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La Dialectique aristotélicienne, les principes clés des Topiques ...

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Yvan Pelletier<br />

sa juste valeur ce nom d’épichérème ou, plus simplement, d’attaque, on aura<br />

besoin de le débarrasser de toute la croûte sémantique dont l’ont affublé <strong>les</strong><br />

logiciens subséquents, faute de bien concevoir la source de ce caractère naturellement<br />

agressif de l’activité dialectique. Le choix de ce mot est certes un<br />

témoin éloquent du fait qu’Aristote voit naturellement l’argumentation du<br />

dialecticien comme un assaut 454. <strong>La</strong> dialectique est donc, dirai-je, de nature<br />

agressive. Cela explique aussi pourquoi <strong>les</strong> rapports concrets entre<br />

dialecticiens peuvent facilement devenir tendus. Chacun, dans la mesure de<br />

ses dispositions rationnel<strong>les</strong> et mora<strong>les</strong> imparfaites, est facilement porté à<br />

s’identifier à la position qu’il propose ou à l’attaque qu’il mène contre la<br />

position proposée par son interlocuteur. Le dialogue risque alors de dégénérer<br />

en un combat entre <strong>les</strong> interlocuteurs plutôt qu’entre <strong>les</strong> positions ; quant à la<br />

discussion, elle risque de vouloir secouer et détruire l’interlocuteur plutôt que<br />

la position examinée 455. Le risque est assez grand, et l’on y succombe avec<br />

assez de fréquence pour que l’on ait souvent cru que, dans son essence même,<br />

la dialectique serait d’abord appétit de victoire et ce, jusque dans la<br />

conception que s’en fait Aristote.<br />

français, à moins qu’il ne soit assez érudit pour se rappeler qu’on nommait ainsi naguère un<br />

argument dont on se donnait la peine d’appuyer chaque prémisse sur une argumentation<br />

antérieure ; mais cela même constitue une fausse piste dans le contexte présent — avec ce<br />

dont il s’agit dans tous <strong>les</strong> endroits où il est question d’argumenter ou d’attaquer ou de<br />

combattre ?<br />

454 C’est d’ailleurs Û — avec ses co-dérivés : Û, ,<br />

Ãı — qui revient, dans <strong>les</strong> <strong>Topiques</strong>, chaque fois qu’il s'agit de nommer l’argument<br />

dialectique. L’occasion s’en présente surtout aux deux premiers livres, car, par la<br />

suite, au lieu de parler de l’argument à constituer, Aristote parle plus prochainement <strong>des</strong><br />

lois sur <strong>les</strong>quel<strong>les</strong> cet argument s’appuie. Les rares exceptions se comprennent fort bien :<br />

par exemple, ı (110b5, 112a5) sera employé de préférence, lorsqu’il s’agit d’un type<br />

d’argument propre à établir plutôt qu’à détruire ; et Ô (112a25), quand il est<br />

question d’argumenter en un sens puis dans l’autre.<br />

455Comparer <strong>les</strong> différences ultimes de la définition du sophiste à laquelle Platon conduit<br />

l’Étranger : « … contraignant par <strong>des</strong> raisons brèves son interlocuteur à se contredire luimême<br />

» (Sophiste, 268b). Elle convient en tout point au dialecticien d’Aristote, si ce n’est<br />

l’insistance à prendre comme cible l’interlocuteur plutôt que la position. Même cette différence<br />

s’estompe, comme on le verra, en contexte probatoire. Voir le chapitre suivant : <strong>La</strong><br />

Probatoire.<br />

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