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la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal

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SIÈCLE DE LOUIS XIV. — POÉSIE.<br />

l'empereur contre le christianisme, et brise les idoles<br />

que portaient les prêtres; et <strong>la</strong> vengeance qu'en<br />

tira Félix , qui f après avoir inutilement employé les<br />

prières <strong>de</strong> Pauline pour ramener son gendre à <strong>la</strong> religion<br />

<strong>de</strong> son pays, lut obligé <strong>de</strong> le condamner à<br />

mort. Tout le reste appartient au poète.<br />

Sa fabley quoique en général bien conçue, est<br />

fondée sur quelques invraisemb<strong>la</strong>nces assez fortes,<br />

mais qui heureusement portent sur l'avant-scène<br />

plus que sur faction mime qui se passe sur le théâtre;<br />

et ce sont celles que le spectateur eicuse toujours<br />

le plus aisément. Sans doute il est peu vraisemb<strong>la</strong>ble<br />

que Sévère arrive jusque dans le pa<strong>la</strong>is<br />

<strong>du</strong> gouverneur d'Arménie, et jusque dans l'appartement<br />

<strong>de</strong> Pauline, sans savoir qu'elle vient d'être<br />

mariée à Polyeucte quinze jours auparavant, sans<br />

qu'un événement si récent, et qui f Intéresse plus<br />

que personne, soit parvenu jusqu'à lui. Il ne l'est<br />

pas non plus que l'empereur, après sa victoire sur<br />

les Perses, dont il lui est re<strong>de</strong>vable, l'envoie en Arménie,<br />

comme on le dit, pour faire unsacrilee au<br />

dieux. Il ne f est pas davantage que Félix, qui craint<br />

tant ses ressentiments et son crédit auprès <strong>de</strong> l'empereur,<br />

n'aille pas au-<strong>de</strong>vant <strong>de</strong> lui, et que Pauline<br />

le voie avant qu'il ait vu son père. Mais ces circonstances<br />

sont à peu près indifférentes à l'effet théâtral y<br />

parce qu'elles ne portent ni sur les caractères ni sur<br />

les situations. Le poète a déjà mis le spectateur<br />

dans l'attente <strong>de</strong> ce que pro<strong>du</strong>ira là vue <strong>de</strong> Sévère,<br />

qui est aimé <strong>de</strong> Pauline, et qui a voulu l'épouser :<br />

il n'examine ps trop comment ni pourquoi il arrive,<br />

parce qu'il est très-satisfait <strong>de</strong> le voir ; et il faut bien<br />

distinguer entre les foutes qui ne sont que pour les critiques<br />

et les juges <strong>de</strong> fart, et celles qui sont pour<br />

tout le mon<strong>de</strong>. Celles-ci inluent sur le sort <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

pièce ; les autres ne concernent que le plus ou moins<br />

<strong>de</strong> perfection.<br />

On convient unanimement que cet amour <strong>de</strong> Sévère<br />

et <strong>de</strong> Pauline forme un noeud intéressant 9 parce<br />

que le péril <strong>de</strong> Polyeucte les met tous <strong>de</strong>ux dans une<br />

situation respective, propreà déployer cette noblesse<br />

<strong>de</strong> sentiments qui nous attache aux personnages <strong>de</strong><br />

<strong>la</strong> tragédie, et nous fait partager <strong>de</strong>s infortunes<br />

qu'ils n'ont ps méritées. C'est une <strong>de</strong>s créations<br />

qui font le plus d'honneur au talent <strong>de</strong> Corneille et<br />

dont il n'avait trouvé le modèle nulle part. Polyeucte<br />

est sur le point d'être con<strong>du</strong>it à <strong>la</strong> mort s'il ne renonce<br />

point au christianisme. Les <strong>la</strong>rmes <strong>de</strong> Pauline<br />

s'ont pu rien sur lui. Elle s'adresse, pour le sauver,<br />

à celui même qui est le plus intéressé à cequ'il meure,<br />

à son rival, à celui qu'elle aime encore, et à qui elle<br />

Ta même avoué; à celui à qui Polyeucte même, en<br />

chrétien élevé au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> tous <strong>la</strong> objets tenres-<br />

491<br />

très, vient <strong>de</strong> <strong>la</strong> résigner en se préparant à mourir.<br />

