la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal
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474<br />
COURS DE LITTÉRàTUU.<br />
rei, fuofquH en scilt Instruit à temps, et fui, par _<br />
conséquent! joue un rôle peu algue <strong>de</strong> <strong>la</strong> royauté. '<br />
S® L'kv raiscmbïanee <strong>de</strong> <strong>la</strong> scène où don Sanche<br />
apporte son épée à Chimène, qui se persua<strong>de</strong> que<br />
Rodrigue' est mort» et persiste dans une méprise<br />
beaucoup trop prolongée, et dont un seul mot poufait<br />
<strong>la</strong> tirer. On Yoit que fauteur s'est servi <strong>de</strong> ce<br />
moyen forcé pour amener le désespoir <strong>de</strong> Chimène<br />
jusque l'aveu publie <strong>de</strong> son amour pour Rodrigue,<br />
et affaiblir ainsi <strong>la</strong> résistance qu'elle oppose au roi t<br />
qui veut l'unir à son amant. Mais il ne parait naa<br />
que ce ressort Mtnécessaire, et <strong>la</strong>passion <strong>de</strong> Chimène<br />
éltil suffisamment connue.<br />
4® La vio<strong>la</strong>tion fréquente <strong>de</strong> cette règle essentielle<br />
qui défend <strong>de</strong> <strong>la</strong>isser jamais <strong>la</strong> scène ? lit , et que les<br />
acteurs entrent et sortent sans se parler ou sans se<br />
•oir.<br />
i° La monotonie qui se fait sentir dans toutes les<br />
scènes entre Chimène et Rodrigue, où ce <strong>de</strong>rnier<br />
oAe continuellement <strong>de</strong> mourir. J 9 ignore si » dans<br />
le p<strong>la</strong>n <strong>de</strong> l'ouvrage, il était possible <strong>de</strong> faire autrement<br />
ï j f n<br />
afouerai aussi que Corneille a mis beaucoup<br />
d'esprit et d'adresse à varier, autant qu'il le pouf ait*<br />
«far les détails y cette uniformité <strong>de</strong> fond ; mais «nia<br />
elle se fait sentir f et Voltaire ajoute avec raison que<br />
Rodrigue offrant toujours sa fie à sa maîtresse a<br />
une tournure un peu trop romanesque.<br />
Voilà , m me semble 9 les frais défauts qu'on peut<br />
Mimer dans <strong>la</strong>con<strong>du</strong>ite <strong>du</strong> CM: ilssont assez gra?es.<br />
Remarquons pourtant qu'il n'y en a pas un qui soit<br />
capital, c'est-à-dire qui fesse crouler l'outrage par<br />
' les fon<strong>de</strong>ments, ou qui détruise l'intérêt ; car un rôle<br />
inutile peut être retranché t et nous en afons plus<br />
d'un exemple. Il est possible à toute force que le roi<br />
<strong>de</strong> Castille manque <strong>de</strong> pru<strong>de</strong>nce et <strong>de</strong> précaution 9 et<br />
que don Sanche, étourdi <strong>de</strong> l'emportement <strong>de</strong>'Chimène,<br />
n'ose point l'interrompre pur <strong>la</strong> détromper :<br />
ce sont <strong>de</strong>s invraisemb<strong>la</strong>nces, mais non pas <strong>de</strong>s absurdités.<br />
Cette distinction est très-importante, et<br />
nous aurons lieu <strong>de</strong> l'appliquer quand il son ques*<br />
tîon<strong>de</strong>Rodogune.<br />
11 résulte <strong>de</strong> cet exposé que k CM n'est pas une<br />
pièce régulièrement bonne. Mais estait vrai, comme<br />
le prétendait l'Académie, que le ntfet n'en $mipm<br />
ton? Un siècle et <strong>de</strong>mi <strong>de</strong> succès a répon<strong>du</strong> d'af ance<br />
à cette question ; mais il peut être utile <strong>de</strong> <strong>la</strong> discuter,<br />
pour l'intérêt <strong>de</strong> l'art et l'instruction <strong>de</strong>s<br />
amateurs.<br />
Pour condamner le sujet <strong>du</strong> CM, l'Académie se<br />
fon<strong>de</strong> rtur ce qu'il est wmmkmetU inwmUmbkék<br />
que GMmènc consente à épouser le ifaeurtrier <strong>de</strong> son<br />
père le même jour où il Fa tué. 11 y a, si j'ose le dire,<br />
une double erreur dans ce jugement. D'abord il<br />
9 est pas frai que CMmène contants «presseront<br />
