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Herald

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des os. Au premier choc, je récitai un psaume que mon vieux<br />

m’avait obligé à apprendre ; au second, ce fut des « Notre-<br />

Père » que Danny Boylan avait coutume de psalmodier avant<br />

nos séances d’entraînement. Lorsque Dolphine dit : « Un marin,<br />

je peux voir sa vareuse », je ne savais plus si je voulais retrouver<br />

Lee vivant et dévoré par le chagrin ou alors mort et disparu. Je<br />

repoussai Dolphine sur le côté et me mis à bêcher.<br />

Mon premier coup de bêche sectionna le crâne du marin, le<br />

second déchira le devant de sa tunique et arracha le torse du<br />

reste du squelette. Les jambes étaient en miettes ; je bêchai sans<br />

m’en préoccuper et plongeai dans le sable luisant de mica. Ce<br />

fut ensuite des nids d’asticots dans les entrailles, une doublure<br />

gorgée de sang séché, du sable à nouveau, quelques ossements,<br />

puis plus rien Ŕ lorsque apparut soudain de la peau rose tannée<br />

par le soleil, des sourcils blonds couverts de cicatrices de points<br />

de suture qui m’étaient familiers. Lee était là qui me souriait du<br />

sourire du Dahlia, les vers grouillant de sa bouche et des deux<br />

trous qui avaient jadis été ses yeux.<br />

Je laissai tomber la bêche et me mis à courir. Dolphine<br />

hurla : « L’argent ! » derrière moi ; je courus vers la croix en<br />

flammes en songeant que je les lui avais faites, ces cicatrices,<br />

que c’était moi le responsable. J’arrivai à la voiture, rentrai à<br />

l’intérieur, passai en marche arrière, labourai le sable et le<br />

crucifix que j’écrasai et passai les vitesses, première-secondetroisième,<br />

en faisant craquer les pignons. J’entendis : « Ma<br />

voiture ! l’argent ! » pendant que je dérapais sur la route côtière<br />

pour me diriger vers le nord, tout en cherchant à brancher la<br />

sirène ; je donnai de grands coups dans le tableau de bord<br />

lorsque je compris soudain que l’équipement n’existait pas sur<br />

les véhicules civils.<br />

Je réussis à rejoindre Ensenada, à fond de ballon, à deux<br />

fois la vitesse maxi autorisée. Je larguai la Dodge dans la rue de<br />

l’hôtel, puis courus vers ma voiture. Je ralentis le pas en voyant<br />

trois hommes s’approcher en mouvement tournant, les mains<br />

dans les poches de leur veste.<br />

Ma Chevy à dix mètres, le mec du milieu, je le reconnus à<br />

son approche : c’était le capitaine Vasquez, et les deux autres<br />

s’écartaient en éventail pour me prendre en tenaille. Un seul<br />

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