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la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal

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Ce<strong>la</strong> paraissait plus commo<strong>de</strong> à Montaigne, mais<br />

peu <strong>de</strong> gens ont été <strong>de</strong> son avis et en seront ; et, <strong>de</strong><br />

plus, il m s'agit ici, comme on voit 9 que <strong>de</strong> morale,<br />

et ceci n'a point trait an mérite <strong>de</strong> l'écrivain.<br />

m il paroist en Seneque qu'il preste un peu à te tyrannie<br />

<strong>de</strong>s empereurs <strong>de</strong> son temps; »<br />

( Voilà bien Montaigne an rang <strong>de</strong>s échos <strong>de</strong> Suiteus,<br />

et <strong>de</strong> Dion, et <strong>de</strong> À'fphUin, comme disent les<br />

apologistes, puisque ces échos n'en ont guère dit<br />

davantage.)<br />

« car te tiens pour certain que c'est d'un jugementforcé<br />

qyll con<strong>de</strong>mne Sa cause <strong>de</strong> ces généreux meurtriers <strong>de</strong><br />

César. »<br />

- ( Si Montaigne ne doute pas que le philosophe<br />

Sénèquê n'ait hl^sê forcer son jugement, pourquoi<br />

serait-ce un si grand crime <strong>de</strong> penser qu'il s'est un<br />

peu prêté à <strong>la</strong> tyrannie en bien d'autres occasions ?)<br />

« Plutarque esi Hère par tome. »<br />

( 11 me semble que ce n'est pas là un avantage<br />

médiocre; et, si Plutarque a écrit sous Trajan, il<br />

écrivit aussi sous Domitien. )<br />

« Seneune est plein <strong>de</strong> pometeset saillea; Plutarque 9<br />

éecJmses:»<br />

( Lequel vaut le mieux ? )<br />

« eeJn j là vous esehanffê plus et vous esment ; »<br />

( N'en dép<strong>la</strong>ise à Montaigne, il me semble ici peu<br />

conséquent, à moins qu'il n'ait voulu dire que Sénèquê<br />

échauffait plus <strong>la</strong> tête. )<br />

«cettny ey vous contente ÉâfJtnfsge et vous paye<br />

mieulx; »<br />

( Ceci ennienie ma conjecture, et donne beaucoup<br />

plus à Plutarque qu'à Sénèque, ou je n'entends pas<br />

le français. )<br />

« il nous gui<strong>de</strong>, Fanître sons poulse. »<br />

Es morale, celui qui est capable <strong>de</strong> gui<strong>de</strong>r est le<br />

plus sûr : celui qui pousse peut quelquefois pousser<br />

tout <strong>de</strong> travers.<br />

Conclusion, qu'an dire <strong>de</strong> Montaigne même, qu'on<br />

nous oppose avec un préambule foudroyant, nonseulement<br />

Sénèque n'est pas plus grand moraliste,<br />

plus grave, plus profond, plus utile que Plutarque,<br />

mais même est entaché <strong>de</strong> plus d'un défaut et <strong>de</strong> plus<br />

d'une faiblesse, qui ne sont rien moins que sans<br />

conséquence, tandis que ce même Montaigne ne<br />

fait pas à Plutarque le moindre reproche; et, s'il<br />

fal<strong>la</strong>it choisir d'après ce parallèle, qui est-ce qui<br />

vertus. Os disait <strong>de</strong> Ini : « 11 détruit <strong>la</strong> dévolu par ses pa.<br />

« roks, mais 11 les «mitent par ses exemples. *» On pourrait<br />

répondre qu'un philosophe qui déimii ies <strong>de</strong>mim pat m§<br />

pamleê donne ea effet le pins pernicieux <strong>de</strong> tous le» exmmptm.<br />

