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laquelle un donjon carré avait été implanté par Guillaume le Conquérant. Jean fait ériger
les enceintes de la cour ainsi qu’une tour polygonale à l’extrémité de l’éperon 373 . Cette
tour, connue sous le nom de Butavant Tower au Moyen Âge, explicite assez bien les
présupposés de sa construction : défier autant qu’impressionner les attaquants
potentiels. Cependant, une part importante des dépenses reste consacrée à la
construction des demeures royales (£297 contre £360 pour le castellum), un aspect qui
suggère que le chantier de Corfe avait une fonction moins militaire que de mise en
scène de la résidence royale. Par ailleurs, Corfe était une prison importante ainsi que
l’un des châteaux destinés à abriter une partie du trésor royal.
On pourrait rapprocher le choix de réhabiliter Corfe avec celui de Moulineaux.
La vieille tour de Robert le Diable, qui se trouvait dans un méandre de la Seine en aval
de Rouen, n’avait plus de fonction défensive vis-à-vis de Rouen à la fin du XII e siècle,
puisque la menace ne venait pas, à cette date, de l’embouchure du fleuve. Une tradition
raconte toutefois que Moulineaux et la Roche d’Orival étaient reliés par un souterrain de
5 à 6 km, qui aurait fait de Moulineaux un arrière poste pour approvisionner la Roche
d’Orival, qui se trouvait en amont de Rouen sur la Seine 374 . Richard investit près de
£ a 300 pour réaffecter le site, transformant la place forte en véritable complexe
résidentiel que Jean occupe à maintes reprises (au moins 16 fois) 375 . En 1195, les
travaux concernent surtout le castrum, mais en 1198, il s’agit de construire les demeures
royales, de réparer et de recouvrir la chapelle 376 . Le choix d’un plan rectangulaire,
comme à Douvres, suggère que la fonction du château avait principalement pour but de
marquer le paysage de sa monumentalité (illustrations 5.50).
Plus que le donjon lui même, c’est souvent l’enceinte qui donnait au site sa
monumentalité. Celle-ci est d’ailleurs longtemps considérée comme une évolution
importante de la seconde moitié du XII e siècle, allant de pair avec l’évolution de la
poliorcétique 377 . À Chinon, c’est en effet l’enceinte plus que le donjon qui domine la
vallée de la Vienne. Chinon est choisi dès le début du règne d’Henri II pour devenir le
principal siège du pouvoir en Anjou. Le site avait en effet l’avantage d’être perché sur
un éperon rocheux d’une longueur de près de 400 m dominant la rivière. Les fouilles
373
COLVIN, H. M.; BROWN, R. A. et TAYLOR, A. J., The History of the King's Works, 1963, p. 619.
374
HOUDIN, R., Orival : forteresse médiévale de la Roche-Fouet de l'origine à nos jours, 2000.
375
MRSN, I, p. 134, 137-38 ; II, p. 459. Il est difficile de savoir combien exactement fut affecté à
Moulineaux car la plupart des dépenses concernent à la fois Moulineaux et Orival.
376 a
MRSN, II, p. 459 : £ 44 12s. in operationibus domorum de Molinelle et capelle reparandam et
recooperandam.
377
HÉLIOT, P., « L’évolution du donjon dans le nord-ouest de la France et en Angleterre au XIIe siècle
», Bulletin archéologique du CTHS, 5 (1969), p. 141-194.
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