Espaces coloniaux et société polynésienne de Wallis-Futuna ... - IRD

CHAPITRE V : LE PACIFIQUE MIROIR OU LES
TRANSFERTS DE LA PSYCHE EUROPEENNE
L'ouverture du Pacifique par l'Europe peut être considérée comme une longue
quête d'un merveilleux "autre" réalisé souvent par des navigateurs érudits, curieux et
enthousiastes qui par leurs relations de voyage surent captiver les médias de l'époque, les
salons cultivés. Par leur expression littéraire, voire musicale, ils surent créer dans le
grand public une fervente réceptivité d'autant plus passionnée que les péripéties
incertaines des voyages de découvertes qui se poursuivaient, l'émulation qu'elle
entretenait et la diversité des points de vue qui en résultaient, créaient l'attrait de nouveaux
mystères exotiques, et exacerbaient les spéculations les plus débridées. Cet état d'esprit
propre à l'Europe de la seconde moitié du 18ème siècle - du Siècle des lumières - devait
véhiculer les visions du Pacifique qui s'illustraient dans les mobiles propres aux
Européens en Océanie1. Que retenir d'essentiel de ce vaste et complexe mouvement de
curiosité intellectuelle d'abord-.
SECTION 1 - DE L'ENGOUEMENT AU DESENCHANTEMENT
L'Europe vit à travers les yeux des découvreurs un monde nouveau qui rejoignait
d'une part ses idéaux anciens et proposait d'autre part les préalables d'un nouveau type
de rapports humains. Ce faisant, elle récupérait ainsi le Pacifique dans le vaste et riche
mouvement des idées propres au Grand Siècle et marqué par un puissant goût naturaliste
(cf. La Nouvelle-Héloïse), un souci très net de transformation des rapports humains
selon les principes du droit naturel (cf. Rousseau, Voltaire et les Encyclopédistes). Enfin,
à cause ou en réaction (?) à un certain libertinisme littéraire de l'époque (Abbé Prévôt,
1 cf. Smith B. : European vision and the South Pacifie. 1768-1850. Oxford Paper books. Londres, 1960
2 Les instructions officielles données à La Pérouse témoignent des préoccupations alors propres à l'élite
européenne sur le "monde austral".
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