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BELLE-ROSE

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comme de gigantesques boas. M. de Luxembourg avait le commandement<br />

du corps d’armée qui touchait à la frontière.<br />

L’ordre et l’activité régnaient partout. L’illustre capitaine qui<br />

devait un jour succéder au prince de Condé et au vicomte de<br />

Turenne, et soutenir l’honneur du drapeau français, avait établi<br />

parmi les troupes une discipline exacte et rigide. Insouciant,<br />

irrégulier, voluptueux dans sa vie privée, il apportait aux choses<br />

de la guerre une promptitude, une fermeté, une action, qui imposaient<br />

le respect et l’obéissance. Son coup d’œil avait cette<br />

netteté et cette certitude qui font les grands généraux ; sa bravoure<br />

égalait celle du prince de Condé, auprès de qui il avait,<br />

sous le nom de M. de Bouteville, fait ses premières armes. S’il<br />

n’avait pas encore accompli ces grandes choses et gagné ces furieuses<br />

batailles qui devaient porter si haut sa réputation, on<br />

avait vu, dès les premières campagnes, le germe de ses brillantes<br />

qualités. Il avait tout ensemble l’estime des chefs et la<br />

confiance du soldat. À mesure qu’il avançait dans la direction de<br />

Marchienne, la vue des lieux rappelait à Belle-Rose l’un des épisodes<br />

les plus terribles de sa vie, si souvent agitée. Il vit du haut<br />

d’un monticule le petit pavillon où Geneviève lui avait fait de si<br />

tristes adieux ; et, sur un pli du rivage que baignait la Sambre,<br />

l’endroit lugubre où M. de Villebrais avait poussé vers le ciel ses<br />

trois cris d’agonie. Le vieux saule était toujours là, trempant sa<br />

tête échevelée dans l’eau. Quand Belle-Rose atteignit Marchienne-le-Pont,<br />

il trouva la résidence de M. de Luxembourg<br />

entourée d’officiers et d’aides de camp. Le jour venait de naître,<br />

et ses premiers rayons avaient réveillé la grande ruche où bourdonnaient<br />

vingt mille soldats. Des chevaux tout sellés piaffaient<br />

autour des piquets. M. de Luxembourg expédiait des dépêches.<br />

Il fallait avoir un ordre pour arriver jusqu’à lui. Belle-Rose mit<br />

pied à terre ; la Déroute n’avait pas assez de tous ses yeux pour<br />

regarder les parcs d’artillerie, les tentes, les faisceaux d’armes ;<br />

mille exclamations folles partaient de ses lèvres. Il venait de reconnaître<br />

trois ou quatre sous-officiers qui avaient servi dans le<br />

régiment de La Ferté, et trépignait d’impatience. Au moment<br />

où, n’y tenant plus, il allait frapper sur l’épaule de l’un d’eux, un<br />

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