E. Perret : récits algériens 1830-1848 - Accueil

— 369 —
L'étonnement,
de l'émir, sa
sinon l'émotion, se peignit sur
physionomie reprit cet aspect
le visage
de douceur
qui trompait tant de gens, le tigre
bout. Il baisa l'enfant sur le front et les
furent emmenés. Il égrenait son chapelet
fit place au mara-
quinze prisonniers
d'un air placide,
quelques minutes après, pendant que ses nègres fidèles
nettoyaient à grande eau le sol de la tente, couvert de sang.
Les pauvres Coulouglis eurent ainsi d'abord la vie sauve;
mais, traînés
un à un.
de prison en prison, ils moururent de misère
Un caïd français des Oued-Souhid, dans la vallée du
Chéliff, se signala par un acte de dévouement admirable.
Un des lieutenants de l'émir, Ben-Klifa, sorti du Dahra,était
tombé sur la tribu à l'improviste, et, suivi de quelques
cavaliers, s'était avancé droit à la tente du caïd, le
sommant, le pistolet au poing, de forcer les siens à se
rendre sans bruit pour ne pas attirer l'attention d'une petite
colonne campée dans le voisinage sous les ordres du commandant
Canrobert.
traire de toutes ses
L'intrépide chef indigène
forces : Aux armes ! Les
crie au con-
Ouled-Souhid
engagèrent aussitôt
mourait criblé de
le combat pendant
coups, et le bruit
que le d'Assas
de la fusillade
arabe
amenai
immédiatement nos soldats.
« Jamais, dit amèrement Abd-el-Kader, un de mes caïds
ne se dévouera ainsi à ma cause. »
Les grands chefs arabes, toujours fiers de leur origine
aristocratique, méprisaient tout bas ce marabout, fils de
marabout, cet
les commander
homme de peu
; ils marchaient
de naissance
avec lui
qui prétendait
en haine de la
France, sans avoir pour leur maître ni affection ni respect.
Quant
de sa cruauté
aux tribus, elles
et de sa dureté
ne l'aimaient
qui le portait
guère à cause
à ruiner celles
au milieu desquelles il passait avec son embryon d'armée.
Lorsqu'il paraissait sur leur territoire, si le cheval de gada (1)
(1) Lechevalde gadaest celuiqui est conduitdevantquelqu'un,soit en signedo
soumission,soiten signeduvassclage.
2.Ï