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ariosita et artificiosita dans les madrigaux de giovanni de macque

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une condamnation sans appel <strong>de</strong> la polyphonie par <strong>les</strong> membres <strong>de</strong> la camerata fiorentina.<br />

Il s’agissait évi<strong>de</strong>mment là d’une vision partiale, voire partisane, mais il est tout à fait<br />

probable que pour la plupart <strong>de</strong>s contemporains, la question <strong>de</strong> l’expression du texte<br />

poétique ne se posait effectivement pas uniquement en termes d’eff<strong>et</strong> auditif sur le<br />

spectateur. D’une part, la gran<strong>de</strong> majorité du répertoire madriga<strong>les</strong>que fut écrite pour être<br />

chantée a libro, sur le livre, <strong>et</strong> non pour être écoutée par un auditoire 455 ; d’autre part<br />

l’homme <strong>de</strong> la Renaissance, comme l’a montré Michel Foucault 456 , était habitué à<br />

raisonner <strong>dans</strong> un vaste entrelacs <strong>de</strong> signes régi par l´analogie <strong>et</strong> la ressemblance, <strong>dans</strong><br />

lequel le système <strong>de</strong> correspondance musico-poétique du madrigal trouve parfaitement sa<br />

place, sa logique <strong>et</strong> sa cohérence. L’analogie ou, pour reprendre un terme aristotélicien<br />

caractéristique <strong>de</strong> la Renaissance, l’imitation, pouvait emprunter plusieurs canaux tout en<br />

restant parfaitement valable. Le premier canal, <strong>et</strong> pour une oreille mo<strong>de</strong>rne le moins<br />

abstrait <strong>et</strong> le plus direct, est celui qui relie le concept poétique à la sensation <strong>et</strong>/ou à<br />

l’émotion auditive. C’est ce type d’expression qui triomphera <strong>dans</strong> <strong>les</strong> <strong>madrigaux</strong> <strong>de</strong><br />

Monteverdi, Gesualdo ou du <strong>de</strong>rnier Marenzio. Le second type d’imitation, dénommée par<br />

Alfred Einstein Augenmusik – musique visuelle – s’adresse non plus aux oreil<strong>les</strong> <strong>de</strong><br />

l’auditeur mais aux yeux du chanteur-lecteur 457 . Comme l’a montré Alfred Einstein,<br />

l’Augenmusik ne touche qu’un registre stylistique relativement élevé (madrigal <strong>et</strong> mot<strong>et</strong>)<br />

mais n’est presque jamais utilisée <strong>dans</strong> <strong>les</strong> genres légers, ce qui dénote une certaine<br />

complexité d’écriture.<br />

Le <strong>de</strong>rnier type <strong>de</strong> madrigalismes, le plus abstrait selon nos critères, utilise <strong>de</strong>s co<strong>de</strong>s<br />

extérieurs – le plus souvent liés aux techniques contrapuntiques ou au vocabulaire musical<br />

– savamment imbriqués entre le texte poétique <strong>et</strong> son intonation. Ceux-ci ne touchent ni<br />

l’oreille, ni <strong>les</strong> yeux du lecteur-auditeur, mais sont conçus pour être compris uniquement<br />

par son intellect.<br />

455 Voir EINSTEIN Alfred, The Italian Madrigal, op. cit., p. 243.<br />

456 Michel Foucault a souligné le rôle <strong>de</strong> l´analogie <strong>et</strong> la ressemblance <strong>dans</strong> pensée <strong>de</strong> la Renaissance :<br />

« Jusqu´à la fin du XVI e siècle, la ressemblance a joué un rôle bâtisseur <strong>dans</strong> le savoir <strong>de</strong> la culture<br />

occi<strong>de</strong>ntale. C´est elle qui a conduit pour une gran<strong>de</strong> part l´exégèse <strong>et</strong> l´interprétation <strong>de</strong>s textes : c´est elle<br />

qui a organisé le jeu <strong>de</strong>s symbo<strong>les</strong>, permis la connaissance <strong>de</strong>s choses visib<strong>les</strong> <strong>et</strong> invisib<strong>les</strong>, guidé l´art <strong>de</strong> <strong>les</strong><br />

représenter .... », in FOUCAULT Michel, Les mots <strong>et</strong> <strong>les</strong> choses une archéologie <strong>de</strong>s sciences humaines,<br />

Paris, Gallimard, 1966, p. 32. Au siècle suivant, Descartes marquera une rupture radicale <strong>dans</strong><br />

l´épistémologie du XVII e siècle en proposant une métho<strong>de</strong> scientifique fondée sur l´ordre <strong>et</strong> la distinction.<br />

457 Voir EINSTEIN Alfred, « Eye Music », in The Italian Madrigal, op. cit., p. 243.<br />

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