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la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal

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SIÈCLE DE LOUIS XIV. — POÉSIE.<br />

jours <strong>la</strong> même chose, et c'était ce qu'elle avait <strong>de</strong><br />

plus bril<strong>la</strong>nt, les Conti, les Vendôme! le <strong>du</strong>e <strong>de</strong><br />

Bourgogne, cedigne élève<strong>de</strong> Fénelon. M aisavosonsle,<br />

à l'honneur d'un sexe qui peut-être doit avoir<br />

plus <strong>de</strong> bienfaisance que le nôtre, puisqu'il est plus<br />

porté à <strong>la</strong> pitié ? ou qui <strong>du</strong> moins doit faire aimer<br />

datantage ses bienfaits ; puisqu'il a plus <strong>de</strong> délicatesse<br />

: ce furent <strong>de</strong>ui femmes à qui <strong>la</strong> Fontaine fut<br />

le plus re<strong>de</strong>vable, madame <strong>de</strong> <strong>la</strong> Sablière et madame<br />

d'Hervart. Elles furent ses véritables bienfaitrices,<br />

ou plutôt, s'il est permis <strong>de</strong> se servir d'un terme<br />

que <strong>la</strong> bonté peut ennoblir, parce qu'elle ennoblit<br />

tout, elles se irent ses gouvernantes; et c'est ce<br />

qu'il lui fal<strong>la</strong>it. La Fontaine n'avait pas besoin d'argent<br />

: Il ii<strong>la</strong>ll seulement qu'on le dispensât <strong>de</strong> songer<br />

à rien, si ce n'est à faire <strong>de</strong>s fables et à s'amuser.<br />

C'était là le plus grand bien qu'on pût lui faire,<br />

et c'est celui qu'il trouva chez elles. Peut-être n'y<br />

a-t-il que les femmes capables <strong>de</strong> cette manière d'obliger<br />

; elles savent aussi bien que nous, et quelquefois<br />

mieux, l'espèce <strong>de</strong> bonheur qui nous convient.<br />

Ainsi done t grâces à <strong>de</strong>ux femmes, <strong>la</strong> Fontaine fut<br />

aussi heureux qu'il pouvait l'être. Ce<strong>la</strong> fait p<strong>la</strong>isir<br />

à penser. 11M heureux I tant <strong>de</strong> grands hommes ne<br />

l'ont pas été 1 II le fut par l'amitié.<br />

Qu'un ami véritable ait eue douée ctoe !<br />

IS cheiche ?ot tanins as fond <strong>de</strong> votre «sur, etc.<br />

Je me p<strong>la</strong>is à croire qu'il songeait à madame <strong>de</strong><br />

<strong>la</strong> Sablière et à madame d'Hervart quand il It ces<br />

vers, qui suffiraient seuls pour nous prouver que<br />

cet homme, si indifférent et si apathique sur <strong>la</strong> plupart<br />

<strong>de</strong>s choses qui tourmentent les hommes, était<br />

bien loin <strong>de</strong> l'être pour Famille» Je sais qu'on a préten<strong>du</strong><br />

que les vers ne prouvent jamais rien que <strong>de</strong><br />

l'imagination ; mais je persiste à croire qu'il y en a<br />

que le coeur seul a pu dicter; et je le crois surtout<br />

quand je lis <strong>la</strong> Fontaine. H fut <strong>du</strong> très-petit nombre<br />

<strong>de</strong>s écrivains plus véritablement heureux par leurs<br />

ouvrages que par leurs succès. Sans être insensible<br />

à <strong>la</strong> gloire, il ne parait pas l'avoir trop recherchée;<br />

et d'ailleurs il n'était pas en lui d'avoir aucun désir<br />

assez vif pourque <strong>la</strong> privation pût <strong>de</strong>venir unepdne.<br />

Fiai» d'une mo<strong>de</strong>stie vraie, <strong>de</strong> celle qui n'est pas<br />

et ne peut pas être l'ignorance <strong>de</strong> nos avantages,<br />

mais <strong>la</strong> disposition à n'en affecter aucun sur autrui,<br />

on ne voit pis qu'il ait jamais eu d'ennemis.<br />

Et comment en aurait-il eu? Sa simplicité extrême<br />

<strong>de</strong>vait calmer jusqu'à l'envie. Comme il semb<strong>la</strong>it ne<br />

prétendre à rien 9 on lui pardonnait <strong>de</strong> mériter beaucoup.<br />

On sait que, dans un moment d'effusion,<br />

78?<br />

Louis 1.1V. La postérité, dans <strong>la</strong> distribution <strong>de</strong>s<br />

