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la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal

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ANCIENS. — POÉSIE.<br />

le plus grand talent fat <strong>de</strong> bien connaître à quel<br />

peuple il avait affaire, sentit îi nécessitées le ûatter<br />

pour conserver te pouvoir <strong>de</strong> lui foire <strong>du</strong> bien,<br />

et s'attira le reproche d'avoir augmenté encore<br />

l'esprit démocratique, qu'il eût été à souhaiter que<br />

l'on pût restreindre. 11 n'osa pas s'opposer à <strong>la</strong> licence<br />

d'Aristophane, parce qu'il sentit qu'elle p<strong>la</strong>isait<br />

à <strong>la</strong> multitu<strong>de</strong>, qui semb<strong>la</strong>it regar<strong>de</strong>r cette<br />

espèce <strong>de</strong> censure publique comme un <strong>de</strong>s privilèges<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> liberté. Ce mot seul est si imposant et<br />

si spécieux, qu'aujourd'hui même bien <strong>de</strong>s gens,<br />

tout en condamnant Aristophane, pensent qu'un<br />

poète comique <strong>de</strong> cette trempe pouvait être fort<br />

utile dans une république. Oui, sans doute, si!<br />

était possible <strong>de</strong> s'assurer qu'un homme chargé <strong>de</strong><br />

faire sur le théâtre les fonctions <strong>de</strong> censeur fût l'organe<br />

incorruptible <strong>de</strong> <strong>la</strong> justice et <strong>de</strong> <strong>la</strong> vérité. Mais<br />

avec un peu <strong>de</strong> réflexion, comment ne voitron pas<br />

que celui même qui serait digne qu'on lui confiât<br />

un si dangereux ministère commencerait par le refuser,<br />

fondé sur ce principe incontestable, que<br />

toute accusation qu'il est permis d'intenter sans<br />

avoir besoin <strong>de</strong> preuve, et sans craindre une réponse<br />

, est pur ce<strong>la</strong> même une lâcheté et une calomnie?<br />

Je consens que, dans une république, il<br />

soit permis à tout citoyen d'en accuser un autre;<br />

oui, mais légalement, mais dans les tribunaux,<br />

mais <strong>de</strong> manière que l'accusé puisse se défendre.<br />

Et quelle réponse à <strong>la</strong> diffamation v aux injures, aux<br />

railleries, aux insinuations malignes et perfi<strong>de</strong>s<br />

qu'on peut accumuler dans une satire dramatique?<br />

Quand on parle tout seul aux hommes rassemblés,<br />

et qu'on ne veut que tes amuser aux dépens d'un<br />

particulier §n%a leur immole, a-t-on besoin <strong>de</strong><br />

dire <strong>la</strong> vérité pour le rendre odieux ou ridicule? Et<br />

n'est-ce pas là au contraire que te mensonge trouve<br />

tout naturellement sa p<strong>la</strong>ce? Ce principe , évi<strong>de</strong>nt<br />

par lui-même, n'est-il pas confirmé par les faits?<br />

<strong>la</strong> plupart <strong>de</strong> ceux qu'Aristophane déchirait avec<br />

tant <strong>de</strong> fureur n'étaient-ils ps en tout genre les<br />

hommes les plus estimables <strong>de</strong> leur temps? Écoutons,<br />

sur ce point, Cicéron, qui ne peut être suspect,<br />

et qui était aussi bon républicain qu'un autre.<br />

Comment prie-t-IÎ <strong>de</strong> l'ancienne comédie <strong>de</strong>s Grecs,<br />

<strong>de</strong> celle dont il est ici question?<br />

« Qui a-t-eUe éparpé? qui n'a-t-dle pas outragé? En­ violents sarcasmes. Mous verrons tout à l'heure<br />

core m ses traits ne fessent tombés que sur <strong>de</strong> mauvais dans fJmphiir^m <strong>de</strong> P<strong>la</strong>nte, comment Mercure<br />

dtojena, sur un Clé», » Hyperbolus9 un Cléophoat Fou parte <strong>de</strong> Jupiter et <strong>de</strong> lui-même. Nous avons vu f<br />

pourrait le souffrir ; mais qu'us homme tel que Périclès ; dans Euripi<strong>de</strong>, les dieux assez souvent exposés au<br />

après tant d'années <strong>de</strong> services ren<strong>de</strong>s à sou pays, dans<br />

