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Ecriture encyclopédique – écriture romanesque - Gustave Flaubert ...

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CHAPITRE III.FLAUBERT ET L’INSPIRATION GOETHEENNEterne, celle de Nanette, en décrivant ce que celle-ci voit. Le point d’interrogation quiconclut la phrase décrivant le comportement du médecin est également intéressant carcelle-ci contient un mélange de style direct et indirect libre – mélange de la voix du narrateuret de celle du médecin. L’indication temporelle « aujourd’hui » ne peut être attribuéequ’au médecin. Le narrateur se retire ainsi pour présenter au premier plan le pointde vue de ses personnages, tout en laissant un certain flou sur la question de savoir quiparle.Il est intéressant de constater que dans ses notes sur les Affinités électives, Madamede Staël reproche également à Goethe de manquer de morale à travers son impartialitéet son absence de « sentiment religieux » :Les passions existent, les vertus existent ; il y a des gens qui assurent qu’ilfaut combattre les unes par les autres ; il y en a d’autres qui prétendent quecela ne se peut pas ; voyez et jugez, semble dire l’écrivain qui raconte, avecimpartialité, les arguments que le sort peut donner pour et contre chaquemanière de voir.On aurait tort cependant de se figurer que ce scepticisme soit inspiré par latendance matérialiste du dix-huitième siècle ; les opinions de Goethe ontbien plus de profondeur, mais elles ne donnent pas plus de consolations àl’âme. On aperçoit dans ses écrits une philosophie dédaigneuse qui dit aubien comme au mal : - cela doit être, puisque cela est ; - un esprit prodigieuxqui domine toutes les autres facultés, et se lasse du talent même, commeayant quelque chose de trop involontaire et de trop partial ; enfin, ce quimanque surtout à ce roman, c’est un sentiment religieux, ferme et positif :les principaux personnages sont plus accessibles à la superstition qu’à lacroyance ; et l’on sent que dans leur cœur la religion, comme l’amour, n’estque l’effet des circonstances et pourrait varier avec elles. 1Malgré la portée négative de cette critique, il me semble que Mme de Staël a vujuste lorsqu’elle souligne que Goethe ne veut pas juger, que le bien et le mal existent eneffet en même temps pour lui.Sa virtuosité narrative a de toute évidence dû impressionner <strong>Flaubert</strong>. Le jeu del’autorité – qui sait quoi – et de l’énonciation – qui dit quoi – est poussé à l’extrêmedans Bouvard et Pécuchet qui pose ainsi la question les limites du <strong>romanesque</strong>. Un autreaspect de cette discussion sur l’impassibilité est le parallèle dressé par plusieurs critiquesentre les reproches et le débat « moral » de la fin du XVIII e siècle autour du suicidede Werther, et le procès pour outrage aux bonnes mœurs et à la religion de l’auteur1 de Staël-Holstein, De l'Allemagne, t. 2, p. 47-48.195

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