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la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal

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pas que ces kitres ne soient curieuses et très-dignes<br />

<strong>de</strong> l'impression f puisqu ? elles contiennent une trèsbonne<br />

critique <strong>de</strong> son Œdipe faite par lui-même,<br />

et <strong>de</strong>s réflexions Judicieuses sur ee sujet. II est à<br />

présumer que, quand il les retrancha, c'est qu'il<br />

sentit qu'il n'avait pas parlé d'un ton convenable<br />

<strong>de</strong> ce même Sophocle à qui <strong>de</strong>puis il rendit plus <strong>de</strong><br />

justice dans <strong>la</strong> préfixe d'Oretie; et j'ose croire que,<br />

tll a?ait relu ces lettres quand on les réimprima f<br />

il n'aurait pas <strong>la</strong>issé subsister les censures très-dép<strong>la</strong>cées<br />

qu'il hasar<strong>de</strong> contre cette eiposition <strong>de</strong><br />

ÏQEdîpe grec, qu'il eût mieux fait d'imiter. Voici<br />

comme il en parie, sans donner à l'auteur li plus<br />

légère louange.<br />

« La scène mm par un chœur <strong>de</strong> Tfaébafcis prosterpés<br />

an pied <strong>de</strong>s autels. Œdipe y leur libérateur et leur roi, parattau<br />

amen d'en*, Je suis méipe, leur dit-il, si vanté<br />

par i&ut h tmmdê. lt y a quelque apparence que tes Thétains<br />

n'Igsorafeiit pas qu'il s'appe<strong>la</strong>it Œdipe. »<br />

Non, ils ne l'ignoraient pas, mais Yoltaire ignorait<br />

<strong>la</strong> <strong>la</strong>ngue grecque ; et, faisant dire à Sophocle<br />

ce qu'il ne dit pas y il s'est exposé à tomber dans <strong>de</strong>s<br />

méprises qui avertissent <strong>de</strong> ne juger que <strong>de</strong> ce que<br />

l'on sait. Que dirait-on d'un critique qui, entendant<br />

ce premier vers û'Ipkigénie,<br />

Oui, c'ait à^nmmmm t e'«t ton roi qui tfévaille,<br />

reprocherait à Racine d'avoir dît, Je suis Agamemnon,<br />

je mes êm roi; et ajouterait t II y a quelque<br />

apparence qu'Arcas connaissait son roi, connaissait<br />

Agamemnm? On loi dirait que c'est une<br />

manière <strong>de</strong> parler très-convenable et très-reçue, et<br />

qu'il est tout naturel qu'Arcas étant surpris d'être<br />

éveillé par son roi, celui-ci l'assure qu'il ne se trompe<br />

pas, que c'est bien Jgamemnon, que c'est son roi<br />

qui l'éveille; ce qui, pour le dire en passant, annonce<br />

déjà une situation critique qui nécessite une<br />

pareille démarche. Cette explication même est si<br />

c<strong>la</strong>ire, qu'on ne <strong>la</strong> croirait nécessaire que pour un<br />

étranger, siolns instruit que nous <strong>de</strong>s tournures <strong>de</strong><br />

notre <strong>la</strong>ngue. Eh bien ! le vers d'Agamemnon est<br />

précisément celui d'OËdipe, et l'un n'est pas plus<br />

ridicule que l'autre.<br />

« Je suis sorti (dit-il ) au bruit <strong>de</strong> vos gémissements., et<br />

n'ai pas voulu m'en nppurter à d'autres. Je suis veau mol»<br />

«es», moi f cet Œdipe dont le nom est dans <strong>la</strong> bouché <strong>de</strong><br />

tout les hommes. »<br />

Eêmarquez que l'énigme <strong>du</strong> Sphinx l'avait ren<strong>du</strong><br />

frè^-célèbre, et que les anciens ne faisaient nulle<br />

difficulté d'avouer que leur nom était fort conou;<br />

témoin m que dit à <strong>la</strong> reine <strong>de</strong> Carti<strong>la</strong>ge le mo<strong>de</strong>ste<br />

Énée , <strong>de</strong> tous les héros le moins accusé d'orgueil :<br />

COURS DE UTIÉHAXIIHE.<br />

« Je suis le pieux Énee dont <strong>la</strong> renommée s'élève Jusqu'aux<br />