à épouser Rodrigue. Le spectateur f oit bien qu'elle<br />
y consentira un jour, et il le fait pour qu'il emporte<br />
cette espérence, qui est <strong>la</strong> suite et le complément<br />
<strong>de</strong> fintérêt qu'il a pris à leur amour. Mais écoutons<br />
<strong>la</strong> <strong>de</strong>rnière réponse <strong>de</strong> Chimène au roi <strong>de</strong> Castille,<br />
qui n'a consenti au combat <strong>de</strong> Rodrigue contre don<br />
Sanche que sous <strong>la</strong> condition qu'elle épouserait le<br />
fainqueur. '<br />
nftratnmHM^iIm,<br />
Mon amour a pim, Je m pots m'en dédire.<br />
Rodrf£iie a <strong>de</strong>s wrtm que Je ne poli haïr,<br />
Et TOUS êtes mon roi, je TOUS êok obéir.<br />
Mata à quoi que déjà mm m'iyei eosdaiBfiéa 9<br />
Pourrez-tons à YôS yetu souffrir cet hyménés?<br />
Et quand <strong>de</strong> mon <strong>de</strong>voir v ouwonlez est effott »<br />
Toute ¥otre Justice en est-elle d'accord?<br />
§1 Rodrigue à l'État <strong>de</strong>vient al nécessaire ,<br />
De ce qu'il fait pour TOUS dois-Je être le salMr* ,<br />
Et me livrer moi-même au reproche étemel,<br />
P'avolf trempé mes mains dans le sang pataradf<br />
Je ne pis mieux faire que <strong>de</strong> joindre à ce paasage<br />
<strong>la</strong> note <strong>de</strong> Voltaire.<br />
« H me semble qne ces beaei'fêfg que dit Chmitee <strong>la</strong><br />
justifient entièrement. Mk n'épouse point Rodrigue; elle<br />
fait même <strong>de</strong>s re<strong>mont</strong>rances an raL J'avose que je ne conçois<br />
pas comment on a pu recenser d'indécence 9 an lieu<br />
<strong>de</strong>là p<strong>la</strong>indre et <strong>de</strong> rtdmtar. Elle dit I <strong>la</strong>férité an mi, Je<br />
dêk oèéir; mais elle ne dit point, J'obéirai* Le spectateur<br />
sent bien pourtant qu'elle obéira ; et c'est en eek9 m<br />
me semble, que consiste <strong>la</strong> beauté il désoamenl. »<br />
Cest ainû que le grand amenU <strong>de</strong> Corneille le<br />
défend contre l'Académie. SU est priais d'ajouter<br />
quelque chose à l'opinion d'un si grand maître, j'observerai<br />
que celui qui rédigea le jugement <strong>de</strong> f Académie<br />
se méprend dans les idées et dans les termes,<br />
quand il dit que le sujet <strong>du</strong> CM est son mariage avec<br />
Chimène. Ce mariage v dans le cas où il aurait lieu f<br />
serait le dénouaient, et non pas le sujet. Puisqu'il faut<br />
retenir à <strong>la</strong> rigueur <strong>de</strong>s termes techniques, le sujet<br />
<strong>de</strong> <strong>la</strong> pièce <strong>de</strong> Corneille est l'amour que Rodrigue et<br />
Chimène ont l'un pour l'autre," trafcrsé par <strong>la</strong> querelle<br />
<strong>de</strong> don Diègue et <strong>du</strong> comte, et par <strong>la</strong> mort <strong>de</strong><br />
ce <strong>de</strong>rnier, tué par le Cid. La situation fiolente <strong>de</strong><br />
Chimène entre son'amour et son <strong>de</strong>foir forme le<br />
nœud qui doit se trouver dans toute action dramatique<br />
; et ce nœud est en lui-même un <strong>de</strong>s plus beaui<br />
qu'on ait imaginés, indépendamment <strong>de</strong> <strong>la</strong> péripétie<br />
qui peut terminer <strong>la</strong> pièce. Cette péripétie, ou ehangement<br />
d'état, est <strong>la</strong> double fictoire <strong>de</strong> Rodrigue :<br />
fane sur les Maures, qui saufe l'État et met son<br />
libérateur à l'abri <strong>de</strong> k punition; l'autre sur don<br />
Sanche, <strong>la</strong>quelle, dans les règles <strong>de</strong> <strong>la</strong> chevalerie,<br />
doit satisfaire <strong>la</strong> vengeance <strong>de</strong> Chimène. Jusque-là<br />
le sujet est irréprochable dans tous les principes <strong>de</strong><br />
Fart,puisqu'il estoonformeà <strong>la</strong> nature et atu mœurs.