Elle croit qu'un homme qui lui a pru digne d'elle<br />

doit être capable <strong>de</strong> ce trait <strong>de</strong> générosité,, et elle ne<br />

se trompe pas. C'étaient là <strong>de</strong>s beautés neuves et originales,<br />

dont personne n'avait donné Fidée. Cette<br />

délicatesse <strong>de</strong> sentiments ne se trouvait ni dans les<br />

théâtres anciens ni dans ceux <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>rnes; elle<br />

était dans l'âme .<strong>de</strong> Corneille.<br />

Vous êtes généreux, toyts-le Jusqu'au bout<br />

Mon père est en état <strong>de</strong> vous •eeot<strong>de</strong>r tout :<br />

Il ¥008 craint, et J'avance eneor cette parole,<br />

Que s'il perd mon époux , c'est à vous qu'il nouante.<br />

Sauva m malheureux t emptoye-i«M pour loi ;<br />

FaUtt-YOUi eu effort pour lu! servir d'appel.<br />

le sais que c'est beaucoup que ce que Je <strong>de</strong>man<strong>de</strong> ;<br />

Mais plus l'effort est grand t plus <strong>la</strong> gloire en est grenat»<br />

CoBservet os rival dont vous «tes Jaloux 9.<br />

Cest un trait <strong>de</strong> fer<strong>la</strong>tpi n'appartient qu'à vont;<br />

Et si ce s'est asses <strong>de</strong> votre renommée 9<br />

C'est beaucoup qu'use femme astiefoSs tant alliée,<br />

Et dont Farnour peut-être eaeor voua peut toucher,<br />

Dotve à votre grand cœur ce qu'elle a <strong>de</strong> plua cher,<br />

Soutenez-YOUS enfin que vous êtes Sévère.<br />

Adieu. Résolvez seul ce que vous <strong>de</strong>vez faire ;<br />

8i TOUS n'êtes pas tel que Je fore espérer,<br />

Pour vous priser eneor, Je le feu Ignorer.<br />

Le caractère <strong>de</strong> Polyeucte, quoique d'une espèce<br />

très-différente f n'est pas moins bien eonçu ni moins<br />

bien tracé. Il est plein <strong>de</strong> cet enthousiasme religieux<br />

nécessaire pour justifier ses violences, et- qui confient<br />

parfaitement à en chrétien qui court au martyre.<br />

L'hôtel <strong>de</strong> Rambouillet avait craint qu'il ne<br />

fût ridicule : il est théâtral, comme toute grtn<strong>de</strong><br />

passion ; et ce zèle exalté qui va chercher <strong>la</strong> mortf<br />

et que <strong>la</strong> religion ne propose nullement pour modèley<br />

mais regar<strong>de</strong> comme une exception que le martyre<br />

seul a consacrée, est une <strong>de</strong>s passions naturelles à<br />

l'homme. Elle a dans Polyeucte toute <strong>la</strong> chaleur<br />

qu'elle doit a?oir. S'il n'eût été qu'un homme persuadé<br />

et résigné, il eût pru froid; mais il est enthousiaste<br />

à l'excès; il entraîne. C'est là le cas où<br />

l'extrême est nécessaire $ et où <strong>la</strong> vraie mesure est <strong>de</strong><br />

n'en pas gar<strong>de</strong>r.<br />

La con<strong>du</strong>ite <strong>de</strong> Sévère répond à l'estime que Pauline<br />

lui a témoignée. Il s'emploie <strong>de</strong> tout son pouvoir<br />

auprès <strong>de</strong> Félix, pour l'engager à attendre <strong>du</strong><br />

moins <strong>de</strong>s ordres précis <strong>de</strong> l'empereur avant <strong>de</strong> se<br />

résoudre à faire périr son gendre , un homme considérable,<br />

qui <strong>de</strong>scend <strong>de</strong>s rois d'Arménie, et à qui<br />

tout le peuple s'intéresse au point qu'on craint une<br />

révolte en sa faveur. Cette <strong>de</strong>man<strong>de</strong> est si bien motivée<br />

, qu'il semble très-difficile que Félix s'y refait y<br />

et d'autant plus qu'il a <strong>la</strong> plus gran<strong>de</strong>'déférence pour<br />

Sévère, qu'il regar<strong>de</strong> comme l'arbitre <strong>de</strong> sa <strong>de</strong>stinée.<br />

Cependant il ne se rend point, et ordonne le supplice<br />

<strong>de</strong> Polyeucte, parce qu'il fal<strong>la</strong>it que <strong>la</strong> mort<br />

<strong>du</strong> «al martyr Ht le<strong>de</strong>noûment <strong>de</strong> <strong>la</strong> pièce. C'est

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