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Herald

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ŕ Écoutez, je déteste vous jouer ce sale tour, mais Papa a<br />

entendu parler de vous. Il a insisté pour que vous restiez à<br />

dîner. Je lui ai dit que nous nous étions rencontrés à cette<br />

exposition de peinture, à la librairie Stanley Rose et s’il faut que<br />

vous tiriez les vers du nez de tout le monde à propos de mon<br />

alibi, essayez de faire ça en finesse. D’accord ?<br />

ŕ Sans problème, dis-je.<br />

Je laissai Madeleine glisser son bras sous le mien pour me<br />

conduire dans la maison. Le salon d’entrée devait à l’Espagne ce<br />

que l’extérieur de la résidence devait aux Tudor : tapisseries et<br />

épées de fer forgé entrecroisées sur des murs crépis de blanc,<br />

tapis persans épais sur le plancher de bois ciré. Le salon donnait<br />

sur un gigantesque séjour à l’atmosphère de club pour hommes<br />

Ŕ chaises de cuir vert disposées autour de tables basses et<br />

fauteuils profonds ; une énorme cheminée de pierre ; de petits<br />

tapis orientaux, multicolores, placés selon des angles variés, de<br />

manière à ne laisser apparaître en bordure qu’un peu de<br />

plancher de chêne.<br />

Les murs étaient lambrissés de merisier et mettaient en<br />

scène des vues en sépia de la famille et de ses ancêtres.<br />

Je remarquai un épagneul naturalisé qui se tenait près de la<br />

cheminée, avec dans la gueule un journal roulé et tout jauni.<br />

Madeleine dit :<br />

ŕ Ça, c’est Balto. Le journal, c’est le L.A. Times du 1 er août<br />

1926. C’est le jour où Papa a appris qu’il était millionnaire pour<br />

la première fois. Balto était notre chien à l’époque. Le<br />

comptable de Papa l’a appelé et a dit : « Emmett, vous êtes<br />

millionnaire ! » Daddy était en train de nettoyer ses pistolets, et<br />

Balto est arrivé avec le journal dans la gueule. Papa a voulu<br />

consacrer ce moment, aussi, il l’a abattu. Si vous regardez de<br />

près vous verrez l’orifice de la balle dans la poitrine. Retenez<br />

votre souffle, mon joli. Voici la famille.<br />

La mâchoire un peu tombante, je laissai Madeleine me<br />

conduire dans un petit salon. Les murs étaient couverts de<br />

photographies encadrées ; l’espace au sol était occupé par les<br />

trois autres Sprague de la famille dans leurs fauteuils assortis.<br />

Ils levèrent les yeux comme un seul homme, personne ne se<br />

leva. Souriant, en évitant de montrer mes dents, je dis<br />

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