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Plantagenêt, en créant un discours sur leur auctoritas légitimant l’exercice de la
potestas. Cependant, tandis que le contrôle des châteaux et des monastères visait
initialement à renforcer les fidélités autour de la personne royale, la prise de possession
des fiefs et des honneurs a contribué à dissoudre les liens personnels qui unissaient les
barons au roi. Les rapports interpersonnels qui caractérisaient les rapports de pouvoir
dans la société féodale ont ainsi été fixés dans le territoire par la médiatisation des
représentations légales et politiques. Cette évolution rappelle ce que Jean Dunbabin
appelait le « dilemme des princes » 12 pour décrire le phénomène paradoxal de
renforcement de la potestas des princes en même temps que l’affaiblissement de leur
auctoritas, au profit de celle des rois. Sur le continent, les Plantagenêt doivent en effet
faire face à l’affirmation de plus en plus forte de l’autorité du roi de France. La
commise de la Normandie par Philippe Auguste mais surtout la faible résistance de ses
barons au cours de la campagne de 1203-1204 en constitue l’exemple le plus
significatif. Seul le renforcement mutuel de la potestas et de l’auctoritas permet ainsi
d’aboutir à la territorialisation du pouvoir princier, en tant que manifestation spatiale de
sa souveraineté. Si la politisation des rapports de pouvoir a concerné l’ensemble de
l’empire des Plantagenêt, il n’y a donc qu’en Angleterre, que la territorialisation du
pouvoir royal a réellement accompagné la mise en place d’une théorie de la
souveraineté.
Territorialisation
L’évolution des représentations du pouvoir et des missions de la royauté sont
donc encore loin de constituer un système cohérent de gouvernement. Le caractère
transitoire et instable des pratiques de politiques des Plantagenêt se traduit notamment
dans le recours alternativement au droit et la loi ou à la voluntas regis 13 . Ces deux
régimes d’action qui se côtoient sans cesse, donnent ainsi au pouvoir des Plantagenêt un
caractère ambivalent, que Lewis Warren n’hésite pas à qualifier de « schizophrénie
royale » 14 . Ainsi, tandis que les Plantagenêt peuvent compter sur des coutumes
réglementant leur patronage sur les églises en Normandie et Angleterre, pour installer
leurs candidats à la tête des établissements ecclésiastiques, ils doivent néanmoins
recourir de plus en plus souvent à l’argument de la volonté royale contre celle des
12
DUNBABIN, J., France in the Making, 843-1180, 1985, p. 371.
13
TURNER, R. V., « King John's concept of royal authority », History of Political Thought, 17: 2 (1996),
p. 157-178.
14
WARREN, W. L., King John, 1997, p. 178.
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