23.06.2013 Views

La Dialectique aristotélicienne, les principes clés des Topiques ...

La Dialectique aristotélicienne, les principes clés des Topiques ...

La Dialectique aristotélicienne, les principes clés des Topiques ...

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

Yvan Pelletier<br />

Viano reconnaît bien quelque chose en ce sens : « Rien, en fait, ne garantit<br />

que <strong>les</strong> opinions, organisées à travers <strong>les</strong> lois du syllogisme, se présentent<br />

comme un tout cohérent. » 402 Mais il faut aller plus loin : il est certain, et<br />

même inéluctable, que, sur n’importe quel sujet, <strong>les</strong> énoncés endoxaux constituent<br />

un magma dont <strong>les</strong> éléments ont un rapport très inégal à la vérité. Dès<br />

qu’il devient entendu que le faux, même de manière limitée, peut avoir droit<br />

de cité, l’incohérence est inévitable : le faux ne peut pas s’accorder toujours<br />

avec le vrai. De plus, du faux tout s’ensuit : tantôt <strong>des</strong> conclusions vraies,<br />

tantôt <strong>des</strong> fausses. Cette incohérence, déjà inévitable au niveau <strong>des</strong> <strong>principes</strong><br />

premiers et immédiats, se transmet et se multiplie infiniment au niveau <strong>des</strong><br />

conclusions. Aussi se trouve-t-on forcément, en évoluant sur une base<br />

endoxale, dans la situation que n’importe quelle position possède dans le<br />

fonds endoxal <strong>des</strong> prémisses pour l’établir et d’autres pour la détruire. Il est<br />

toujours loisible de produire <strong>des</strong> arguments pour et <strong>des</strong> arguments contre.<br />

C’est pourquoi Aristote ne regarde pas comme un résultat de la seule argumentation<br />

le fait que l’on en arrive à opter pour l’affirmative ou la négative<br />

du problème quand, à la fin, on fait le choix de l’opinion à tenir. Dans ces<br />

conditions, en effet, l’argumentation se présente plutôt comme le processus de<br />

maturation d’une intuition finale, attribuée par Aristote, on l’a vu, à un flair<br />

issu d’heureuses dispositions naturel<strong>les</strong> 403. On saisit aussi un autre motif pour<br />

lequel ce processus se réalise plus facilement dans un dialogue. Il est plus<br />

naturel d’effectuer à deux cette nécessaire production et évaluation <strong>des</strong><br />

arguments pour et contre la supposition (Õı) examinée. Il est tellement<br />

tentant de préférer l’une <strong>des</strong> contradictoires, déjà avant l’examen, et de s’y<br />

identifier, que cela devient difficile de produire, à soi tout seul, <strong>les</strong> arguments<br />

dans <strong>les</strong> deux sens : on argumente mal contre soi. À deux, on est moins vite<br />

satisfait 404.<br />

402Viano, ibid.<br />

403Voir Top., VIII, 14, 163b12-16. Voir aussi supra, 41, note 115.<br />

404« Alors que la pensée solitaire risque de s’égarer ou de se satisfaire trop vite, <strong>les</strong> objections<br />

de l’interlocuteur sont, en même temps qu’un moyen de contrôle, un “aiguillon”, qui<br />

pousse le discours en avant. » (Aubenque, <strong>La</strong> <strong>Dialectique</strong> chez Aristote, 11)<br />

146

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!