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2.2.1- Une architecture de la puissance et de la dissuasion : construire pour
contrôler et dominer l’espace
Verrouiller le territoire : l’architecture aux « portes » de l’empire
Henri II semble avoir été préoccupé par la défense de la côte est de l’Angleterre,
comme le suggère la fortification de Douvres, Orford, Scarborough et Newcastle qui
permet de sécuriser une grande partie des littoraux. Il est cependant peu vraisemblable
que la menace de nouvelles invasions scandinaves ait pu motiver une telle organisation,
notamment dans le nord. En effet, comme l’a montré Matthew Strickland, un château
comme Newcastle avait une fonction plus offensive que défensive (voir chapitre 4),
permettant le débarquement et le déploiement de l’armée royale contre les troupes
rebelles 302 . Si la menace scandinave n’existait plus au milieu du XII e siècle, la crainte de
débarquements depuis le continent n’était pas totalement irréaliste, comme le montre les
tentatives des comtes de Boulogne en 1158 et des Français en 1216 303 .
La construction de Douvres constitue le plus gros budget du règne d’Henri II.
Les dépenses incluaient outre l’érection de la grande tour carrée, toute une série
d’enceintes dont la multiplication visait à fractionner l’espace du château et à créer
autant d’obstacles à la progression des machines (illustration 5.35) 304 . Les dépenses des
règnes de Richard et de Jean consistent à renforcer ces murailles, notamment avec des
barbacanes qu’un passage du récit du siège de Douvres en 1216 dans l’Histoire des ducs
de Normandie et des rois d’Angleterre par un auteur anonyme du XIII e siècle, permet de
reconstituer 305 . John Goodhall a en effet mis en évidence la sophistication architecturale
des défenses de la porte et du mur nord, pourvus de tours semi-cylindiques ainsi que de
la barbacane, qu’il attribue à Richard et/ou Jean. Celle-ci aurait permis au château de
résister jusqu’au bout aux attaques françaises et de conquérir sa réputation de « clé de
302
STRICKLAND, M., « Securing the north: invasion and strategy of defence in the twelfth century
Anglo-Scottish warfare », dans A.N.S., 1989, p. 177-198.
303
WAREHAM, A., « The motives and politics of the Bigod family, c.1066-1177 », dans Ibid., 1995, p.
223-242.
304
PR 26 H.II, p. 43 : £165 13s. 4d. in operatione muri castri circa castellum de Dovra ; PR 28 H.II,
p. 150 : £196 18s. 1d. in operatione turris et castelli de Dovra ; PR 30 H.II, p. 150 : £690 in predicta
operatione turris ; PR 31 H.II, p. 124-125 : £141 16s. 7d. in operatione turris de Dovra ; £157 6s. 5d. in
predicta operatione turris de Dovra ; PR 33 H.II, p. 211 £680 22s. Summa denariorum quos vicecomes
misit hoc anno in operatione turris et castelli de Dovra de firmis comitatus et debitis regis in comitatu et
de recepta thesauri sicut supra annotatum est, etc ; COLVIN, H. M.; BROWN, R. A. et TAYLOR, A. J.,
The History of the King's Works, 1963, I, p. 629-642.
305
Histoire des ducs de Normandie et des rois d'Angleterre, FRANCISQUE, Michel (éd.), 1965 ; sur la
chronique : LABORDERIE, O., « Convergences et divergences de points de vue: la conquête de la
Normandie en 1204 dans les deux chroniques de l'Anonyme de Béthune », dans 1204, la Normandie entre
Plantagenêts et Capétiens, 2007, p. 189-213.
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