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la harpe. cours de littérature - Notes du mont Royal

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4M<br />

COUES DE LITTÉRATURE.<br />

ici qu'elle pècHe à <strong>la</strong> fois par l'intrigue et par lia<br />

caractère dégradé. Quels sont en effet les motifs<br />

que railleur prête à Félix? Sont-ils naturels? sontils<br />

suffisants? sont ils tragiques? Félii se met dans<br />

<strong>la</strong> tête que toutes les démarches <strong>de</strong> Sévère en fa?eur<br />

<strong>de</strong>Polyeecte ne sont qu'une feinte; que c'est un<br />

piège qu'on lui tend, afin <strong>de</strong> le perdre ensuite auprès<br />

<strong>de</strong> l'empereur, comme ayant contre venu à<br />

ses ordonnances. Mais d'abord, pour quoi Félix s'imagine-t-il<br />

que Sévère, qui n'a <strong>mont</strong>ré jusqu'ici<br />

qu'un caractère fort noble, s'abaisse jusqu'à cet<br />

indigne artifice dont il n'a nul besoin? De plus,<br />

comment peut-il croire qu'on lui fasse un crime<br />

capital d'avoir <strong>de</strong>mandé <strong>de</strong>s ordres pour faire mourir<br />

son gendre? Rien n'est moins naturel que ce<br />

raffinement <strong>de</strong> politique : il n'y a qu'à l'entendre<br />

pour «i être convaincu. Il ouvre ainsi le cinquième<br />

acte avec son confi<strong>de</strong>nt :<br />

âlMs, as-tu bleu vu <strong>la</strong> fourbe <strong>de</strong> Sévère?<br />

At-tu bien ¥u sa baise, et vois-tu ma misera?<br />

ALBiff.<br />

le ne ¥dls rien en <strong>la</strong>i qu'os rival généreux,<br />

Et ne vois rien en vous qu'us père rigoureux»<br />

FÉLIX.<br />

Que tu discernes mal le cœur d'avec In mime !<br />

Dans fâme il hait Félix, el dédaigne Pauline :<br />

Et §'11 ratifia Jadis f il estime aujourd'hui<br />

Les restes d'un rival trop indignes <strong>de</strong> lui.<br />

Il parle es sa faveur, il me prie t il menace,<br />

Et me perdra f dit-il, si Je ne lui fais grâee :<br />

Tranchant <strong>du</strong> généreui ? il croît m'épouvanter.<br />

L'artifice est trop lourd pour ne pas l'éventer i<br />

le sais <strong>de</strong>s gens <strong>de</strong> cour quelle est <strong>la</strong> politique t<br />

Feu connais mleus que lui <strong>la</strong> plus fime pratique.<br />

Cest en vain qu'il UmpiU, et feint d'être es fureur;<br />

Jeirots ce qui! prétend auprès <strong>de</strong> l'empereur :<br />

De ee qu'il me <strong>de</strong>man<strong>de</strong> il m'y ferait un crime;<br />

Épargnant son rival, je serais sa victime;<br />

Btt s'il avait affaire à quelque ma<strong>la</strong>droit,<br />

Le piège est Me» ten<strong>du</strong>, sans doute il le perdrolL<br />

Mais un vieux courtisan est un peu moins eré<strong>du</strong>le ;<br />

11 voit quand on le joue et quand on dissimule;<br />

El moi s fen mi tant tm <strong>de</strong> fautes fegfmç&M,<br />

Qu'à lui-même au besoin j'en ferais <strong>de</strong>s leçons.<br />

Ces fers réunissent tous les genres <strong>de</strong> fautes.<br />

Comparons-les à ceux que l'on fient d'entendre <strong>de</strong><br />

Pauline, et affirmons , comme une chose constante,<br />

que le style <strong>de</strong> Corneille, quoi qu'on en ait dit, est<br />

ordinairement analogue à ses idées. Quand il pense<br />

bien, il s'exprime bien. Quand sa pensée est mauvaise<br />

9 sa diction Test encore plus. Toute cette scène<br />

fait f otr dans Félix un homme aussi bas que ma<strong>la</strong>droit<br />

: bas, parce qu'il ne se résout à faire périr<br />

son gendre que dans <strong>la</strong> crainte <strong>de</strong> perdre sa p<strong>la</strong>ce;<br />

ma<strong>la</strong>droit, parce qu'il se persua<strong>de</strong> sans raison tout<br />

