la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal
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n'a?oir pas voulu le suivre mot à mot qu'on s'est<br />
écarté lie son idée. Il veut dire, comme cm fa trèsbien<br />
dé<strong>mont</strong>ré <strong>de</strong> nos jours 9 que l'objet <strong>de</strong> toute<br />
imitation théâtrale f as moment même où elle excite<br />
h pitié et <strong>la</strong> terreur en sons <strong>mont</strong>rant <strong>de</strong>s actions<br />
feintes, est d'adoucir, <strong>de</strong> modérer en nous ce qm<br />
cette pitié et cette terreur auraient <strong>de</strong> trop pénible<br />
si les actions que Fou nous représente étaient réelles.<br />
L'idée d'Aristote 9 ainsi enten<strong>du</strong>e , est aussi juste<br />
qu'elle est c<strong>la</strong>ire; car qui pourrait supporter, par<br />
' eiemple, <strong>la</strong> YUC <strong>de</strong>s malheurs cf Œdipe 9 ou d'Andromaque<br />
, ou d'Mécube , si ces malheurs existaient<br />
sous nos yeux eu réalité? Ce spectacle, loin <strong>de</strong> nous<br />
être agréable, sous ferait mal; et voilà le charme,<br />
le prodige <strong>de</strong> rimitation9 qui sait vous faire un<br />
p<strong>la</strong>isir <strong>de</strong> ce qui partout ailleurs vous ferait une<br />
peine féritable. Voilà le secret <strong>de</strong> <strong>la</strong> nature et <strong>de</strong><br />
fart eombmés ensemble, et qu'un philosophe tel<br />
qu 9 Aristote était digne <strong>de</strong> <strong>de</strong>viner.<br />
Je me crois obligé <strong>de</strong> déc<strong>la</strong>rer ici qu'entraîné par<br />
l'autorité <strong>de</strong> tons les interprètes les plus habiles f<br />
j'ai moi-même, dans un Essai mtrks Tragiques<br />
grecs, adopté l'an<strong>de</strong>sne explication que je viens <strong>de</strong><br />
combattre 9 quoique en <strong>la</strong> restreignant beaucoup,<br />
et rejetant tontes les conséquences qu'on en vou<strong>la</strong>it<br />
tirer, et qui m'ont para très-feusses. C'est dans <strong>la</strong><br />
tra<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> <strong>la</strong> PoéUqm d'Jrktote, par l'abbé<br />
fiatteux, que j'ai trouvé l'explication nouvelle que<br />
je crois <strong>de</strong>voir préférer. Il s'étend fort au long sur<br />
les raisons qui Font déterminé : il serait hors <strong>de</strong><br />
propos <strong>de</strong> les rappeler ici; mais elles m'ont paru<br />
décisives, et je me suis rends, à l'évi<strong>de</strong>nce.<br />
L'Ignorance a voulu quelquefois tirer avantage<br />
<strong>de</strong> ces contradictions que Fon trouve entre ceux<br />
qui s'occupent <strong>de</strong> réIn<strong>de</strong> <strong>de</strong> l'antiquité. Quelle foi<br />
peut-on avoir en cux9 a-t-elle dit, puisque eux-mêmes<br />
ne sont pas toujours d'accord ? On peut en appeler<br />
IMesstis au témoignage <strong>de</strong> quiconque a étudié une<br />
autre <strong>la</strong>ngue que <strong>la</strong> sienne, même une <strong>la</strong>ngue vivante.<br />
C'en est assez pour savoir qu'il n'en est aucune dont<br />
les écrivains n'offrent quelques passages susceptibles<br />
<strong>de</strong> discussion pour un étranger qui les lit. A<br />
fttss forte raison doit-on s'attendre aux mêmes difficultés<br />
dans les <strong>la</strong>ngues mortes, dont les monuments<br />
très-anciens ont pu et ont dû même être fort altérés ;<br />
ce qui n'empêche pas que, sur <strong>la</strong> plus gran<strong>de</strong> psrtie<br />
<strong>de</strong> ces mêmes écrits, il ne soit comme impossible<br />
<strong>de</strong> se pas s 9 accor<strong>de</strong>r, parce que le plus souvent il<br />
n'y a pas le moindre nuage, à moins qu'on ne veuille<br />
en chercher*<br />
Méprenons les autres parties <strong>de</strong> <strong>la</strong> définition, <strong>la</strong><br />
tragédie est limitation d'une action grave. Oui9<br />
sans doute. Il n'y a que les mo<strong>de</strong>rnes qui se soient<br />
ANCIENS. — POÉSIE.<br />
n<br />