<strong>de</strong>ux. »<br />

Cette extrême réserve qu'imposent les hienséances<br />

sociales, et qui défend à l'amour-propre <strong>de</strong> chacun<br />

<strong>de</strong> se moetrer en quoi -que ce séit 9 <strong>de</strong> peur <strong>de</strong> blesser<br />

ce<strong>la</strong>i <strong>de</strong> tous, cette mo<strong>de</strong>stie <strong>de</strong> convention et<br />

<strong>de</strong> raffinement n'était point un <strong>de</strong>voir dans <strong>de</strong>s<br />

mœurs plus simples et plus franches,, et tous les<br />

héros <strong>de</strong> l'antiquité en sont <strong>la</strong> preuve. 11 n'y a donc<br />

point d'orgueil dans ce qu'OEdipe dit <strong>de</strong> lui-mémo,<br />

comme il n'y a point <strong>de</strong> simplicité grossière dans<br />

<strong>la</strong> manière dont il se nomme, comme il n'y a rien<br />

<strong>de</strong> dép<strong>la</strong>cé à faire <strong>la</strong> peinture <strong>de</strong>s maux qui accablent<br />

les Thébains ; car, quoique Œdipe n'ignore<br />

pas que <strong>la</strong> peste règne dans Thèbes, ces sortes <strong>de</strong><br />

développements naturels au malheur ne sont point<br />

hors <strong>de</strong> propos et font p<strong>la</strong>isir au spectateur en peignant<br />

à l'imagination tout ce qu'il y a et*affreux dans <strong>la</strong><br />

situation <strong>de</strong>s personnages. Qu'on juge d'après ce<strong>la</strong><br />

si Yoltaire était fondé à terminer ainsi ses critiques<br />

inconsidérées.<br />

« Tout ce<strong>la</strong> s'est guère une preuve <strong>de</strong> cette ptfacidB<br />

oà Fou prétendit, il y a quelques années, que Sophocle<br />

avait porté là tragédie. (C'étaient Racine et Boileau qui<br />

l'avaient préten<strong>du</strong>. ) 11 ne paraît pas qu'os ait grand tort<br />

dans ce siècle <strong>de</strong> refuser son admiration à sa poète qui<br />

n'emploie d f autre artifice pour faire connaître ses personnages,<br />

epe <strong>de</strong> foire dire : Je suis Œdipe, Cette grossièreté<br />

ne s'appelle plus une noble simplicité. »<br />

Os est un peu étonné que Voltaire, refuse son<br />

admiration à Sophocle dans le temps où il lui emprunte<br />

toutes les beautés qui loi fait le suceès <strong>de</strong><br />

sa tragédie. Tout ce qu'on peut dire pour sou excuse<br />

| c'est qu'alors il était très-jeune 9 et que luimême<br />

probablement s'était condamné <strong>de</strong>puis, puisqu'il<br />

avait jugé à propos <strong>de</strong> retrancher ces ktùrrn<br />

<strong>de</strong> toutes les éditions dont il a été le rédaUtour.<br />

11 me semble aussi aller beaucoup trop loin quand<br />

il soutient que <strong>la</strong> pièce <strong>de</strong> Sophocle-est iule au iecond<br />

acte, et que les paroles <strong>du</strong> <strong>de</strong>vin ïlfésfis sont<br />

si c<strong>la</strong>ires y qu'OEdipe ne peut manquer <strong>de</strong> s'y reconnaître.<br />

Pour juger <strong>de</strong> ce reproche, voyons ce que<br />

dit le <strong>de</strong>vin. C'est le chœur qui conseille au roi <strong>de</strong><br />

le faire venir, et le roi répond 'que Créon lui a<br />

déjà donné le même avis ; qu'en conséquence il a<br />

déjà envoyé <strong>de</strong>ui fois chercher cet interprète <strong>de</strong>s<br />

dieux si révéré dans Thèbes , et qu'il s'étonne que<br />

Ttrésias tar<strong>de</strong> si longtemps. Le vieil<strong>la</strong>rd aveugle,<br />

à qui le ciel a donné <strong>la</strong> connaissance <strong>de</strong> ce qu'il y<br />

a <strong>de</strong> plus secret, et qui est parmi les mortels ce qu'Apollon<br />

est parmi les dieux , est amené sur <strong>la</strong> scène ; et<br />

j'avoue que ce personnage me paraît mieux adapté<br />

au sujet, et pro<strong>du</strong>it plus <strong>de</strong>-curiosité et <strong>de</strong> terreur

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