- le contraire <strong>de</strong>là vérité. Il est impossible <strong>de</strong> ne pas<br />

coaeevoir <strong>du</strong> mépris pour un homme qui fa commettre<br />

une cruauté par <strong>de</strong>s tues si petites, et qui<br />

se pique d'état fin lorsqu'il se trompe si lour<strong>de</strong>ment.<br />

Ce caractère n'est pas digne <strong>de</strong> <strong>la</strong> tragédie, et le <strong>la</strong>ngage<br />

ne Test pas non plus. On a pu ?oir <strong>la</strong> même chose<br />

dans Maxime, et l'on peet faire <strong>la</strong> même épreuve<br />

sur toutes les pièces <strong>de</strong> Corneille. C'est Pâme, a dit<br />

un ancien, qui nous fait éloquents ipectm est quoé<br />

disertumfacit. II l'est toutes les fols que son âme<br />

l'inspire bien. Quand son esprit s'égare, il ne l'est<br />

plus.<br />

Je ne prétends pas relever toutes les fautes <strong>du</strong><br />

morceau que je viens <strong>de</strong> citer : elles sont assez sensibles.<br />

Mais il y a dans les termes mêmes, à huit<br />

vers <strong>de</strong> distance, une contradiction choquante, qui<br />

prouve combien l'auteur mettait <strong>de</strong> négligence dans<br />

cette partie <strong>de</strong> sa composition.<br />

L'artillee est trop lourd pour ne pas revente?.<br />

Et un moment après :<br />

Le piép eil bien ten<strong>du</strong>....<br />

Si fsriifiœ est trop lourd, comment k piège<br />

est-U bien ten<strong>du</strong> f C'est une étrange inadvertance.<br />

Voltaire, que Ton accuse <strong>de</strong> relever trop minutieusement<br />

<strong>de</strong> petites fautes, n'a pourtant rien dit <strong>de</strong><br />

celle-là; et il en a passé bien d'autres.<br />

Mais en supposant que les motifs <strong>de</strong> Félix fussent<br />

naturels, sont-ils suffisants ? Mon. Il manque ici<br />

cette proportion nécessaire entre les moyens et l'action.<br />

Il s'agit <strong>de</strong> savoir si Félix fera mourir un <strong>de</strong>s<br />

personnages les plus importants <strong>de</strong> <strong>la</strong> pièce, s'il enverra<br />

son gendre à Féchafaud. Il y répugne, car on<br />

ne le peint ni cruel ni fanatique. Quel est donc le<br />

contre-fioids qui ie fera pencher vers <strong>la</strong> rigueur? Il<br />

n'y en a point d'autre que le calcul erroné d'une<br />

très-mauvaise et très-lâche politique, et <strong>la</strong> possibilité<br />

très-incertaine <strong>de</strong> perdre le gouvernement d'Arménie.<br />

Ce n'est pas là un ressort suffisant pour <strong>la</strong><br />

tragédie v où il faut toujours que chaque personnage<br />

ait un <strong>de</strong>gré d'intérêt proportionnel, re<strong>la</strong>tivement<br />

à l'intérêt général.<br />

Si les motifs <strong>de</strong> Félix ne sont ni* naturels ni suffisants,<br />

ils ne sont pas plus tragiques. Un personnage<br />

qui f dans tout le <strong>cours</strong> d'une pièce, p<strong>la</strong>cé entre<br />

sa fille et son gendre, dont il faut envoyer l'un à<br />

k mort et <strong>la</strong>isser l'autre dans le <strong>de</strong>uil, ne s'occupe<br />

que <strong>de</strong> savoir s'il sera plus ou moins grand seigneur,<br />

ne peut inspirer aucun <strong>de</strong>s sentiments que<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>la</strong> tragédie. Quand il dit,<br />

Polyeucte «I ici l'appui <strong>de</strong> ma famille ;<br />

Mali st, par son trépas, tmmtre épousait ma i!Se9<br />

J'acquerrais bien par là <strong>de</strong> plus puissants appuis,<br />

Qui me mettraient plus haut cent fois que Je ne suit ;<br />

qnand il parle ainsi, il paraît vil : et lorsqu'il dit,<br />

le tais <strong>de</strong>s oeartisAHs <strong>la</strong> pim-jlm pratiqué....<br />

Et moi, J'en es tamt PU <strong>de</strong> §§mêe$ lmfaç@m,<br />

Qu'à lut-meme au feeeofa feu ferais <strong>de</strong>s leçons,

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