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la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal

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606<br />

Ce êêmoûimmî est défectueux dans <strong>la</strong> partie morale<br />

v puisque le prince est récompensé. Cependant<br />

il ne révolte poist, et il faut en savoir gré à l'auteur<br />

: c'est une preuve qu'il a su intéresser en faveur<br />

<strong>de</strong> Ladisîas 9 et qu'il a connu ce secret <strong>de</strong> Fart<br />

qui consiste à faire excuser et p<strong>la</strong>indre les attentats<br />

qu'un moment <strong>de</strong> fureur a fait commettre, et qui ne<br />

sont pas réfléchis* 11 a eu soin <strong>de</strong> donner cette couleur<br />

à ceci <strong>de</strong> Ladisîas, dans le récit que lui-même<br />

en fait au quatrième acte : on y voit que <strong>la</strong> nouvelle<br />

<strong>de</strong> l'hymen secret <strong>de</strong> Cassandre l'avait mis absolument<br />

hors <strong>de</strong> lui-même. Il faut l'entendre pour se<br />

convaincre que, si le style <strong>du</strong> poète manque d'élégance<br />

et <strong>de</strong> correction , il ne manque ni <strong>de</strong> chaleur<br />

ni <strong>de</strong> vérité.<br />

Succombant tout entier à ce coup qui m'accable,<br />

De tout raisonnement Je <strong>de</strong>viens incapable,<br />

Fils retirer mes gens, m'enferme tout le soir,<br />

Et ne prends plus avis que <strong>de</strong> mon désespoir.<br />

Par une fausse porte enf<strong>la</strong>, <strong>la</strong> nuit venue,<br />

le me dérobe aux miens , et Je gagne k me ;<br />

D'où, tout sois? tout respect, tout Jugement perds,<br />

An pa<strong>la</strong>is <strong>de</strong> Cassandre en même temps ren<strong>du</strong> t<br />

J'esca<strong>la</strong><strong>de</strong> les murs, gagne une galerie,<br />

Et, cherchant as endroit commo<strong>de</strong> à ma furie,<br />

Descends sons l'escalier, et dans l'obscurité<br />

Prépare à tout succès mon courage irrité.<br />

Au nom <strong>du</strong> <strong>du</strong>c eatn J'entends ouvrir <strong>la</strong> porte;<br />

Et suivant, à ce nom, <strong>la</strong> fureur qui m'emporte,<br />

Cours, éteins <strong>la</strong> lumière, et, d'un aveugle effort,<br />

De trois coup <strong>de</strong> poignard blesse le <strong>du</strong>c à mort.<br />

COURS Dl LLTTËRATDHB.<br />

Pour un homme que Fou a peint aussi impétaemt<br />

aussi passionné que Ladisîas, aussi peu maître <strong>de</strong><br />

Mi, toutes ces circonstances sont autant d'eienseg;<br />

l'idée affreuse <strong>du</strong> bonheur d'un ri?al , le nom <strong>de</strong> ce<br />

rival qu'il entend prononcer, l'horreur <strong>de</strong> cette situation,<br />

<strong>la</strong> nuit, l'égarement d'une âme bouleversée.<br />

11 a tué son frère , il est ?rai, mais sans le vouloir,<br />

sans le connaître, et croyant frapper un rival. L'état<br />

d'accablement et <strong>de</strong> désespoir où il parait ensuite,<br />

«a résignation et sa fermeté lorsqu'il est condamné,<br />

portent les spectateurs à croire qu'il méritait un<br />

meilleur sort. Enfin, le parti que prend le roi <strong>de</strong><br />

cesser <strong>de</strong> régner plutôt que <strong>de</strong> cesser d'être juste,<br />

et ce développement d'une âme à <strong>la</strong> fois royale et<br />

paternelle, eicitent l'admiration et l'intérêt « et<br />

achèvent <strong>de</strong> justifier ce dénoûment, qui fait voir<br />

-qu'il est encore plus important <strong>de</strong> suivre les dispositions<br />

naturelles <strong>du</strong> spectateur que les principes<br />

rigoureux <strong>de</strong> <strong>la</strong> morale.<br />

Les personnages principaux <strong>de</strong> cette tragédie<br />

sont <strong>de</strong>ssinés <strong>de</strong> manière à foire* beaucoup d'honneur<br />

au talent <strong>de</strong> Rotrou. Ce qui caractérise Yen-<br />

«es<strong>la</strong>s, c'est l'amour <strong>de</strong> <strong>la</strong> justice f le premier <strong>de</strong>voir<br />