ridicule; c'est bien pis encore dans Aristophane :<br />

<strong>la</strong> gocfte et dans <strong>la</strong> paii 9 soit insulté sur le théâtre, et<br />

et f quoi qu'on dise pour expliquer cet excès <strong>de</strong> to­<br />

inirei cSana <strong>de</strong>s vers satiriques, ce<strong>la</strong> est aussi indécent que<br />

si, postai nous, Revins ou CecUiiis avait osé injurier Caton<br />

le Censeur ou Stiprai rAftfcata. »<br />

lit<br />

Ce n 9 eat f» que je préten<strong>de</strong> éter au tàéâtre son<br />

influence sur l'esprit public, inioence étouffée sous<br />

le<strong>de</strong>spotisme, et par conséquent précieuse aux États<br />

libres. Je veux au contraire <strong>la</strong> rendre plus puissante<br />

et plus utile, en substituant à <strong>la</strong> diffamation personnelle,<br />

qui put menacer également le vice et<br />

<strong>la</strong> vertu{, et qui est d'ailleurs à <strong>la</strong> portée <strong>du</strong> plus<br />

médiocre écrivain, une espèce <strong>de</strong> censure dramatique,<br />

qui suppose à <strong>la</strong> fois et plus <strong>de</strong> talent et plus<br />

<strong>de</strong> morale, et qui est en même temps susceptible<br />

d'un plus grand effet. Je dis aux poètes : Peignez<br />

en caractères généraux les amis et les ennemis <strong>de</strong><br />

<strong>la</strong> chose publique : si vos caractères sont bien coups<br />

et bien prononcés, les indivi<strong>du</strong>s y rentreront<br />

d'eux-mêmes; ils viendront se p<strong>la</strong>cer comme <strong>de</strong>s<br />

têtes dans un cadre, et les spectateurs y mettront<br />

les noms; car 0 y a une conscience publique qui<br />

ne ment pas plus que celle <strong>de</strong>s indivi<strong>du</strong>s; et quand<br />

les hommes sont rassemblés f cette conscience parle<br />

si haut, qu'il n'y a point <strong>de</strong> pouvoir au mon<strong>de</strong> qui<br />

puisse lui imposer silence, pas même (et f histoire<br />

nous l'atteste), pas même les soldats <strong>de</strong> Néron.<br />

U faut, au reste, que cette vérité ait été bien<br />

généralement sentie, puisque, vers le temps d'Alexandre,<br />

et lorsque Athènes, avec moins <strong>de</strong> puissance,<br />

conservait encore, sa liberté, tous les vices<br />

<strong>de</strong> l'ancien théâtre Avant entièrement proscrit* .par<br />

l'ammadversion <strong>de</strong>s lois, qui ne permirent plus dans<br />

<strong>la</strong> comédie que <strong>de</strong>s noms et <strong>de</strong>s sujets <strong>de</strong> fiction.<br />

Ce fut celle-là que les Romains imitèrent f car il est<br />

à remarquer que le gouvernement <strong>de</strong> Rome, .qui<br />

<strong>la</strong>issa passer les satires <strong>de</strong> Lueilius., où .les citoyens<br />

les plus puissants, étaient attaqués, regarda cette<br />

liberté comme infiniment plus dangereuse sur le<br />

théâtre : il n'y permit jamais aucune satire personnelle<br />

9 et n'admit dans les jeta publics d'autre comédie<br />

que celte <strong>de</strong> pure invention, comme elle était<br />

alors chez les Grecs. Il ne paraît pas que <strong>la</strong> sévérité<br />

romaine se fût accommodée <strong>de</strong>s insolentes facéties<br />

d'Aristophane, ni quelles censeurs eussent souffert<br />

qu'un bateleur usurpât <strong>la</strong> plus redoutable <strong>de</strong> leurs<br />

fonctions, celte <strong>de</strong> noter les citoyens répréhensibtes.<br />

Un autre genre <strong>de</strong> licence qui fut commun au<br />

théâtre <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux, nations, ce fut d'y faire <strong>de</strong> leurs<br />

dieux l'objet <strong>de</strong>s plus sang<strong>la</strong>ntes railleries et <strong>de</strong>s plus<br />

lérance dans une ville comme Athènes, où les tribunaux<br />

<strong>mont</strong>raient une sévérité si terrible daas les

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