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La Dialectique aristotélicienne, les principes clés des Topiques ...

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Yvan Pelletier<br />

boration. C’est là, comme nous le verrons, toute la fin de cette partie de la<br />

dialectique qu’Aristote appelle probatoire () et dont il traite plus<br />

spécialement au huitième livre. Il y a normalement — ce qui, malheureusement,<br />

ne signifie pas concrètement le plus souvent, étant donné la rareté <strong>des</strong><br />

interlocuteurs bien disposés 462 — collaboration entre le demandeur et le<br />

répondeur, et conflit seulement entre <strong>les</strong> positions examinées et <strong>les</strong> arguments<br />

proposés.<br />

[Le désir de victoire sur un interlocuteur] ne représente pas l’agressivité qui<br />

fait la mentalité propre du dialecticien. C’est un autre type d’agressivité qui<br />

mérite ce nom… celle d’opinions ou d’énoncés agressifs l’un à l’autre du fait<br />

de leur opposition rationnelle. Deux énoncés opposés s’excluent l’un l’autre.<br />

Adhérer à l'un, c’est rejeter l’autre. Ainsi, la contradictoire agresse en quelque<br />

sorte la contradictoire, du fait qu’en obtenant pour elle-même l’adhésion de la<br />

raison, elle enlève à l’autre toute place dans la raison et la détruit…<br />

Se demander si le syllogisme dialectique est naturellement une attaque 463 ,<br />

c’est se demander non pas s’il est un procédé de victoire sur l’autre interlocuteur,<br />

mais plutôt s’il conclut en fonction de l’exclusion de la contradictoire…<br />

Aussi devra-t-on dire naturellement agressif le comportement dialectique et<br />

appeler toute son activité une attaque si son raisonnement est normalement<br />

une réfutation, c’est-à-dire s’il vise toujours ultimement à détruire et déloger<br />

une position adoptée antérieurement et non pas seulement à établir une con-<br />

462« Les <strong>Topiques</strong> d’Aristote sont un ramassis de bonnes intentions et de situations<br />

idéa<strong>les</strong>, une République de la logique. » (Gérald Allard, boutade inédite)<br />

463J’ai proposé ailleurs — voir versions primitives de L’Articulation de la dialectique<br />

<strong>aristotélicienne</strong> et Pour une définition claire et nette du lieu dialectique — de rendre<br />

Û par agression. Le mot a l’avantage de connoter une certaine gratuité dans<br />

l’attaque, une absence de provocation au départ ; or, justement, le dialecticien attaque ainsi,<br />

sans que son interlocuteur ni sa position ne l’y ait provoqué, simplement parce que c’est sa<br />

façon de faire, son modus vivendi. De plus, agression offre davantage de soup<strong>les</strong>se dans <strong>les</strong><br />

dérivés ; avec attaque, par exemple, on ne dispose pas de correspondants pour agressif,<br />

agressivité. Mais, au bout du compte, il est difficile de faire abstraction d’un aspect nécessairement<br />

péjoratif, d’une perversion foncière attachée à l’agression. Or, cette perversion,<br />

qui, sans doute, caractérise bien le sophiste, est étrangère au dialecticien comme tel, qui<br />

n’attaque pas par méchanceté, mais parce que c’est la voie naturelle pour légitimer l’opinion.<br />

Aussi ai-je finalement privilégié attaque pour rendre Û, comme nom<br />

technique du syllogisme dialectique. Je n’y ai d’ailleurs pas vraiment perdu en soup<strong>les</strong>se de<br />

vocabulaire ; en effet, rien n’empêche, dans ce contexte, d’utiliser <strong>les</strong> adjectif et substantif<br />

agressif et agressivité, que le français exempte de la méchanceté automatique convoyée par<br />

agression.<br />

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