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Nos courtisans endurent aujourd’hui le labeur et la fatigue, de
nombreuses veilles et de grands dangers : danger de la mer, danger
des fleuves, danger des ponts, danger des montagnes, dangers des
faux frères. Ils affrontent souvent la mort, brisent et épuisent leurs
corps, risquent leurs vies. 103
Plus encore que sur le corps des courtisans, les principaux ravages avaient lieu
dans les régions traversées par le convoi. En même temps, c’est parce que la cour royale
vivait sur le mode de la déprédation qu’elle était vouée à la mobilité incessante. Au-delà
du rôle politique que représentait l’itinérance, la mobilité de la cour reposait également
sur des raisons matérielles, liée à l’impossibilité de s’approvisionner toujours sur les
mêmes ressources et à la nécessité de ponctionner des domaines chaque fois différents.
1.2.2- L’approvisionnement de la cour royale
Le choix des étapes au cours des itinéraires n’était pas purement aléatoire. Il
dépendait largement des ressources disponibles sur place pour subvenir au besoin du roi
et de sa cour. Si l’administration Plantagenêt était suffisamment performante pour
acheminer des denrées sur les lieux de séjour du roi, ces transports ne pouvaient être
effectués sur de trop longues distances. Les opérations d’envergure – transfert de blé
d’une région à l’autre lors des famines de 1176 et 1194 – restaient exceptionnelles 104 .
Les dépenses liées à l’approvisionnement des maisons du roi lors du passage de
la cour ont été parfois consignées dans les pipe rolls. On peut ainsi remarquer qu’en
1160, il faut « 100 mesures de froment, 10 de sel, 30 de jambon et 11 poids de
fromage » pour approvisionner le château de Douvres 105 . La cour était également
approvisionnée en vin de diverses provenances, y compris continentales. En 1176, en
effet, il est question de vin d’Anjou qu’Étienne de Tours (ou de Marçay, sénéchal
d’Anjou) a envoyé en Angleterre. Celui-ci est d’abord déposé dans le cellier de
Southampton avant d’être acheminé, par voie terrestre et fluviale, jusqu’à Clarendon,
Winchester et Londres 106 . Quatre autres tonneaux sont également envoyés à Woodstock
103
Epistola 14 de Pierre de Blois dans PL, CCVII, col. 44, cité et traduit par HARF-LANCNER, L.,
« L'enfer de la cour: la cour d'Henri II Plantagenêt et la Mesnie Hellequin », dans L'État et les
aristocraties (France, Angleterre, Écosse XIIe-XVIIe siècle), 1989, p. 27-50, (p. 40).
104
BILLORÉ, M., « Pouvoir et noblesse en Normandie (fin XIIe - début XIIIe siècles). De l'autocratie
Plantagenêt à la domination capétienne », Thèse de doctorat, sous la dir. de Martin Aurell, 2005, non
publiée, p. 451.
105
PR 6 H.II, p. 54 : £13 5s. 8d in munitione castelli de Dovra pro C sumis frumentis et X summis sal~ et
XXX baconis et XI pensis casei.
106
PR 22 H.II, p. 186 : 67s. 2d. pro vino quod Stephanus de Turon’ misit domino regis ponendo in
cellario apud Hantonia et ducendo apud Clarendon' et Wintoniam et Londonum ; p. 199 : £35 pro C
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