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la dispute entre Richard et son frère Henri le Jeune dans les années 1180 334 . Un
sirventes de Bertrand de Born relate des vives tensions qui existaient à ce sujet :
Entre Poitiers, l’Ile-Bouchard, Loudun et Chinon, quelqu’un a osé
construire un beau château à Clairvaux, au milieu de la plaine. Je ne
voudrais pas que le jeune roi [Henri-le-jeune] l’apprenne et le voit
car il ne le trouverait pas à son goût, mais je crains, si blanche en est
la pierre qu’il ne puisse manquer de le voir depuis Matefelon 335
Le château de Clairvaux a aujourd’hui presque entièrement disparu et ne fut
manifestement jamais achevé comme le suggèrent les vestiges archéologiques ; Richard
ayant dû rendre le château à son père pour mettre fin au conflit 336 . Selon Christian
Corvisier, ces vestiges n’en restent pas moins « déroutants ». Malgré « la forme
aberrante » du donjon, il la trouve bien comparable à d’autres constructions de Richard,
comme celle de Talmont (voir infra) : il argumente l’attribution de ces constructions à
Richard en soulignant leur aspect « d’ostentation démonstrative nullement rentabilisée
pour l’usage ‘‘domestique’’… qui s’accorde bien avec l’esprit dans lequel le jeune
Richard fait fortifier Clairvaux » 337 .
Si Richard doit renoncer à Clairvaux, il poursuit son projet de contrôler la
seigneurie de Châtellerault en érigeant un nouveau château en pierre sur la rive gauche
de la Creuse, aux confins du Berry 338 . En 1184, Richard donne aux habitants du bourg
de Saint-Remy une charte de franchise si attractive que les hommes de Châtellerault et
d’Angles virent rapidement s’installer 339 . Selon Nicole Cherrier, la construction de ce
château participe de la dissolution et de l’ouverture des marches frontalières du comté
de Poitou qui cessent d’être un espace flou d’entre-deux, une frontière épaisse,
334 TORIGNI, II, p. 115 : Hoc etiam anno magna discordia facta est inter regem et filios suos, propter
castellum Clarae Vallis, quod erat de feudo Andegavensis, et Richardus comes Pictavensis, latenter
firmaverat, illud… ; PETERBOROUGH, I, p.294 : quod frater suum castellum de Cleresvaux, in
patrimonio sibi post patrem suum debito, contra suam firmaverat voluntatem.
335 BAUDRY, M.-P., Les fortifications des Plantagenêts en Poitou, 1154-1242, 2001, p. 239-246 ;
CORVISIER, C., « Les châteaux de Richard Coeur de Lion ou l'oeuvre de pierre comme démonstration
de force », dans Richard coeur de Lion roi d'Angleterre, duc de Normandie 1157-1199, 2004, p. 199-228,
citent GOUIRAN, G., L'amour et la guerre, l'œuvre de Bertrand de Born, 1985.
336 BAUDRY, M.-P., Les fortifications des Plantagenêts en Poitou : 1154-1242, 2001, p. 239-246.
337 CORVISIER, C., « Les châteaux de Richard Coeur de Lion ou l'oeuvre de pierre comme
démonstration de force », dans Richard coeur de Lion roi d'Angleterre, duc de Normandie 1157-1199,
2004, p. 199-228.
338 BAUDRY, M.-P., Les fortifications des Plantagenêts en Poitou : 1154-1242, 2001, p. 329, cite
BARDONNET, A., « Comptes et enquêtes d'Alphonse de Poitou 1253-1269 », Archives historiques du
Poitou, 8 (1879), p. 44-53. inquiesta de castri sancit remigii.
339 Layettes I, p. 142, et BARDONNET, A., « Comptes et enquêtes d'Alphonse de Poitou 1253-1269 »,
Archives historiques du Poitou, 8 (1879) p. 15-53 et 55 ; CHERRIER, N., « Châteaux, frontières et
espaces forestiers à l’est du Poitou du Xe au début du XIIe siècle », dans Château Gaillard. Études de
castellologie européenne, 1966, p. 45-52.
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