ANCIENS. - PHILOSOPHIE. 405<br />

ba<strong>la</strong>ncerai l à vouloir être Plutarque plutôt que Séné*<br />

que?<br />

— Mais comment les apologistes ont-ils eux-mêmes<br />

cité ce qui leur est si contraire? — Je. vous l'ai<br />

dit : c'est qu'ils n'ont jamais qu'une idée à <strong>la</strong> fois,<br />

et qu'ils n'ont vu dans tout le passage que <strong>la</strong> préférence<br />

donnée en philosophie morale à Plutarque et<br />

à Sénèque conjointement, sur P<strong>la</strong>ton et Cicéron,<br />

comme vous l'allez voir; et, à <strong>la</strong> faveur <strong>de</strong> ce résultat,<br />

ils ont <strong>la</strong>issé passer Plutarque sans y faire trop<br />

d'attention} non plus qu'à <strong>la</strong> nature <strong>de</strong>s motifs <strong>de</strong><br />

préférence énoncés dans Montaigne, qui nous dît<br />

au môme endroit :<br />

« Ils ont touts tiens cette notablemmmodïté pmr mmn<br />

humeur, qm <strong>la</strong> science que l'y cherche y est imiciéê à<br />

pièces décousues, qui ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt pas l'obligation d'un<br />

long travail, <strong>de</strong>quoy i§ suis incapable : ainsi sont les<br />

opuscules <strong>de</strong> Plutarque, et les epîtrm <strong>de</strong> Sénèque, qui<br />

sont <strong>la</strong> plus Mie partis <strong>de</strong> leurs escripts et <strong>la</strong> plus<br />

proufitaèle. 11 ne fault pas gran<strong>de</strong> entreprisse pour m'y<br />

mettre ; et les quitte où U me niafsf : car elles n'ont point<br />

<strong>de</strong> suite et <strong>de</strong> dépendance <strong>de</strong>s unes aux asile es, »<br />

C'est donc l'humeur pressense <strong>de</strong> Montaigne qui<br />

est le premier motif <strong>de</strong> sa prédilection pour les ÉpU<br />

très <strong>de</strong> Sénèque et les petits Traités moraux <strong>de</strong> Plutarque<br />

, que l'on peut prendre et quitter comme on<br />

•eut, au lieu qu'en effet il y a beaucoup plus <strong>de</strong> suite<br />

et d'éten<strong>du</strong>e dans les dialogues philosophiques <strong>de</strong><br />

P<strong>la</strong>ton et <strong>de</strong> Cicéron dont on ne peut pas perdre <strong>de</strong><br />

vue le tissu sans être totalement dérouté. 11 se peut<br />

que l'autre manière soit plus commo<strong>de</strong> pour <strong>la</strong> paresse;<br />

mais il me semble que <strong>la</strong> <strong>de</strong>rnière suppose un<br />

mérite plus essentiellement philosophique, et une<br />

bien plus gran<strong>de</strong> force <strong>de</strong> tête et <strong>de</strong> composition. On<br />

peut bien ne pas convenir non plus que les Opuscules<br />

<strong>de</strong> Plutarquq et les lettres <strong>de</strong> Sénèque soient <strong>la</strong> plus<br />

belle partie <strong>de</strong> leurs ouvrages, et <strong>la</strong>pins profitable.<br />

Les Fies parallèles <strong>du</strong> premier ont toujours passé<br />

pour ce qu'il afaitcfe plus beau;et sa manière d'écrire<br />

est si morale dans l'histoire, qu'elle peut y être tout<br />

aussi profitable que dans ses œuvres philosophiques<br />

Pour ce qui est <strong>du</strong> <strong>de</strong>rnier, Di<strong>de</strong>rot lui-même n'est<br />

pas <strong>de</strong> l'avis <strong>de</strong> Montaigne : il préfère les Traités<br />

<strong>de</strong> Sénèque à ses Lettres, et là-<strong>de</strong>ssus je pense comme<br />

lui; ce qui presse encore que Montaigne n'est pas<br />

plus irréfragable pour lui que pour nous. Vous ne serez<br />

pas surpris, sur ce que Montaigne nous a dit <strong>de</strong><br />

sa façon <strong>de</strong> lire-, qu'il s'ennuie <strong>de</strong> <strong>la</strong> manière d'écrire<br />

<strong>de</strong> Cicéron, qui ne traite rien à pièces décousues,<br />

et qui se croit obligé <strong>de</strong> remplir chaque objet à sa<br />

p<strong>la</strong>ce. Mais peut-être le serez-vous qu'il ne trouve<br />

dans les écrits philosophiques do l'orateur <strong>de</strong> Rome<br />

f ne <strong>du</strong> terni : c'est une opinion qui lui est particulière<br />

et qui fait un grand sujet <strong>de</strong> joie pour nos ad-

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