainsi :<br />

« Démosthènes réunit <strong>la</strong> pureté <strong>de</strong> Lysias , l'esprit et <strong>la</strong><br />

Inesse d f Hypéri<strong>de</strong>t <strong>la</strong> douceur et l'éc<strong>la</strong>t d'EscMae; el?<br />

quant aux figures <strong>de</strong> <strong>la</strong> pensée et aux mouvements <strong>du</strong> dis<strong>cours</strong>,<br />

il est au-<strong>de</strong>ssus'<strong>de</strong> tout': en un mot ; on ne peut<br />

rien Imaginer <strong>de</strong> plus divin. » ( Brutm, vuy vin, ix. )<br />

L 9 éloge <strong>de</strong> Bémosthènes revient sans cesse sons<br />

<strong>la</strong> plume <strong>de</strong> Cicéron, comme ce<strong>la</strong>i <strong>de</strong> Racine sons<br />

<strong>la</strong> plume <strong>de</strong> Voltaire. Ainsi chacun d'eux n'a cessé<br />

d'exalter l'homme qu'il <strong>de</strong>vait craindre le plus, et<br />

à qui il ressemb<strong>la</strong>it le moins. Ce doit être sans doute<br />

on <strong>de</strong>s avantages <strong>du</strong> génie <strong>de</strong> sentir plus vivement<br />

que personne le charme <strong>de</strong> <strong>la</strong> perfection 9 parce qu'il<br />

en connaît toute <strong>la</strong> difficulté ; et cet attrait doit contribuer<br />

à le mettre au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> <strong>la</strong> jalousie .naturelle<br />

à <strong>la</strong> rivalité. L'intérêt <strong>de</strong> son p<strong>la</strong>isir l'emporte<br />

alors sur celui <strong>de</strong> -son amour-propre : il jouit trop<br />

pour rien entier; il est trop heureux pour être<br />

injuste.<br />

Il y a malheureusement <strong>de</strong>s exceptions à cette vérité<br />

comme à toute autre : mais je ne m'occupe dans<br />

•ce moment que <strong>de</strong>s exemples d'équité; et celui <strong>de</strong><br />

Cicéron est d'autant plus frappant, <strong>la</strong> justice qu'il<br />

rend à Bémosthènes fait d'autant plus d'honneur<br />

à tous les <strong>de</strong>ux, que les caractères <strong>de</strong> leur éloquence y<br />

eomme je viens <strong>de</strong> le dire, sont absolument différents.<br />

Cicéron est, <strong>de</strong> tous les hommes, celui qui<br />

a porté le plus loin les charmes <strong>du</strong> style et les res-<br />

sourees <strong>du</strong> pathétique, li se comp<strong>la</strong>ît dans sa magniique<br />

abondance, raconte avec tout Part possible,<br />

et pleure avec grâce. C'est pourtant lui qui regar<strong>de</strong><br />

Démosthènes comme le premier <strong>de</strong>s hommes<br />

dans l'éloquence judiciaire et délibérât! ve, parce que<br />

nul ne va plus promptement et plus sûrement à son<br />

but, qui est d'entraîner <strong>la</strong> multitu<strong>de</strong> ou les juges.<br />

C'est Cicéron qui vante <strong>la</strong> supériorité <strong>de</strong> Démos*<br />

thènes, Félévation <strong>de</strong> ses idées et <strong>de</strong> ses sentiments,<br />

<strong>la</strong> dignité <strong>de</strong> son style et <strong>de</strong> son impulsion victorieuse.<br />

Péoeion lui rend le même hommage, le préfère<br />

à Cicéron, que pourtant il aime infiniment :<br />

tant il était <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>de</strong>stinée <strong>de</strong> Bémosthènes <strong>de</strong> sobjuguer<br />

en tout genre et ses juges et ses rivaux.<br />

On sait tous les obstacles qu'il eut à vaincre, et<br />

tous les efforts qu'il it pour corriger, assouplir,<br />

perfectionner son organe, et pour rendre son action<br />

oratoire digne <strong>de</strong> sa composition ; mais peut-être<br />

n'a-t-on pas fait assez d'attention à ce qu'il y avait<br />

<strong>de</strong> grand dans cette singulière idée, d'aller haranguer<br />

sur les bords <strong>de</strong> <strong>la</strong> mer, pour s'exercer à haranguer<br />

ensuite <strong>de</strong>vant le peuple. C'était avoir saisi, m<br />

me semble, sous un point <strong>de</strong> vue bien juste, le rapport<br />

qui se trouve entre ces <strong>de</strong>ux puissances également<br />

tumultueuses et imposantes, les lots <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

mer et les flots d'un peuple assemblé.<br />

Raisonnements et mouvements, voilà toute l'éloquence<br />

<strong>de</strong> Démosthènes. Jamais homme n'a donné<br />

à <strong>la</strong> raison <strong>de</strong>s armes plus pénétrantes, plus inévitables.<br />

La vérité est dans sa main un trait perçant<br />

qu'il manie avec autant d'agllîtéque <strong>de</strong> force, et dont<br />

il redouble sans cesse les atteintes. 11 frappe sans<br />

donner le temps <strong>de</strong> respirer ; il pousse 9 presse, renverse<br />

, et ce n'est pas un <strong>de</strong> ces hommes qui <strong>la</strong>issent<br />

à l'adversaire terrassé le moyen <strong>de</strong> nier sa chute.<br />

Son style est austère et robuste, tel qu'il convient<br />

à une Âme franche et impétueuse. Il s'occupe rarement<br />

à parer sa pensée ; ce soin semble an-<strong>de</strong>ssous<br />

<strong>de</strong> lui : il ne songe qu'à <strong>la</strong> porter tout entière au fond<br />

<strong>de</strong> votre cœur. Nul n'a moins employé les ligures<br />

<strong>de</strong> diction, nul n'a plus néglf gèles ornements ; mais f<br />

dans sa marche rapi<strong>de</strong>, il entraîne l'auditeur où il<br />

veut ; et ce qui le distingue <strong>de</strong> tous les orateurs, c'est<br />

que l'espèce <strong>de</strong> suffrage qu'il arrache est toujours<br />

pour l'objet dont il s'agit, et non pas pour lui. On<br />

dirait d'on autre, Il parle bien ; on dit <strong>de</strong> Démosthènes<br />

? Il a raison.<br />

SECTION ii. — Des diverses parties <strong>de</strong> l'invention oratoire,<br />

etf en particulier, <strong>de</strong> <strong>la</strong> manière <strong>de</strong> raisonner oratoirement<br />

telle que inemployée Démosthènes dans <strong>la</strong> harangue<br />

eaca LA mmmm»<br />

L'invention oratoire consiste dans <strong>la</strong> connaissance<br />

et dans le choix <strong>de</strong>s-moyens <strong>de</strong> persuasion. Ils sont

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!