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Ecriture encyclopédique – écriture romanesque - Gustave Flaubert ...

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CHAPITRE V. LES FIGURES DU SUJET CONNAISSANTBouvard et Pécuchet : élèves et enseignants comiquesSi Ottilie est une élève atypique pour la manière étrange dont elle met en œuvreson apprentissage de future éducatrice, Bouvard et Pécuchet le sont d’abord à cause deleur âge – ils ont 47 ans au moment où ils commencent leur aventure éducative, bienplus que les héros du roman de formation classique. Leur manière d’apprendre, c’est-àdireleur manière d’aborder les institutions et les objets du savoir – les livres –, frappeégalement par sa naïveté et son absence de méthode. Je ne reviendrai pas sur les discussionssur l’intelligence des deux personnages 1 , mais je voudrais plutôt montrer que leurséchecs successifs illustrent le fait que le savoir n’est pas à l’abri des luttes de pouvoir etdes idées reçues et par là mettent en question un système pédagogique et éducatif nationalqui en est encore à ses débuts. <strong>Flaubert</strong> met en scène des caricatures d’enseignants etd’élèves. Il se moque du discours pédagogique avec un humour beaucoup plus noir queGoethe. Parce qu’il s’appuie sur un discours sur la décadence et la dégénérescence, ilapparaît en fin de compte plus pessimiste 2 . Je me concentrerai d’abord sur le premierchapitre du roman, dans lequel <strong>Flaubert</strong> décrit la rencontre des deux personnages, leurcaractère et leur intérêt pour les sciences et le savoir. C’est aussi le chapitre du départ dela ville pour la campagne. On peut le comparer ensuite au chapitre X, le dernier du roman,resté inachevé, chapitre de la pédagogie et l’enseignement. Bouvard et Pécuchetre-tracent avec leurs « enfants/élèves » -Victor et Victorine - le parcours du savoir qu’ilsont déjà derrière eux. Le roman fait ainsi faire au lecteur un nouveau tour de roue, quiaboutit fatalement à la même conclusion : l’enseignement s’avère finalement aussi désastreuxque l’apprentissage. A qui la faute ?Si Bouvard et Pécuchet sont loin d’être des érudits « classiques » comme l’est leFaust de Goethe, ils aiment les études. Mais leur rapport au savoir tel qu’il est mis enscène par le narrateur au premier chapitre apparaît presque ridicule tant il est plongédans l’accessoire et le prosaïque. La découverte de leur intérêt commun pour la science1 Cf. sur cette question de la bêtise : Dord-Crouslé, "Présentation", ici p. 28 sq. ; Leclerc, Y., "<strong>Flaubert</strong>, le"bonheur" dans la bêtise", Magazine littéraire, 389, 2000, pp. 52-55, p. 7 sq.; Thomas, J.-J., "Poétique dela "Bêtise". Le dictionnaire des idées recues", <strong>Flaubert</strong> et le comble de l'art. Nouvelles recherches surBouvard et Pécuchet, Paris, SEDES/CDU, 1981, pp. 129-138. Cf. aussi le séminaire de l’ITEM2009/2010 et 2010/2011 sur « L’empire de la bêtise » : http://www.item.ens.fr/index.php?id=13699. Etpour une défense : Borges, "Défense de Bouvard et Pécuchet".2 Cf. à propos de ce sentiment de décadence déjà au milieu du XIXe siècle : Raudot, C.-M., De la décadencede la France, Paris, Amyot, 1850.335

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