Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne - Index of - Free

livré sa ville à Philippe Auguste en janvier 1203 160 . Les violences subies par le clergé
normand qui alimentèrent l’opposition croissante des évêques ne peut être minorée dans
la perte de la Normandie 161 . Quant aux abbayes, Henri II avait également des moyens de
faire pression sur le choix des moines. Véronique Gazeau relate ainsi comment Henri II,
mécontent de l’élection de Richard de Subligny au Mont-Saint-Michel en 1152, imposa
ses officiers à l’abbaye qui s’emparèrent d’objets précieux, provoquant la fuite de l’abbé
et refusa d’obéir au pape qui l’enjoignait de reconnaître l’élection 162 . Robert de Torigni,
élu abbé du Mont en 1154, joua ensuite un rôle dans l’affirmation territoriale du pouvoir
royal : en tant que seigneur temporaire de Pontorson en 1167 et 1168, il assura
notamment la marche normano-bretonne au moment de la révolte des barons bretons 163 .
En Anjou, à défaut d’exercer un droit sur les élections, les Plantagenêt avaient au
moins une influence sur la sélection des candidats, notamment à Angers. Si les évêques
n’étaient donc pas issus des familiares royaux, nombre d’entre eux ont néanmoins
soutenu Henri II, à l’instar de Guillaume Passavant, évêque du Mans (1145-1187) avec
lequel il entretenait de bonnes relations. Contrairement aux territoires au nord de la
Loire, les élections épiscopales et abbatiales en Aquitaine leur ont presque totalement
échappées 164 . Les Plantagenêt héritaient d’une situation où les établissements religieux
avaient pris l’habitude de se tourner vers Rome et non vers la cour ducale pour régler
des conflits de protection ou de possession 165 . Dès le début de son règne, Henri II se
heurta à l’opposition de Jean de Bellemains, l’évêque de Poitiers, et aux électeurs de
Bordeaux qui refusèrent en 1158 de procéder au scrutin en présence du roi et de choisir
son candidat. Tout au long du XII e siècle, la plupart des prélats poitevins étaient donc
issus des grandes familles aristocratiques locales souvent opposées aux Plantagenêt et
les vaines tentatives de ces derniers pour imposer leur candidat n’ont souvent fait
qu’accroître l’hostilité du clergé aquitain. Selon Ralph Turner, le manque de contrôle de
160
PELTZER, J., Canon Law, Careers and Conquest. Episcopal Elections in Normandy and Greater
Anjou, c. 1140-c. 1230, 2008, p. 129-131. Pour un aperçu des tensions entre Plantagenêt et Capétiens sur
l’épiscopat Normand et leurs interprétations voir POWER, D. J., « The Norman Church and the Agevin
and Capetian Kings », Journal of Ecclesiastical History, 56: 2 (2005), p. 205-234.
161
PACKARD, S. R., « King John and the Norman Church », The Harvard Theological Review, 15: 1
(1922), p. 15-40; POWER, D. J., « The Norman Church and the Agevin and Capetian Kings », Journal of
Ecclesiastical History, 56: 2 (2005), p. 205-234.
162
GAZEAU, V., Normannia monastica, 2007, I, p. 49-50.
163
Ibid., I, p. 326.
164
TURNER, R. V., « Richard Lionheart and the Episcopate in his French Domains », French Historial
Studies, 21: 4 (1998), p. 517-542 ; PELTZER, J., Canon Law, Careers and Conquest. Episcopal Elections
in Normandy and Greater Anjou, c. 1140-c. 1230, 2008.
165
TURNER, R. V., « Richard Lionheart and the Episcopate in his French Domains », French Historial
Studies, 21: 4 (1998), p. 517-542.
164