Espaces coloniaux et société polynésienne de Wallis-Futuna ... - IRD

Ce programme de reboisement s'était heurté à partir de 1975 à quelques difficultés
non négligeables. Il est vite apparu que la population comprenait mal l'intérêt des
reboisements puis que très vite la méfiance a engendré une sourde opposition, concrétisée
par des actes malveillants envers les employés de la reforestation, puis des feux de
plantations. Des enquêtes faites et des plaintes reçues par les chefs politiques ou les élus,
il ressortit que les habitants des villages proches du Toafa craignaient qu'à terme, les
reboisements impliquent l'accaparement de terrains jusqu'ici à usage collectif, par
l'Administration1... De plus, les reboisements servirent aussi de prétextes aux personnes
opposées à l'Administration soit pour des raisons politiques, soit pour des raisons de
personne... Enfin le pin des Caraïbes déplaît parfois car il s'agit d'une essence étrangère
inconnue jusqu'ici...
Si aujourd'hui une prise de conscience des méfaits irréversibles du déboisement
existe chez beaucoup de Wallisiens, on ne peut dire qu'il en résulte une véritable politique
dans le temps, des pouvoirs publics locaux. En effet, les choix initiaux retenus sont
techniquement contestés par les dérracteurs- : la production de bois espérée ne serait pas
d'une qualité et d'un prix de revient permettant son exportation... On ne pourra même pas
obtenir des planches pour menuiserie, seulement des poteaux à usage local... Enfin, le
droit coutumier local s'oppose à toute règlementation des Eaux et Forêts concernant les
terrains reboisés.
Aussi les 10.000 hectares de Toafa en extension régulière du fait de l'érosion ne
semblent pas devoir bénéficier avant une prise de conscience encore problématique, d'un
reboisement accéléré qui pourtant s'impose à Wallis et à Futuna maintenant, et
nécessiterait des crédits importants étalés sur une longue période'',
La hantise de la dépossession foncière est fortement ancrée en Océanie, s'appuyant sur les vieux
souvenirs coloniaux et les tentatives plus ou moins réussies d'accaparement foncier par des étrangers...
qui plante un arbre exerce un droit de propriété implicite sur l'arbre donc le terrain qui le porte...
2 cf.: Rapport de Mission à Wallis-Futuna du chef du Service Forestier de Polynésie française. 1981.
3 En 1986, le programme de reboisement du Service Rural touchait 25 ha et 30 ()()() plants avaient été
distribués à des particuliers selon le rapport 1986 de l'I.E.O.M.
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