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La Dialectique aristotélicienne, les principes clés des Topiques ...

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Yvan Pelletier<br />

spontanément l’acte de savoir par un parfait, ∂, et donc par le fait d’avoir<br />

vu 81. <strong>La</strong> même inspiration intervient en français, d’ailleurs, où l’on appelle<br />

raisonner — acte, donc, le plus caractéristique de la raison —, celui d’ajouter<br />

une connaissance à une connaissance, d’exploiter une connaissance antérieure<br />

pour arriver à savoir davantage. Car, contraste frappant et qui reste encore une<br />

certitude constante chez Aristote, l’homme n’apprend quoi que ce soit qu’en<br />

l’enracinant dans ce qu’il savait déjà antérieurement. Pas une science, pas un<br />

art, pas un genre de connaissance intellectuelle n’y échappent 82.<br />

Aristote est conscient du besoin d’un point de départ absolu à ce processus.<br />

Mais il ne le met pas en <strong>des</strong> <strong>principes</strong> innés ; il lui paraîtrait absurde<br />

que la connaissance la plus sûre, celle dont toute autre dépend, se trouve<br />

naturellement en l’homme sans que celui-ci n’en ait conscience, comme sera<br />

tenté de le croire Leibniz 83. En lieu et place, Aristote observe chez l’homme<br />

une faculté prochainement habilitée à l’acquisition de ces <strong>principes</strong> et la<br />

nourrit directement dans l’observation sensible, plutôt qu’en une connaissance<br />

intellectuelle antérieure plus parfaite.<br />

C’est donc manifeste : <strong>les</strong> <strong>principes</strong> ne peuvent ni nous être connus de manière<br />

innée, ni nous devenir connus à la suite d'une ignorance totale et en l’ab-<br />

81« Le nom d’agent ... se rattache à ∂ plus qu’à ∞, c’est “celui qui sait pour<br />

avoir vu ou appris”. » (Chantraine, Dictionnaire étymologique de la langue grecque, 779)<br />

82« Toute transmission et toute acquisition de connaissance rationnelle procède d’une<br />

connaissance préexistante. Cela devient évident, à <strong>les</strong> considérer toutes : <strong>les</strong> sciences<br />

mathématiques et chacun <strong>des</strong> autres arts se présentent de cette façon. » (Sec. Anal., I, 1,<br />

71a1-4)<br />

83Pour le croire, d’ailleurs, il devra, au moins pour <strong>les</strong> notions tout à fait premières,<br />

comme cel<strong>les</strong> d’être, d’unité, de substance et autres semblab<strong>les</strong>, faire fi de la distinction<br />

entre l’entitatif et l’intentionnel, comme le remarque judicieusement Louis Brunet<br />

(Origines et originalité de la logique de Leibniz, 89) à propos du passage suivant ; il suffit<br />

que l’on soit pour posséder la notion d’être, et ainsi de suite. « Peut-on nier qu’il y ait<br />

beaucoup d’inné en notre esprit, puisque nous sommes pour ainsi dire innés à nousmêmes<br />

? et qu’il y a en nous-mêmes : être, unité, substance, durée, changement, action,<br />

perception, plaisir, et mille autres objets de nos idées intellectuel<strong>les</strong> ? et ces mêmes objets<br />

étant immédiats à notre entendement et toujours présents (quoiqu’ils ne sauraient être<br />

toujours aperçus à cause de nos distractions et besoins), pourquoi s’étonner que nous disons<br />

que ces idées nous sont innées avec tout ce qui en dépend ? » (Avant-propos <strong>des</strong> « Nouveaux<br />

Essais », dans Opera Philosophica, 196)<br />

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