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la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal

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m<br />

inutilement essayé <strong>de</strong> sauter sa maîtresse , se donne<br />

GOUHS DE LFTTÉMTIJ1E.<br />

<strong>la</strong> mort pour se pas loi survivre. U j a là <strong>de</strong> quoi fournir<br />

aui mo<strong>de</strong>rnes plus d'âne 'scène très-tendre, et<br />

remplie <strong>de</strong> tous les développements d'une passioe<br />

malheureuse. Eh bien ! il n'en est pas même qtntiou<br />

dans <strong>la</strong> pièce <strong>de</strong> Sophocle. Rien ne prou?e plus<br />

évi<strong>de</strong>mment que les aneïens ne regardaient point<br />

l'amour comme fait pour entrer dans <strong>la</strong> tragédie.<br />

Noos 9 <strong>de</strong> notre côté, prenons gar<strong>de</strong> qu'une préfé­<br />

rence trop exclusif e pour les sujets d'amour n'égare<br />

notre jugement, et ne borne nos p<strong>la</strong>isirs : il n'y en<br />

a jamais trop; n'en eicluons aueun. Trop <strong>de</strong> gens<br />

sont portés à regar<strong>de</strong>r comme <strong>de</strong>s ouvrages froids<br />

ceux où l'amour ne joue ps un très-grand rôle ; et<br />

nous en a?©as <strong>de</strong> très-beaux qui n'ont point cette<br />

sorte d'intérêt. Mais quoi donc! n'y en aurait-il<br />

plus d'autre? L'amour est-il le seul sentiment dramatique?<br />

La tragédie n*a-frelle pas une foule d'autres<br />

ressorts qu'elle met en œuvre tout aussi heureusement,<br />

et souvent même avec plus <strong>de</strong> mérite?<br />

On s'est accoutumé à un -étrange abuï d'expression,<br />

qui est encore <strong>de</strong> nos jours ; c'est <strong>de</strong> ne reconnaître<br />

<strong>de</strong> sensibilité dans les ouvrages que ©elle qui peint<br />

tes sentiments tendres, comme s'il en fal<strong>la</strong>it moins<br />

pour peindre les passions fortes et violentes : c'est<br />

une sensibilité d'un antre caractère, mais qui n'a<br />

ni moins d'effet ni moins d'énergie. Un auteur peutil<br />

être regardé comme froid lorsque, sans employer<br />

l'amour, U sait attacher, échauffer, transporter<br />

mime le spectateur? Le cinquième acte <strong>de</strong> Clnna,<br />

•le quatrième <strong>de</strong>s ff&rmm , ne ?ous font ps fondre<br />

en <strong>la</strong>rmes, ne TOUS déchirent pas? Et quoiqu'on<br />

ait vu bien <strong>de</strong>s gens qui ne veulent plus reconnaître<br />

<strong>la</strong> tragédie qu'à ces seuls caractères t oseraientils<br />

nier que ces beaux morceaux ne donnent à notre<br />

âme une <strong>de</strong>s émotions les plus vives et les plus douces<br />

qu'elle puisse éprouver, puisqu'ils relèvent et<br />

l'attendrissent à <strong>la</strong> fois? He cherchons donc jamais<br />

à rabaisser un genre <strong>de</strong> mérite pour en élever un<br />

autre; admettons-les chacun à leur p<strong>la</strong>ce, et que<br />

jamais une préférence ne <strong>de</strong>vienne une exclusion.<br />

Laissons à l'esprit <strong>de</strong> prti cette logique trop commune<br />

: Tel ouvrage n'est pas dans tel genre, donc<br />

il n'est pas bon. Encore cette logique est-elle sujette<br />

à d'étranges alternatives, comme Test toujours<br />

•celle <strong>de</strong>s passions. L'auteur que l'on veut décrier<br />

a-t-il Ciit un ouvrage touchant ou il est impossible<br />

<strong>de</strong> nier les <strong>la</strong>rmes, alors tout ce qu'il y a <strong>de</strong> plus<br />

commun dans le mon<strong>de</strong>, c'est, «lit-on, le talent <strong>de</strong><br />

faire pleurer. En a«t il fait un antre d'un intérêt<br />

distrait, et qui remue l'âme 'sans <strong>la</strong> bouleverser,<br />

alon il n'existe plus d'autre mérite que <strong>de</strong> faire<br />

répandra <strong>de</strong>s <strong>la</strong>rmes. Les mène» variations se<br />

représentent an d'autres genres; et ce n'est pas <strong>la</strong><br />

première fois que j'ai cru <strong>de</strong>voir m'élevar contra<br />

toutes ces poétiques <strong>du</strong> moment, à l'usage <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

haine et <strong>de</strong> l'envie. Quelle est au contraire <strong>la</strong> poétique<br />

