12.07.2015 Views

Ecriture encyclopédique – écriture romanesque - Gustave Flaubert ...

Ecriture encyclopédique – écriture romanesque - Gustave Flaubert ...

Ecriture encyclopédique – écriture romanesque - Gustave Flaubert ...

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

CHAPITRE V. LES FIGURES DU SUJET CONNAISSANTDans les galeries du Muséum, ils passèrent avec ébahissement devant lesquadrupèdes empaillés, avec plaisir devant les papillons, avec indifférencedevant les métaux ; les fossiles les firent rêver, la conchyliologie les ennuya.Ils examinèrent les serres-chaudes par les vitres, et frémirent en songeantque tous ces feuillages distillaient des poisons. Ce qu’ils admirèrent ducèdre, c’est qu’on l’eût rapporté dans un chapeau.Ils s’efforcèrent au Louvre de s’enthousiasmer pour Raphaël. A la grandebibliothèque ils auraient voulu connaître le nombre exact des volumes. (BP,p. 61)De façon particulièrement significative, le narrateur décrit le parcours de Bouvardet Pécuchet en soulignant les émotions qu’ils ressentent face à ce qu’ils voient etentendent. Cet épisode de formation laisse sur eux une empreinte bien réelle qui transformedurablement à la fois leur vision d’eux-mêmes et leur engagement en société, etqui les amènera en particulier à déménager en province. Mais cette empreinte tient davantageà la dimension spectaculaire de l’institution qu’au contenu même des savoirs.Bouvard et Pécuchet se laissent porter voire transporter par le décorum, l’apparence,l’anecdote voire le futile. Celui-ci suscite en eux à la fois ébahissement, surprise, maiségalement imagination et curiosité pour le lointain. A la fin de ce parcours parisien, lamoindre rencontre est pour eux un appel au voyage (romantique) et à la découverte :« Quand une malle-poste les croisait dans les rues, ils sentaient le besoin de partir avecelle. Le quai aux Fleurs les faisait soupirer pour la campagne. » (BP, p. 61-62) En celaégalement les deux protagonistes ne sont pas seulement ingénus voire naïfs. C’est ladimension humaine (trop humaine), voire incarnée de leur vision du monde et du savoirque le texte fait ressortir. Bouvard et Pécuchet sont, profondément, deux corps qui viventdans leur chair l’expérience du savoir, sans qu’elle atteigne au même degré leurintelligence.La volonté de savoir, voire le Bildungstrieb, est donc chez Bouvard et Pécuchetune passion complète, dont la force se manifeste dans la manière dont elle lève certainesde leurs inhibitions. <strong>Flaubert</strong> les décrit comme des personnages sans gêne, par exemplelorsqu’ils s’imposent à un cours d’arabe du Collège de France :Une fois, ils entrèrent au cours d’arabe du Collège de France ; et le professeurfut étonné de voir ces deux inconnus qui tâchaient de prendre des notes.(BP, p. 61)339

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!