la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal
la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal
la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
260<br />
? erta, quoique <strong>la</strong> <strong>de</strong>stinée, iôat ertliie ne tesr eût jus accordé<br />
à tous le même succès. »<br />
Cest là ce serment si célèbre dans l'antiquité, et<br />
si souvent rappelé <strong>de</strong> nos jours. Quand on l'entend ,<br />
il semble que toutes les ombres évoquées tout à<br />
l'heure par Eschine ¥iennent se ranger autour <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />
tribune <strong>de</strong> Démosthènes et le prennent sous leur protection.<br />
Ce n'est pas assez : ? oyez comme il tourne<br />
contre Eschine cet air <strong>de</strong> triomphe qu'a eu celui-ci<br />
en par<strong>la</strong>nt <strong>de</strong> <strong>la</strong> défaite <strong>de</strong> Chéronée.<br />
C0U1S DE LITTÉ1ATU1E.<br />
« ï/âves-vous remarqué, Athéniens , lorsqu'il a parlé <strong>de</strong><br />
nos malheurs,?11 en par<strong>la</strong>it sans rien ressentir, sans rien<br />
témoigner <strong>de</strong> cette tristesse qui sied si bien à on citoyen<br />
honnête et sensible. Son visage était rayonnant d'allégresse,<br />
sa voix était sonore et éc<strong>la</strong>tante. Le malheureux ! il croyait<br />
m'aceuser, et il s'accusait lui-même! en se <strong>mont</strong>rant, dans<br />
nos refera communs 9 si différent <strong>de</strong> ce que TOUS êtes. »<br />
Eschine n'avait cessé d'avertir les Athéniens <strong>de</strong><br />
se déier <strong>de</strong> <strong>la</strong> pernicieuse éloquence <strong>de</strong> Démosthènes<br />
; il lui avait donné sur son talent ces éloges perfi<strong>de</strong>s<br />
et meurtriers auxquels <strong>la</strong> haine se condamne<br />
quelquefois elle-même ; sincère sur un point pour se<br />
rendre plus croyable sur un autre, et faisant senrir<br />
<strong>la</strong> vérité à donner <strong>du</strong> poids à <strong>la</strong> calomnie : c'est<br />
ainsi que les passions souillent tout ce qu'elles touchent<br />
, et tournent Sa louange même en poison. Démosthènes<br />
, quj ne <strong>la</strong>isse aucun article sans réponse,<br />
ne manque pas <strong>de</strong> relever Eschine sur celui-ci : il<br />
dé<strong>mont</strong>re par les faits que le talent <strong>de</strong> <strong>la</strong> proie n'a<br />
jamais été en lui qu f un moyen <strong>de</strong> servir <strong>la</strong> république<br />
; mais il commence par s'exprimer, sur ce même<br />
talent, avec une réserve et une mo<strong>de</strong>stie qui <strong>de</strong>-<br />
•algtf iatter l'amour-propre <strong>de</strong>s Athéniens. 11 n'y a<br />
pas jusqu'à son génie qu'il ne fasse dépendre d'eux.<br />
« Pour ce qui est <strong>de</strong> mon éloquence (puisque ea<strong>la</strong> Es»<br />
dilue s'est servi <strong>de</strong> ce mot) 9 f ai toujours TU que cette<br />
puissance <strong>de</strong> <strong>la</strong> parole dépendait en gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong>s dispositions<br />
<strong>de</strong> ceux qui écoutent, et que l'orateur pralt habile<br />
en proportion <strong>de</strong> <strong>la</strong> Mes vail<strong>la</strong>nce que .TOUS lui témoignez.<br />
Du moins, cette éloquence qu'il m'attribue $ été utile<br />
à tous dans tons les temps, et jamais nuisible à personne;<br />
Mais <strong>la</strong> tienne, <strong>de</strong> quoi sert-elle à Sa ptrte? Tu viens au-<br />
Jourdlmi sens parler <strong>du</strong> passé. Que dirtifroad'un mé<strong>de</strong>cin<br />
qui, appelé près d'un ma<strong>la</strong><strong>de</strong>, n'aurait pu trouver m remè<strong>de</strong><br />
à son mal, n'aurait pu le garantir <strong>de</strong> <strong>la</strong> mort, et ensuite<br />
tiendrait troubler ses funérailles 9 et crier près <strong>de</strong> sa tombe<br />
qu'il vivrait si Ton avait suivi d'autres conseils? •<br />
Il fon<strong>de</strong> l'intérêt <strong>de</strong> sa péroraison sur l'honneur<br />
qu'on lui a fait <strong>de</strong> lui confier l'éloge funèbre <strong>de</strong>s citoyens<br />
tués à Chéronée. Eschine s'était efforcé d'en<br />
faire contre lui un sujet <strong>de</strong> reproche ,«t d'autant plus<br />
qu'il avait lui-même inutilement sollicité celle fonction.<br />