<strong>de</strong>s écrivains honnêtes et <strong>de</strong> bonne foi f celle<br />

qu'on ne peut jamais accuser <strong>de</strong> partialité? Cest<br />

celle qui, fondée sur <strong>de</strong>s principes invariables, se<br />

retrouve <strong>la</strong> même dans tous les temp, <strong>de</strong>puis<br />

Aristote jusqu'à Qointilten, et <strong>de</strong>puis Horace jusqu'à<br />

Bespréaux ; qui, sans Mre valoir aucune partie<br />

<strong>de</strong> fart aux dépits <strong>de</strong> toutes les autres, dé<strong>mont</strong>re<br />

leur dépendance mutuelle et leurs effets différents ;<br />

qui, en distinguant les genres sans exalta l'un pour<br />

déprécier l'antre, <strong>mont</strong>re ce que chacun d'eux a <strong>de</strong><br />

mérite, en <strong>la</strong>issant à tout le mon<strong>de</strong> <strong>la</strong> liberté <strong>de</strong><br />

choisir. Voilà celle dont on ne peut se déler sans<br />

injustice. M faut être au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong>s petites passions<br />

pur trouver <strong>la</strong> vérité; et c'est encore un moyen<br />

<strong>de</strong> plus pour avoir l'esprit juste, que d'avoir un<br />

CQ9ir honnête et droit.<br />

.Le sujet à'QËêipe à Cotom a été transporté,<br />

<strong>du</strong> moins en partie, dans mie tragédie mo<strong>de</strong>rne,<br />

VmMpetkmAêmMet <strong>de</strong>-M. Bues; et"l'on aurait<br />

souhaité que l'auteur ne l'eût pas mêlé atec ÏMemM<br />

d'Euripi<strong>de</strong> : <strong>la</strong> réunion <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux pièces étrangères<br />

l'urne à l'autre doit Ééeessaîrement mure à<br />

tontes les <strong>de</strong>ux. Mais tout ce qu'il avait emprunté<br />

<strong>de</strong> Sophocle a été généralement goité, ce qui prouvm<br />

qu'il a su imiter un homme <strong>de</strong> talent II a même,<br />

dans 1» scènes tirées<strong>du</strong> poète grec, <strong>du</strong>s traits é'un*<br />

gran<strong>de</strong> beauté qu'il ne doit point à Sophocle, et qui<br />

en sont dignes : ces <strong>de</strong>ux vert, par exemple, que<br />

prononce Œdipe dansaon imprécation contra Poly-<br />

Le sentiment et l'expressioB sont d'une égale éner- '<br />

gie. Le théâtre <strong>de</strong> l'Opéra s'estaussi emparé <strong>du</strong><br />

même sujet 9 et avec beaucoup <strong>de</strong> succès ; j'en parlerai<br />

ailleurs.<br />

Une sépulture $ un tombeau t f oilà encoro le fond<br />

que nous retrouvons ici ; mais le contraste <strong>de</strong> l'ingratitu<strong>de</strong><br />

dénaturée <strong>de</strong> Bolynîee, et <strong>de</strong> <strong>la</strong> tentent<br />

héroîqueet iièle <strong>de</strong> ses sœurs, bmène et Antjgone;<br />

<strong>la</strong> situationd'OSdipe; le développement <strong>de</strong> ses longues<br />

douleurs et <strong>de</strong> ses profonds ressentiments :<br />

voUà les ressorts <strong>de</strong> l'intérêt, ressorts très-simples<br />

comme tous ©eus qu'employaient les Grecs, et qui<br />

n'en sont pas moins puissants. A cet intérêt général<br />

s'en joignait un particulier aux Athéniens :<br />

c'est <strong>la</strong> tradition établie dans <strong>la</strong> pièce qm'OËdipe a<br />

choisi son tombeau dans l'Attique; et ks ora<strong>de</strong>p,<br />

accrédités par <strong>la</strong> croyance popu<strong>la</strong>ire, avaient dé-

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