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La Dialectique aristotélicienne, les principes clés des Topiques ...

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Yvan Pelletier<br />

On peut aller jusqu’à préférer, à l’imitation de Socrate, agir comme<br />

demandeur afin de diminuer le risque de passer pour sophiste, surtout aux<br />

yeux de gens inexpérimentés. Mais ce serait aller trop loin, et ne pas comprendre<br />

la fonction du répondeur, que pousser la répugnance au point d’en<br />

faire par nature une intruse dans la dialectique. C’est tout fausser que de ne<br />

pas la voir comme aussi indispensable que celle de demandeur. Pour Aubenque,<br />

par exemple, « la dialectique n’est pas tant, en effet, l’art d'interroger et<br />

de répondre, que l’art d’interroger… Car pour répondre il faut savoir, et la<br />

dialectique ne prétend nous fournir aucun savoir » 355. En arriver là précisément<br />

en s’appuyant sur ce passage <strong>des</strong> Réfutations sophistiques constitue un<br />

contresens frappant du contexte de ce passage ; car Aristote insiste justement<br />

là sur la préparation du répondeur, aussi impérative à son avis que celle du<br />

demandeur. Aristote donne la ressemblance avec la sophistique et l’exemple<br />

de Socrate comme <strong>des</strong> motifs plus forts pour la bonne préparation du répondeur<br />

: l’auditeur, ou le répondeur lui-même en action, peut confondre ce rôle<br />

et son intention avec ceux du sophiste. Il faudra en effet beaucoup de discernement<br />

au répondeur, pour qu’il se tienne dans <strong>les</strong> justes limites de cette<br />

prétention à savoir (› ∞˘) qui semble le caractériser. De quoi est-il juge ?<br />

De la vérité de ce qui lui est proposé ? Absolument pas, et il ne le prétend pas<br />

non plus. Et le demandeur, s’il est correct, ne lui demande pas ce type de<br />

garantie. Le répondeur ne garantit que le caractère endoxal de la proposition.<br />

D’où lui vient son autorité pour ce faire ? D’aucun savoir particulier autre que<br />

son expérience rationnelle plus ou moins grande. Il garantit en somme que…<br />

la proposition sonne bien à son oreille logique. Lui demander plus,<br />

c’est abuser de lui. Mais se passer de cette garantie, ce serait sombrer dans le<br />

parfait arbitraire. Qui ne saisit pas cette distinction s’expose, comme plus haut<br />

Aubenque, comme ci-après Berti, à faire du dialecticien, réduit au seul<br />

demandeur, un agresseur aveugle et sans discernement, et du répondeur un<br />

pur accident de la dialectique, simple contamination de la sophistique.<br />

Le devoir de celui qui demande est justement la critique, et celui qui<br />

demande ne prétend pas savoir, mais, en tant qu’il demande, il admet ne pas<br />

savoir ; inversement, le devoir de qui répond est la partie restante de la dialec-<br />

355Aubenque, Le Problème de l’être…, 275, note 2.<br />

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