' écartés <strong>de</strong> ce principe. C'est ce mé<strong>la</strong>nge <strong>du</strong> sérieux et<br />
<strong>du</strong> bouffon, <strong>du</strong> grave et <strong>du</strong> burlesque, qui défigure<br />
si grossièrement les pièces ang<strong>la</strong>ises et espagnoles ;<br />
et c'est un reste <strong>de</strong> barbarie. Aristote ajoute que<br />
cette action doit être entière et d'une certaine<br />
éten<strong>du</strong>e (vu). Il s'explique :<br />
« J'appelle entier, dit-il, ce qui s un commencement» us<br />
milieu et mie lin »<br />
Quant à l'éten<strong>du</strong>e, voici ses idées, qui sont d'un<br />
grand sens :<br />
« Test composé, pour mériter le nom <strong>de</strong> beau ; soit animal<br />
9 soit artificiel, doit être ordonné dans tes parties, et<br />
avoir nie éten<strong>du</strong>e convenable à leur proportion § car Sa<br />
beauté réunit les idées <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>ur et d'ordre. Ou animal<br />
très-petit ne peut être beau, pareequ'il faut Se voir <strong>de</strong> près,<br />
et que Ses parties trop réunies se confon<strong>de</strong>nt. D'en antre<br />
coté, nn objet trop vaste, an animal qui serait , je suppose,<br />
<strong>de</strong> mille sta<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Soigneur, se pourrait être vu que<br />
par parties : on ne nourrait en saisir <strong>la</strong> proportion si l'ensemble<br />
: il ne serait donc pas beau. De même donc que,<br />
dans les animai»et dans te autres corps naturels, os<br />
vent une certaine gran<strong>de</strong>ur qui puisse être saisie d'un coup<br />
eTenl , <strong>de</strong> même dans Faction d'un poème m veut une certaine<br />
éten<strong>du</strong>e qui puisse être embrassée tout à <strong>la</strong> fois » et<br />
faire un tableau dans f esprit Mais quelle sera <strong>la</strong> mesure<br />
<strong>de</strong> cette éten<strong>du</strong>e ? c'est ce que fart ne saurait déterminer<br />
rigowetisemeiiL H suffit qu'il j ait l'éten<strong>du</strong>e nécessaire<br />
pour que les inci<strong>de</strong>nts naissent les uns <strong>de</strong>s autres vraisemb<strong>la</strong>blement<br />
, amènent <strong>la</strong> révolution <strong>du</strong> bonheur au malheur<br />
ou <strong>du</strong> malheur au bonheur. (lèid.) »<br />
Plus on réfléchira sur ces principes, plus on sentira<br />
combien ils sont fondés sur <strong>la</strong> connaissance <strong>de</strong><br />
<strong>la</strong> nature. Qui peut douter, par eiemple, que les<br />
pièces <strong>de</strong> Lopez <strong>de</strong> Yega et <strong>de</strong> Shakspeare, qui contiennent<br />
tant d'événements que <strong>la</strong> meilleure mémoire<br />
pourrait à peine s'en rendre compte après <strong>la</strong> représentation;<br />
qui peut douter que <strong>de</strong> pareilles pièces<br />
ne soient horsik <strong>la</strong> mesure convenable, et qu'en vio<strong>la</strong>nt<br />
le précepte d'Aristote on n f ait blessé le bon<br />
sens? Car enln nous ne sommes susceptibles que<br />
d'un certain <strong>de</strong>gré d'attention, d'une certaine <strong>du</strong>rée<br />
d'amusement, d'instruction, <strong>de</strong> p<strong>la</strong>isir Le gnil<br />
consiste donc à saisir cette mesure juste et nécessaire<br />
, et là-<strong>de</strong>ssus le légis<strong>la</strong>teur s'en rapporte au<br />
poètes. Combien f d'ailleurs, cequ'il dit sur l'essence<br />
<strong>du</strong> beau, sur <strong>la</strong> nécessité <strong>de</strong> n'offrir à l'esprit que<br />
ce qu'il peut embrasser quand on vent inspirer l'intérêt<br />
et l'admiration, est profond et lumineui!<br />
Avouons-le : éblouir un moment <strong>la</strong> multitu<strong>de</strong> par<br />
<strong>de</strong>s pensées hardies, qui ne paraissent nouvelles que<br />
parce qu'elles sont hasardées et paradoxales, c'est<br />
ce qui est donné à beaucoup d'hommes ; mais instruire<br />
<strong>la</strong> postérité par <strong>de</strong>s vues sûres et universelles,<br />
trouvées toujours plus vraies à mesure qu'elles sont