Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne - Index of - Free

Selon Richard Eales, cette affirmation constitue sans doute la première mention
de l’application du principe de reddibilité des châteaux à l’espace britannique 69 . Cette
extension du principe de saisie des châteaux s’applique alors non seulement à
l’Angleterre mais aussi à ses marges. La carte 2.2. montre en effet qu’entre 1173 et
1178, les marges « celtiques » du royaume, le Pays de Galles et l’Écosse, furent
particulièrement touchées par les confiscations, en en même temps que l’Aquitaine (voir
chapitre 4). Le renforcement du pouvoir royal dans les marges se traduit par
l’affirmation de nouveaux rapports de pouvoir que Raoul de Diceto comme Roger de
Hoveden décrivent alors sous le terme d’imperium. En relatant la réaction des barons
écossais lors de la soumission de Guillaume le Lion à Henri II en 1175, Roger de
Hoveden montre que l’enjeu reposait bien sur la reconnaissance de l’imperium du roi
d’Angleterre :
Ils supplièrent le roi d’Angleterre et lui offrirent de nombreux
présents parce qu’il les déliait du dominium du roi d’Écosse pour les
soumettre à son imperium 70 .
Contrairement aux marges de l’espace britannique où le pouvoir royal relevait
d’un imperium, en Aquitaine la répression d’Henri II visa principalement à rétablir des
rapports de dominium.
Entre temps, le roi d’Angleterre était entré en Poitou avec son armée,
et prit de nombreux châteaux et forteresses et les intégra dans son
dominium 71 .
On peut s’interroger sur les nuances du vocabulaire entre l’imperium anglais
évoqué par Raoul de Diceto et le dominium aquitain de Benoît de Peterborough et ce
qu’ils nous permettent de saisir des rapports de pouvoir entre les deux espaces. En
Angleterre, l’organisation territoriale sur laquelle reposait l’institution monarchique
conférait à la puissance royale une efficacité qui ne nécessitait l’intervention de la force
militaire qu’en cas de rébellion. Le système administratif des shires permettait en effet
au roi d’encadrer les hommes et de mieux maîtriser le territoire du royaume. D’une
certaine manière, le vocable d’imperium reflète cette conception du pouvoir ne
69
EALES, R., « Castles and politics in England 1215-1224 », dans Anglo-Norman Castles, 2003, p. 367-
388.
70
HOVEDEN, II, p. 63: Regi vero Angliae patri plurimum supplicaverunt et dona plurima obtulerunt, ut
ispe eos a dominio regis Scotiae eriperet, et suo subjugaret imperio.
71
PETERBOROUGH, I, p. 121: Et obsederunt Novum Castrum et infra quindecim dies ceperunt. (…)
Richard vero (…), processit tamen cum exercitu suo et obsedit Muninoys, castellum vicecomitis de
Engelismo et infra decem dies cepit, et procedens inde obsedit civitatem de Engelismo.
140