La Dialectique aristotélicienne, les principes clés des Topiques ...

La dialectique aristotélicienne
instrument ne paraît donc pas déplacé en matière rationnelle 1050. La difficulté
principale, c’est son application à une opération ; cela concorde peu avec les
phantasmes attachés à l’idée d’instrument, même chez les meilleurs disciples
d’Aristote. Ce n’est jamais l’opération en elle-même que les aristotéliciens
nomment instrument, mais son œuvre, dans la mesure où elle procure à
l’opération de la raison ce grâce à quoi elle s’effectue. On ne nomme pas
instrument l’acte de définir, mais la définition que produit cet acte et par
laquelle la raison se représente distinctement l’essence de l’objet appréhendé.
En conséquence, prié de désigner l’instrument du dialecticien, un aristotélicien
ne pensera pas spontanément à la sélection du matériau probable. Lui
viendra à l’esprit, plutôt, le syllogisme ou l’induction, œuvres logiques produites
dans l’acte le plus propre du dialecticien.
Bref, le mot instrument déroute le lecteur des Topiques. Du moins le
dérouterait-il si son attention n’était pas émoussée par l’habitude que son
oreille, sinon son entendement, a développée d’entendre ce mot à cette place.
Sans qu’il y prenne trop garde, le mot instrument le jette sur une fausse piste ;
car on tend à l’entendre tout de suite en un sens dérivé. Ainsi qu’on l’a vu,
l’instrument, c’est d’abord l’opération de reconnaître l’endoxe. C’est ensuite
le talent, la faculté que la raison a d’effectuer cette opération, comme dialectique
nomme le don d’exploiter l’endoxe dans l’investigation d’un problème
1051. Ce sera ensuite, mais seulement par extension, l’art qui parfait ce
talent et tous les conseils pour le guider. Ainsi, Gardeil peut, sans autre maladresse
que d’y voir un premier sens, présenter l’instrument dialectique
comme l’ensemble des conseils par quoi Aristote guide le choix des propositions
: « Dans l’esprit d’Aristote, les instruments sont des règles de découverte.
» 1052
Si l’on veut identifier la méthodologie des instruments — qui est une description
de la manière dont ils atteignent leur but — avec les instruments eux-
1050« La logique … procure à la connaissance spéculative ses instruments, à savoir syllogismes,
définitions et autres choses du genre requises dans les sciences spéculatives. »
(S. Thomas, In Boetii de Trin., q. 5, a. 1, ad 2)
1051Voir supra, le chapitre sur La dialectique.
1052Gardeil, 24.
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