rangs, a para suivre l'avis <strong>de</strong> l'Académie plutôt que<br />

celui <strong>du</strong> monarque, et regar<strong>de</strong>r <strong>la</strong> Fontaine comme<br />

un homme d'une espèce plus rare que Boileau» Vivant<br />

dans le sein <strong>de</strong> l'amitié, assez bien né pur ne<br />

sentir que <strong>la</strong> douceur <strong>de</strong>s bienfaits sans en porter<br />

jamais le poids, libre <strong>de</strong> toute inquiétu<strong>de</strong>, ne connaissant<br />

ni l'ambition ni l'ennui, incapable d'éprouver<br />

le tourment <strong>de</strong> l'envie, et trop modéré, trop<br />

simple pour être en butte à ses attaques, il jouissait<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> nature et <strong>du</strong> p<strong>la</strong>isir <strong>de</strong> <strong>la</strong> peindre, <strong>du</strong> travail<br />

et <strong>du</strong> loisir; il jouissait <strong>de</strong> ses sentiments, <strong>de</strong> ses<br />

idées, et <strong>du</strong> p<strong>la</strong>isir <strong>de</strong> les répandre; enûn il était<br />

bien atec lui-même, et avait peu besoin <strong>de</strong>s autres.<br />

Tandis que ses années s'écou<strong>la</strong>ient sans qu'il les<br />

comptât, il voyait arriver <strong>la</strong> vieillesse et <strong>la</strong> mort<br />

sans les craitidre, comme on voit le soir d'tm beau<br />

jour, 11 fut porté dans le même sépulcre qui avait<br />

reçu Molière, comme si <strong>la</strong> <strong>de</strong>stinée qui avait rapproché<br />

leur naissance eût voulu réunir leur tombeau.<br />

SECTION u. — Vergfer et Sêseeé.<br />

Parmi <strong>la</strong> foule <strong>de</strong>s écrivains qui, nés dans le même<br />

siècle que <strong>la</strong> Fontaine, se sont exercés après lui<br />

dans le genre <strong>du</strong> conte (car les autres fabulistes<br />

sont <strong>de</strong> ce siècle ), on n'en peut distinguer que <strong>de</strong>ux ;<br />

Fêrgkr et Semcê. La Monnoye, Ducerceau, Saint-<br />

Gilles, Perrault, Desmarots, etc., sont trop médiocres<br />

pour avoir un rang. A peine dans les recueils<br />

que cherche à grossir l'in<strong>du</strong>lgence ou l'intérêt <strong>de</strong>s<br />

éditeurs, a-t-on pu rassembler un petit nombre <strong>de</strong><br />

pièces plus ou moins passables, et toutes sont fort<br />

peu <strong>de</strong> chose pour le fond comme pour le style. Vergier<br />

mérite une mention. Plusieurs <strong>de</strong> ses contes<br />

sont p<strong>la</strong>isamment imaginés, et narrés avec agrément<br />

et facilité. Le Rossignol, h Tonnerre, et trois ou<br />

quatre autres, ont mérité d'avoir une p<strong>la</strong>ce dans <strong>la</strong><br />

mémoire <strong>de</strong>s amateurs; et, quoique bien Soin <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

Fontaine, c'est beaucoup d'en avoir une après lui.<br />

Au reste, il rend hommage à sa supériorité, ainsi<br />

que Senecé : mais je ne sais pourquoi il se pique <strong>de</strong><br />

n'être ps son imitateur; car on aperçoit assez fréquemment<br />

chez lui l'envie <strong>de</strong> prendre le même ton<br />

et <strong>de</strong>s traces <strong>de</strong> réminiscence ; et c'est alors en effet<br />

qu'il a le plus <strong>de</strong> pieté. Mais il s'en faut bien qu'il<br />

ait cet enjouement soutenu, ces-tournures à <strong>la</strong> fois<br />

piquantes et naïves qui dans <strong>la</strong> Fontaine réveillent<br />

sans cesse le goût <strong>du</strong> lecteur. La longueur, <strong>la</strong> monotonie,<br />

le prosaïsme, se font sentir même dans ses<br />

meilleurs contes. 11 se tire assez bien <strong>de</strong> quelques<br />

Molière disait : NOM be®mx~e$pHU n'effacerwdpas détails, et en néglige une foule d'autres. En un mot,<br />

kbomà&mmê. Il obtint les suffrages <strong>de</strong> l'Académie il n'est pas assez poète, quoique souvent verstËta-<br />

avant Despréaux, qui obtint avant lui l'aveu <strong>de</strong> teur aisé et agréable. Le conte admet un air <strong>de</strong> né-<br />

LA BA1K. — TOUS 1.<br />

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