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La Dialectique aristotélicienne, les principes clés des Topiques ...

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Yvan Pelletier<br />

On peut concevoir qu’une personne mène à elle seule toute l’enquête<br />

dialectique. Le fait est même fréquent. Mais l’enquête reste alors virtuellement<br />

un dialogue, puisque la raison doit encore à ce moment satisfaire aux<br />

deux offices et, tour à tour, se demander et se répondre à elle-même. Ce n’est<br />

pas pour rien que tant d’auteurs se sont complu à se représenter la réflexion<br />

personnelle comme un dialogue intérieur 362. Même extérieurement d’ailleurs,<br />

ce dialogue peut, tout en satisfaisant à la <strong>des</strong>cription et aux règ<strong>les</strong> <strong>aristotélicienne</strong>s,<br />

prendre <strong>des</strong> formes très variées, assez éloignées de la succession<br />

stéréotypée questions-réponses que se représentent trop souvent <strong>les</strong> lecteurs<br />

<strong>des</strong> <strong>Topiques</strong>, à la manière de cette ponctuation de Û, de Ì , de Ì-<br />

, de Ì Ó “ et de –, qui paraît le seul office du répondeur<br />

dans certains dialogues platoniciens, à tel point que l’un de mes étudiants, à<br />

l’humour féroce, s’est plu à l’appeler… l’acquiesceur d’office. De fait, Aristote<br />

parle un peu comme s’il en était toujours ainsi. Cela est indispensable<br />

pour arriver à écrire un traité : il lui faut décrire <strong>les</strong> opérations et en fournir <strong>les</strong><br />

règ<strong>les</strong> d’abord en visant la situation la plus simple. Tout transmetteur d’art<br />

procède ainsi. Platon fait un peu de même, dans la mesure où ses dialogues<br />

cherchent à enseigner comment discuter, et non à filmer la réalité vivante<br />

d’un dialogue naturel. Mais un dialogue vivant se présente très différemment<br />

en surface. Radicalement, il y a toujours <strong>des</strong> deman<strong>des</strong>, qui constituent <strong>des</strong><br />

suggestions de propositions, et <strong>des</strong> réponses, qui représentent l’appréciation<br />

de ces suggestions au point de vue endoxal. Mais, sur le terrain, qui<br />

demande ? qui répond ? et comment le font-ils ? Dans une infinie variété. Le<br />

répondeur du début devient vite le demandeur, puis de nouveau change de<br />

rôle 363 ; le demandeur assiste le répondeur dans son rôle et vice versa 364 ; le<br />

362« Hence the self-evidence to Plato of the definition of thinking as the dialogue of the<br />

soul with itself… (Tht. 189E ; Sph. 263E) » (Robinson, Plato's Earlier Dialectic, 83)<br />

363Voir Protagoras, 338c-d : « Si Protagoras ne veut pas répondre, qu’il demande et moi<br />

je répondrai, et je tenterai de lui montrer comment je dis qu’il faut que le répondeur<br />

réponde. Et après que j’aurai répondu autant qu’il voudra demander, qu’à son tour pour moi<br />

il soutienne la position de pareille façon (Ì ” Ú ı ÕÔ ¡Û).»<br />

364Voir Sophiste, 241d ; Protagoras, 330c. Le demandeur impose souvent au répondeur<br />

la position pour laquelle opter initialement : « Que qui aime est plus malade que qui n’aime<br />

pas, voilà ce que je te donnerai à supposer (˘ ÕÛ). » (Phèdre, 236b)<br />

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