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savoir des membres d’une communauté qui doivent fournir des informations aussi bien
de nature fiscale, qu’administrative ou pénale. Les jurys ne sont pas appelés à faire la
justice (iustitiam facere) mais à reconnaître et déclarer la vérité (recognoscere veritam).
Les shérifs étaient alors chargés de composer le jury en fonction du savoir et des
compétences spécifiques d’individus choisis au sein des « legalis homines ». Le terme
de legalis homo ne désignait pas un homme « qui connaît le droit », car il ne s’agissait
pas de faire appel à des juristes, mais plutôt un homme reconnu pour sa droiture, son
respect des lois et n’ayant jamais commis de délit, c'est-à-dire un homme dont le
serment est fiable, un homme d’honneur et de bonne réputation. C’est d’ailleurs
précisément sa bona fama qu’il devait utiliser lors des procès auxquels il pouvait être
appelé 191 . Plus qu’une catégorie juridique, les legales homines constituaient donc plutôt
un groupe défini par une norme sociale commune. Celui-ci tend cependant à
progressivement s’assimiler aux hommes libres en général à partir du moment où la
condition de vilain est plus strictement définie à la fin du XII e siècle. Les lettres de Jean
précisent parfois, en effet, qu’il s’agissait de choisir des hommes « libres et respectueux
des lois » (per visum librorum et legalium hominum) ou bien des prud’hommes
(proborum hominum) 192 . Juridiquement héritiers des boni homines carolingien, les
prud’hommes constituaient au XII e siècle un groupe social, se distinguant, parmi les non
nobles, par leur sagesse et la qualité de leur comportement 193 .
Les réformes judiciaires affirmaient ainsi non seulement les prérogatives de la
Justice royale contre les justices féodales, mais renforçaient également l’autorité royale
sur les communautés locales. La mise en place des jurys faisait ainsi émerger une petite
élite locale attachée au service de la Couronne par son implication dans les procédures
judiciaires, mais aussi comptables, grâce au système de vérification des comptes de
construction. Sur les 955 hommes recensés pour avoir attesté les comptes de
construction des shérifs, seuls 171 sont identifiés par leur profession ou leur fonction et
seulement 32 d’entre eux possèdent une fonction liée au chantier (voir tableau ci-
dessous).
191 ODEGAARD, C. E., « Legalis Homo », Speculum, 15: 2 (1940), p. 186-193; GAUVARD, C., « La
fama, une parole fondatrice », Médiévales. La Renommée, 24 (1993), p. 5-13.
192 Rot. Lit. Claus. I. 1204-1224, 1833, p. 198 ; Rotuli normanniae in Turri londinensi asservati, HARDY,
T. D. (éd.), 1835, p ; 67 : per visum quatuor proborum hominum de Arches et totum ; Rotuli de Liberate
ac de misis et praestitis regnante Johannes, HARDY, T. D. (éd.), 1844 ; p. 93.
193 GAUVARD, C., « Prud'homme », dans Dictionnaire du Moyen Âge, 2002, p. 1158.
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