Démosthènes en tire un nouveau triomphe<br />
pour lui 9 et une mm?elle humifiatîon pour son accusateur.<br />
* La république , Eschine, a entrepris et exéeoté <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s<br />
choses par mon ministère ; mais elle n'a pas été ingrate.<br />
Quand il a fallu choisir, au moment <strong>de</strong> notre disgrâce, l'orateur<br />
qui <strong>de</strong>vait rendre les <strong>de</strong>rniers honneurs au, victime»<br />
<strong>de</strong> <strong>la</strong> patrie, ce n'est pas toi qu'on a choisi, malgré ta mm<br />
sonore et tes brigues ; ce n'est pas Déma<strong>de</strong>, qui Tenait <strong>de</strong><br />
nous obtenir <strong>la</strong> paix ; ni Hégémon, ni enfin anetm<strong>de</strong> ceux<br />
<strong>de</strong> ton parti : c'est mol On vous vit alors, Pyfeelèa al loi 9<br />
vomir contre moi, avec autant <strong>de</strong> fureur que d'impu<strong>de</strong>nce y<br />
les mêmes Invectives que tu viens <strong>de</strong> répéter ; et ce fut une<br />
raison <strong>de</strong> plus pour les Athéniens <strong>de</strong> persister dans leur<br />
choix. Tu en sais <strong>la</strong> valsait aussi bien que moi-même; Je<br />
veux pourtant te <strong>la</strong> dire : c'est qu'ils connaissait également<br />
, et tout mon amour pour <strong>la</strong> patrie, et tous les crimes<br />
que vous a?es commis envers elle. Us savaient que vous<br />
ne <strong>de</strong>viez votre impunité qu'à ses malheurs; que si vos<br />
sentiments contre elle n'ont éc<strong>la</strong>té que dans le temps <strong>de</strong><br />
sa disgrâce, c'était un aveu que dans tous tes temp vous<br />
aviez été ses ennemis secrets. H eoa?eaaif sans douta que<br />
celui qui <strong>de</strong>vait célébrer <strong>la</strong> vertu <strong>de</strong> ses concitoyens n'eût<br />
pas été le commensal <strong>de</strong> leurs ennemis, n'eût pas fait avec<br />
eux les mêmes sacrifices et les mêmes Ebattons. On ne pouvait<br />
pas déférer une fonction si honorable à ceux qu'en<br />
avait vus mêlés avec les vainqueurs y partager <strong>la</strong> joie insultante<br />
<strong>de</strong> leurs festins, et triompher 4® nos ca<strong>la</strong>mités. Enfin<br />
ce n'était pas a?ec une voix mensongère qu'il fanait dép<strong>la</strong>cer<br />
<strong>la</strong> <strong>de</strong>stinée <strong>de</strong> ces illustres morts. Ces justes regrets n®<br />
pouvaient être que'.dans <strong>la</strong> bouche <strong>de</strong> celui qui avait aussi<br />
<strong>la</strong> douleur dans l'âme; et cette douleur, on savait quelle<br />
était dans mon cœur et non pas dans le tien. Voilà ce qui<br />
a déterminé le suffrage <strong>du</strong> peuple; et quand les parente<br />
<strong>de</strong>s morts, chargés <strong>du</strong> triste soin <strong>de</strong> leur sépulture, ont<br />
donné te festin <strong>de</strong>s funérailles, c'est encore eàaa moi qu'Us<br />
Font donné, cliea mol, qu'ils regardâtes! comme faisant<br />
<strong>de</strong> plus près que personne à ceux dont nous pleurions <strong>la</strong><br />
perte. Ils leur étaient liés <strong>de</strong> plus près par le sang, mais<br />
personne ne Tétait davantage par tes aaat<strong>la</strong>aeals <strong>de</strong> citoyen ;<br />
personne, dans te perfe commune, n'avait eu À pleurer<br />
plus que moi. »<br />
Rollin observe avec raison que <strong>la</strong> seule choie qui<br />
puisse nous blesser dans cette Immortelle harangue y<br />
ainsi que dans celle d'Eschine, c'est <strong>la</strong> profusion<br />
d'injures personnelles que, dans plus d'un endroit,<br />
se permettent les <strong>de</strong>ux concurrents. Mais II est juste<br />
d'observer aussi qu'elles étaient autorisées par les<br />
mœurs républicaines, moins délicates sur ce point<br />
que les nôtres $ et que par conséquent ni l'un ni<br />
l'autre n'a manqué au précepte <strong>de</strong> l'art, qui défend<br />
<strong>de</strong> violer les convenances'reçues. Deux citoyens<br />
ennemis, <strong>de</strong>ux orateurs rivaux s'attaquaient l'un<br />
l'autre sur tous les points, sur <strong>la</strong> naissance, sur<br />
l'é<strong>du</strong>cation, sur <strong>la</strong> fortune, sur les mœurs; et cettf<br />
recherche entraînait <strong>de</strong>s détails qui ne sont pas toujours<br />
bien nobles pour nout* vu <strong>la</strong> différence <strong>de</strong>s