Espaces coloniaux et société polynésienne de Wallis-Futuna ... - IRD

'·'coprah-makers" lorsque la traite du coprah devint générale dans beaucoup d'îles du
Pacifique, les indigènes finirent, après une période d'accoutumance, par s'interroger sur
les variations et manipulations plus ou moins sensibles des cours du coprah. Suspectant
les méthodes commerciales des commerçants et comprenant mal le mécanisme de
formation des cours et leurs fluctuations, les Océaniens habitués à la parole donnée et à
un certain caractère immuable des transactions, remirent en cause le système de traite1.
Ainsi dès 1864, une usine de fabrication d'huile de coco située à Fidji dut arrêter
son activité, les autochtones refusant d'accepter les cours fixés. En 1872, à Tonga,
lorsque la société Godeffroy baissa le prix du coprah, les Tongiens lui opposèrent le
boycott des approvisionnements. En 1883, aux îles Gilbert, un commerçant anglais se
plaignit qu'un chef local avait décidé de fixer lui-même le prix d'achat du coprah et
interdit toute vente à un prix inférieur! Si ces mouvements suivis d'autres ne remirent pas
en cause la main-mise commerciale des grandes compagnies et des "traders" des îles, ils
les obligèrent à négocier, marchander, mieux respecter les cours des produits achetés ou
vendus. La concentration du commerce du coprah, dans les mains de quelques grands
groupes à partir de 1900, au lieu de décourager les insulaires par la puissance et la
richesse affichée par ces compagnies, semble au contraire les avoir incités à jouer un rôle
actif dans la commercialisation du coprah et pour leur propre intérêt. Il est à noter que
souvent ces intérêts rejoignaient ceux des petits traders soumis eux aussi aux conditions
des compagnies qu'ils ravitaillaient en coprah et où ils achetaient les produits de traite. De
ces conditions objectives de concordance d'intérêt devaient naître quelques tentatives
intéressantes des insulaires visant à créer un "nouveau commerce" contrôlé directement
par eux. Ainsi naquit en 1890 aux îles Cook, le mouvement "AU" (conseil des chefs) qui
refusa que les ventes de produits locaux se tiennent dans les comptoirs européens et
exigea qu'elles se fassent sur les marchés locaux publics. Des commerçants accusés de
vendre trop cher des produits de médiocre qualité furent même expulsés. Il apparaît que
1 cf. Couper E. D. : Protest movements and proto-coopératives in the Pacifie islands. u..s.. vol. 77. n?
3: 263-274 - Sept. 1968
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