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E. Perret : récits algériens 1830-1848 - Accueil

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— 311 —<br />

sion a été imminente. Sous la domination de Carthage<br />

comme sous celle de Rome et de Constantinople, le Saharien<br />

a toujours livré assaut continu, éternel, aux régions telliennes.<br />

A l'époque des guerres puniques, nous voyons les<br />

Romains s'en faire un auxiliaire. César le lance contre<br />

Caton et Pompée ; plus tard encore Bélisaire le jette sur<br />

les Vandales, Okba sur les armées grecques. En un mot,<br />

le saharien est toujours l'ennemi, rêvant du Tell et de ses<br />

beaux pâturages, mettant à l'heure des troubles et des insurrections<br />

son rêve à exécution.<br />

Si ce nomade était le maître absolu du Tell, il en ferait<br />

vite un désert. Qu'est l'agriculture pour lui? Une cause de<br />

ruine, car ses troupeaux ont besoin d'aller partout et ne<br />

peuvent rien ménager. Le droit de propriété est donc incompatible<br />

avec sa vie pastorale, car qui a un chanip<br />

propre s'y attache et le défend.<br />

Heureusement, chaque année le nomade laisse quelque<br />

répit au laboureur tellien. En hiver, il est forcé de gagner<br />

le sud, d'abord parce que ni lui ni ses troupeaux ne pourraient<br />

supporter les froids du Tell, ensuite parce que les pâturages<br />

sont épuisés. Il s'enfonce dans le Sah'ra dès octobre<br />

et ne reparaît qu'en avril. Ces migrations sont aussi fatales,<br />

aussi forcées, que celles des oiseaux voyageurs, et grâce à<br />

elles nous tenons en respect les tribus sahariennes : nous<br />

avons mille peines à concevoir les motifs qui ont poussé<br />

l'autorité militaire en Algérie à occuper des postes inutiles<br />

au milieu du désert tels que Tuggurth, Ouargla, Aïn-Sefra.<br />

Le Saharien qu'on forcerait à rester l'hiver dans le Tell périrait<br />

de froid; si on le contraignait à rester l'été dans le<br />

Sah'ra, il mourrait de chaleur, et aussi de faim et de soif,<br />

car sources et pâturages sont littéralement desséchés par<br />

les premiers soleils d'avril et de mai.<br />

Aussi le nomade lutte pour le Tell comme l'homme lutte<br />

pour l'existence. De force ou de gré, il a toujours fallu l'y<br />

admettre. Quand d s'est senti assez fort pour le prendre,<br />

il l'a conquis et gardé, pour être plus sûr d'y être admis.

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