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E. Perret : récits algériens 1830-1848 - Accueil

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leur apportaient en maugréant d'innombrables plats de<br />

couscouss, des écuelles sans nombre remplies de ragoûts<br />

de toute sorte, des moutons rôtis en entier et embrochés<br />

dans des perches gigantesques. Chaque chef mangeait le premier<br />

et replaçant sur le plat les morceaux qu'il avait rongés<br />

à moitié, remettait le tout à son entourage qui mangeait<br />

de même ainsi que les serviteurs ; puis les plats étaient<br />

donnés aux nègres ; le même manège se répétait jusqu'aux<br />

Arabes du menu peuple, et les os étaient jetés aux chiens.<br />

Contrairement aux usages musulmans, Abd-el-Kader, à<br />

cette époque, n'avait qu'une femme, Zohra, sa cousine germaine,<br />

dont il eut quatre enfants. Jamais, au temps de sa<br />

puissance, il ne se séparait d'elle ni de sa mère, qu'il adorait<br />

toutes deux, sans verser des larmes ; pendant son absence,<br />

ces deux modestes créatures tissaient de la laine<br />

pour confectionner ses vêtements et les leurs, absolument<br />

comme les femmes arabes de condition ordinaire.<br />

Il avait pour les femmes, en général, une certaine considération<br />

et, sous ce rapport, n'était pas arabe. La situation<br />

de ces malheureuses ilotes dont nous avons déjà dépeint<br />

nous-même la triste condition, lui inspirait un respect mêlé<br />

de commisération. Quoique très orthodoxe, certaine maxime<br />

du Coran, qui autorise les musulmans à battre les femmes<br />

désobéissantes, ne lui convenait pas. Rigoureux sur le chapitre<br />

des moeurs, à la moindre plainte d'un père, il faisait<br />

d'autorité procéder au mariage par le cadi et en sa présence.<br />

L'émir parlait sa langue nationale avec une rare pureté<br />

d'accent. Cela tenait évidemment à de longues lectures dans<br />

le Coran qui est bien réellement le prototype de la langue<br />

arabe et dont le texte est tellement invariable que la transposition<br />

d'une seule lettre par un copiste est considérée<br />

comme une véritable impiété. L'arabe parlé par les habitants<br />

de l'Afrique du Nord, Algériens, Marocains et Tunisiens,<br />

n'est pas plus l'idiome du pays de la Mecque que le<br />

patois des paysans auvergnats n'est le français parlé en

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