<strong>de</strong>s souverains : il sacrile à ce <strong>de</strong>voir et les<br />

sentiments paternels 9 et sa couronne ; et ce qu'il<br />

<strong>mont</strong>re <strong>de</strong> faiblesse dans le premier acte est plu-<br />

tôt <strong>de</strong> son Âge que <strong>de</strong> son caractère. La côi<strong>de</strong>scendance<br />

qu'il se croit forcé d'avoir, tient d'un côté<br />

au désir <strong>de</strong> 1a paix domestique, bonheur le pi»<br />

nécessaire à un vieil<strong>la</strong>rd; et <strong>de</strong> l'autre, à l'ascendant<br />

que prend nécessairement un jeune prince dont<br />

<strong>la</strong> valeur et l'impétuosité doivent p<strong>la</strong>ire à une nation<br />

guerrière. Le <strong>du</strong>e <strong>de</strong> Courtau<strong>de</strong> est le modèle<br />

d'un ministre que <strong>la</strong> faveur n'a point corrompu, et<br />

d'un général que les succès n'ont point enorgueilli.<br />

En servait le monarque, il rend tout ce qu'il doit<br />

à l'héritier <strong>de</strong> <strong>la</strong> couronne : sa modération résiste<br />

aux plus <strong>du</strong>res épreuves, et sa gran<strong>de</strong>ur d'âme va<br />

jusqu'au sacrifice le plus -générera, puisque étant k<br />

maître <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r pour récompense <strong>la</strong> maie d'une<br />

princesse qu'il aime, il préfère à son propre bonheur<br />

<strong>la</strong> vie <strong>de</strong> son pies grand ennemi. Mais ce qu'il y<br />

a <strong>de</strong> plus beau et <strong>de</strong> plus dramatique dans cette<br />

pièce, c'est 1e rôle <strong>de</strong> Ladisîas. On ne peut nier<br />

qu'il ne soit l'original <strong>de</strong> celui <strong>de</strong> Vendôme ; ,et<br />

quoique celui-ci soit bien supérieur, c'est beaucoup<br />

pour <strong>la</strong> gtoiraie Rotrou que Yoltaire ait trouvé<br />

chez lui ce qu'il a surpassé. Les efforts que Ladisîas<br />

fait sur lui-même pour vaincre un penchant<br />

qui humilie sa fierté, ces combats perpétuels, ces<br />

alternatives d'une froi<strong>de</strong>ur affectée, et d'un amour<br />

qui menace ou qui supplie, sont d'un effet tragique,<br />

que Fauteur n'avait pu trouver dans Corneille. Le<br />

style, à travers ses inégalités et ses fautes, a souvent<br />

tout le feu <strong>de</strong> <strong>la</strong> passion ; quand Ladisîas veut<br />

lécMr Cassandre$ il atout l'abandon <strong>de</strong> <strong>la</strong> tendresse<br />

:<br />

<strong>la</strong>tent» âm sectvft <strong>de</strong> tourmenter les Émit;<br />

Susciter terre et ciel soufre ma passion ;<br />

lilcrcisri l'Etat <strong>du</strong>s votre aversion ;<br />

Bu frêne ©a Je prétends éêêmtrœz mm mgfm§e s<br />

Et pour me perdre ealii mettei tout en usage :<br />

avec tous YOS efforts et tout votre easirraax,<br />

- YCfW ne m'oteres point Famoar que fat pour vont»<br />

Quand il estrévolté <strong>de</strong> ses mépris, il u f y a pas moins<br />

d'amour dans ses fureurs qu'il n'y en avait dans<br />

ses prières :<br />

Hé nous obstinons point à <strong>de</strong>s toux superflus;<br />

Laissons mourir l'amour où l'espoir se vit plu.<br />

•Iles, iûdigne objet <strong>de</strong> mon Inquiétu<strong>de</strong>;<br />

J'ai trop longtemps souffert <strong>de</strong> foire Ingratitu<strong>de</strong> ;<br />

le vous <strong>de</strong>vais Connaître, «t ne m $ engager pas<br />

Acs trompeuses douceurs <strong>de</strong> vos craefs appât*<br />

Oui, Je rougis, ingrate, et mon pmpn eonrroi»<br />

Me me peut pardonner ce que J'ai fait pour vous,<br />

le reai que <strong>la</strong> mémoire efîace <strong>de</strong> ma vie<br />

Le souvenir <strong>du</strong> temp que je vous ai servie.<br />

ï*éfals mort pour ma gloire, et Je n'ai pas vécu<br />

Tant epe ee lâche cour s'est dit «ptrv vaincu.<br />

Ce n'est que d'aujourd'hui qu'il vit et qu'il respire,<br />

D'aujourd'hui qu'U reaooce sa joug;<strong>de</strong> votre empli»,<br />

Et qu'avec ma raison mes yeux et lut d'accord<br />

Détestent votre vue à l'égal <strong>de</strong> <strong>la</strong> mort<br />

A peine est-elle-sortie, qu'il s'écrit ÉésistftM :

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