Docteur en Sciences de gestion Mention ... - Tour du Valat

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Partie 2 – Ancrage dans des cas concrets d’actions environnementalesleur conservation et à leur gestion durable (cf. mandat Encadré 5.1). Ce positionnement estcommun aux dispositifs de suivis et d’évaluation de l’environnement, basé sur le postulatsuivant : les décideurs ont besoin de plus d’informations concernant l’état de l’environnement, lesmécanismes de dégradation ou les potentiels de protection, pour prendre de meilleures décisions.Cette justification est celle de la Liste Rouge de l’UICN : « Governments, the private sector, multilateralagencies responsible for natural resource use, and environmental treaties all need access to the latest information onbiodiversity when making environment-related decisions. Information about species and ecosystems is essential formoving towards more sustainable use of our natural resources » (iucn.org, 2010 154 ). De même, la mission duUNEP-WCMC est de mettre les connaissances sur la biodiversité au centre des décisions : « Toevaluate and highlight the many values of biodiversity and put authoritative biodiversity knowledge at the centre ofdecision-making » (unep-wcmc.org, 2010 155 ). Les exemples sont si nombreux qu’ils pourraient faireforce de loi. Mais au regard des échecs comme celui de la prise en charge réelle de la biodiversitéà la hauteur des objectifs 2010 fixés en 2002 à Johannesburg 156 , l’apport de connaissances poursatisfaire les besoins des décideurs semble être un fondement de l’action quelque peu hasardeuxet il est peu probable que les porteurs des dispositifs à l’interface science-politique le prennentpour argent comptant. Mais alors pourquoi participent-ils à la diffusion de ce discours ?Cherchent-ils à s’en convaincre parce que cela justifie leur action, ou parce qu’ils espèrentprofondément que cela le devienne ? Utilisent-ils ce raisonnement pour son pouvoir d’évocation :une formule simple qui résume ces actions souvent très complexes et qui permet d’être identifiédans une communauté du suivi-évaluation de la nature et de l’environnement ? Ou encore, celarelève-t-il simplement des règles de la négociation internationale sur les questionsd’environnement, dans lesquelles les organisations qui cherchent à influencer les agendaspolitiques ont un intérêt à se présenter comme coopératives avec les décideurs, et à ne passystématiquement rendre lisible leur véritable mode d’action ?Ce discours convenu selon lequel plus d’informations entraîneraient de meilleures décisions esttrès bien connu des auteurs s’intéressant aux relations entre sciences et politiques dans le champde l’environnement et de la protection de la nature. Ils l’appellent la vision naïve, « naive vision »(van den Hove, 2007 ; Sarewitz & Pielke, 2007 ; Jorstad & Skogen, 2010). Sarewitz et Pielkeexpliquent en effet que plus d’informations ne mènent pas spontanément à de meilleuresdécisions pour plusieurs raisons potentielles : le manque d’adéquation entre les informations et154 http://iucn.org/about/work/programmes/species/red_list/about_the_red_list/, Page last updated: August 27,2009.155 http://www.unep-wcmc.org/aboutWCMC/, site web visité en mars 2010.156 Les « objectifs 2010 » sont les objectifs par lesquels, en 2002, la plupart des États de la planète réunis au sommetmondial sur le développement durable à Johannesburg s’étaient engagés à réduire significativement le rythme globald’érosion de la biodiversité d’ici 2010.244
Chapitre 5 – La construction d’un dispositif d’interface science - politiqueles besoins des utilisateurs ; leurs marges de manœuvre limitées dans les contextes de décisions etla résistance naturelle des processus de décision bureaucratiques aux changements ; leur manquede fiabilité ; leur confrontation avec d’autres valeurs et intérêts ; le manque de communication.Sans compter qu’elles produisent autant de nouvelles incertitudes qu’elles n’en résolvent (LePrestre & Taravella, 2009). Surtout, cette vision naïve dissimule le fait que les « meilleuresdécisions » renvoient à un système de valeurs – correspondant dans notre cas à un objectifnormatif de conservation de la nature – qui ne peut être éludé pour comprendre les mécanismesqui sous-tendent les relations science-politique. Dans ce sens, S. van den Hove (2007) et E.Jorstad et K. Skogen (2010) s’accordent à dire que la vision naïve ne permet pas d’éclairer lesinteractions entre sciences et politiques ni les stratégies mises en œuvre par les acteurs en jeu.Derrière cette formule qui fait croire l’existence d’un processus naturel de l’amélioration de ladécision, c’est tout une série de stratégies pour mettre en forme les informations, les porter et lesadresser, que les acteurs responsables de ces dispositifs mettent en œuvre. La clarification de cesobjectifs et théories d’action implicites de l’OZHM est au centre de notre analyse. C’est en outreun préalable pour ensuite d’envisager les impacts potentiels du dispositif et sa contribution à laconservation des ZHM.Revenons alors en premier lieu au contexte d’émergence de l’OZMH. La création de l’initiativeMedWet en 1992 devait structurer et amplifier l’action en faveur des ZHM, en lui donnant uncadre institutionnel et en favorisant l’activation d’un réseau. L’initiative a joué ce rôle, mais s’estaffaiblie au fil des années et n’a bientôt plus été capable d’apporter une structuration et unsoutien de l’action en faveur des ZHM. Quand le directeur de la TdV justifie le besoin d’unOZHM par l’absence de vision commune et la déplorable sous valorisation des travaux, sapréoccupation est de redonner de la substance à l’initiative méditerranéenne (com.pers., 2009).Pour cela, il pense à un observatoire comme outil pour dresser un bilan des ZHM, de leur état, deleurs tendances et des actions réalisées en leur faveur, permettant d’alimenter la réflexion et lesorientations portées par MedWet. Selon cette théorie d’action méditerranéenne, l’initiativepourrait se renouveler dans son rôle de cadrage, d’animation et de soutien de l’action pour lesZHM (stratégie orienté vers le haut) grâce au contenu que l’observatoire lui apporterait.Parallèlement, le fait même de construire l’OZHM relance le réseau par le bas. L’enjeu majeur del’OZHM – dispositif à l’interface science-politique – est donc de réalimenter et renforcer lagouvernance des ZH en Méditerranée, à travers la mise à disposition d’informations tangibles surl’état et les tendances de ces écosystèmes et par l’analyse des mécanismes de dégradation.245
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